Abidjan - La banque Africaine de développement (BAD) ambitionne de mobiliser 300 à 400 milliards de dollars d'ici 2025 pour "nourrir l'Afrique", a-t-elle annoncé lors de la présentation de "sa stratégie pour la transformation de l'agriculture africaine 2016-2025", lundi à son siège à Abidjan.
"Nous avons besoin de 300 à 400 milliards de dollars dans les dix prochaines années pour réussir la transformation complète" a affirmé à l'AFP le Dr Chiji Ojukwu, directeur Agriculture et Agro-industrie de la BAD.
L'Afrique dépense près de 35 milliards de dollars par an en importations de nourriture alors qu'elle dispose de 65% des terres arables non cultivées, souligne la BAD.
La BAD va injecter directement 24 milliards de dollars avec la volonté que cette mise de départ "serve de catalyseur".
"Notre contribution est dérisoire, une goutte d'eau dans l'océan. On a besoin de beaucoup plus. Nos fonds doivent servir de catalyseurs pour que d'autres donateurs et partenaires nous rejoignent", explique le Dr Ojukwu.
Le responsable du secteur agricole souligne que le privé comme le public s'intéressent pas ou peu à l'agriculture. "Les gouvernements (africains) mettent très peu dans l'agriculture. Nous voulons faire augmenter les investissement publics dans le secteur agricole", dit-il.
"Quant au secteur privé, il a des ressources immenses dont il ne se sert pas. Les banques par exemple ne prêtent pas à l'agriculture. Nous voulons changer cette orientation et les faire investir cinq fois plus", assure M. Ojukwu.
"Nous allons apporter le capital de départ aux banques et les +dérisquer+", explique-t-il, précisant qu'il veut aussi créer des instruments pour pouvoir ponctionner les fonds souverains en faveur de l'agriculture.
"Le problème n°1 de l'agriculture africaine c'est la faible productivité.
La technologie est là mais elle n'arrive pas à l'agriculteur. Les agriculteurs doivent arriver à l'auto-subsistance mais pour l'atteindre il faut qu'ils fassent de l'agriculture comme un business et non une agriculture de subsistance", analyse M. Ojukwu.
"Le problème numéro deux: la faible valeur ajoutée. Ce que nous produisons, nous ne le transformons pas. Nous exportons de la matière brute. Exemple: l'industrie du chocolat représente 100 milliards de dollars par an dans le monde. L'Afrique en prend moins de 10%" alors qu'elle produit 80% des fèves de cacao, résume-t-il.
La faiblesse des infrastructures, de l'irrigation, du secteur bancaire et un environnement des affaires peu engageants sont d'autres problèmes à régler.
M. Ojukwu se veut optimiste: "Nous pensons qu'on peut y arrive dans les 10 ans mais il ne faut pas attendre 2025: la course commence aujourd'hui".