Dans une interview accordée au journal en ligne jeuneafrique.com, le président de la Cour constitutionnelle a déclaré que l’institution qu’elle dirige statue conformément à la procédure et pas en fonction des injonctions.
Répondant à la question sur la mise en garde adressée par le candidat de l’Opposition Jean Ping à la Cour constitutionnelle, en cas de rejet de son recours, Marie Madeleine Mbourantsouo a rappelé que la Cour ne statue pas en fonction des injonctions de l’une ou de l’autre partie.
« Nous pensons que ce n’est qu’un excès de langage. Vous faites bien de dire qu’il s’agit de « sa » vérité. Ici, il n’y a pas deux vérités. Nous examinons les faits à partir des procès-verbaux que la Cenap nous fait parvenir en sa qualité de principal organisateur du scrutin. Nous travaillons également en fonction des pièces que nous communiquent Monsieur Ping mais aussi Monsieur Bongo Ondimba. Les injonctions d’un candidat, quel qu’il soit, ne rentrent pas dans le cadre d’une procédure judiciaire normale. La Cour ne statue pas en fonction des injonctions de l’une ou de l’autre partie. Elle le fait au vu des dossiers qui lui sont soumis. Les membres de la Cour sont sereins. Ils examineront les recours comme la procédure le prévoit », a-t-elle répondu.
S’exprimant sur le climat de pression dans lequel se déroule ce contentieux électoral, la présidente de la haute juridiction a rappelé que la Cour constitutionnelle a l’habitude de travailler dans un tel climat, se référant au contentieux électoral de l’élection de 2009.
« Chaque élection présidentielle a toujours son lot de pression. Ce ne sera pas la première fois que la Cour constitutionnelle gabonaise se retrouve dans une situation sensible. Il vous souviendra qu’en 2009, c’est cette même cour qui a eu à superviser l’élection du président de la République suite au décès d’Omar Bongo Ondimba. Nous avons de l’expérience et sommes capables de travailler sous la pression. Je ne peux pas dire qu’on s’en accommode mais le juge, de par sa formation, a toujours des éléments qui lui permettent de ne pas perdre pied, de statuer non en opportunité mais en droit », a-t-elle rappelé.
Le président de la Cour constitutionnelle a également réagi sur des préjugés formulées en l’endroit de l’institution, laquelle jouerait toujours en faveur du pouvoir, au regard de sa proximité avec la famille Omar Bongo Ondimba. Pour elle, toutes ses relations n’influent nullement sur le caractère impartial de la haute juridiction.
« C’est vraiment dommage de devoir en parler. Écoutez, c’est de l’histoire ancienne. En plus, ces candidats qui en parlent ont eux-mêmes entretenu le même genre de relations avec cette même famille Bongo Ondimba. Donc je n’ai rien à leur dire. Je leur demande tout simplement de considérer que ces relations ne les ont pas empêchés, eux, de se présenter contre le fils d’Omar Bongo Ondimba ou de critiquer son action. Je suis juge, je le serai toute ma vie. J’ai mes convictions qui sont strictement personnelles. Je dois préciser que je ne suis pas seule à prendre les décisions. La Cour est composée de 9 juges parmi lesquels des personnes liées par le sang aux candidats à l’élection présidentielle. Donc, je dis que ces vieilles relations ne remettent en cause ni l’impartialité, ni la rigueur et encore moins la collégialité des décisions rendues par la Cour », a-t-elle dit.
Outre l’aspect lié à ces préjugés, le président de la Cour constitutionnelle a évoqué les possibilités qui s’offrent à elle dans le traitement du contentieux électoral. Elle a indiqué que la loi prévoit toutes les possibilités à savoir la confirmation de l’élection du candidat déclaré élu, l’inversion des résultats et l’annulation du scrutin. Toufefois, tout en indiquant qu’elle ne peut se déterminer en l’état actuel du dossier, elle a dit qu’il est rare que la voie de l’inversion soit utiliser.
« La Cour étant saisie en contentieux électoral, les dossiers portent aussi bien sur les résultats annoncés dans la province du Haut Ogooué, dans le Woleu Ntem, à Libreville, à Owendo ou à Ntoum. Comme vous le constatez, il est prématuré d’envisager telle ou telle voie. Je peux tout simplement vous assurer qu’en dehors de l’aspect contentieux, la Cour va procéder au contrôle de la régularité de tous les 2 580 procès-verbaux de cette élection. Nous ne validerons pas des résultats que nous n’aurons pas préalablement vérifiés », a-t-elle martelé.
Par ailleurs, réagissant sur l’organisation du scrutin, elle a regretté la résurgence de plusieurs insuffisances. Tout comme elle a déploré les attitudes antidémocratiques des acteurs politiques : le fait que les acteurs politiques ont privilégié les querelles de personnes au détriment de la confrontation des idées durant la campagne électorale, l’autoproclamation à la présidence de la République des candidats et des actes de violence qui ont suivi.
Rappelant que la cour dispose de quinze jours pour statuer à compter de la date d’enregistrement des recours au greffe, elle a exprimé son espoir que la Cour pourra vider sa saisine, d’ici la semaine prochaine.