A l’issue de la déclaration de politique générale du Premier ministre le lundi 10 mars dernier, le président de l’Assemblée nationale, dans son laïus, a prononcé une phrase pas vide de sens et qui en dit long sur l’état d’esprit actuel des «caciques» du Parti démocratique gabonais (PDG).
Qui a dit que l’élu de la Lolo-Wagna n’avait pas de cran ? Au-delà de son soutien sans faille au président Ali Bongo et au gouvernement, Guy Nzouba Ndama a lui aussi des états d’âme. Et il sait les exprimer… à la manière d’un diplomate, avec emphase ; le tout enrobé dans un discours plutôt courtois. «Les gouvernants actuels pensent que le Gabon a commencé en 2009», a-t-il lâché le 10 mars, lors du vote de confiance des députés envers Daniel Ona Ondo, le nouveau Premier ministre.
Guy Nzouba Ndama, le président de l’Assemblée nationale, constate, lui aussi, la mise à l’écart progressive de nombreuses personnalités au motif non officiel qu’ils ont servi sous l’ère Omar Bongo, et le relatif mépris que l’on affiche à leur égard, comme ce jour où, sur le plateau de la RTG1, Liban Souleyman avait déclaré à Louis Gaston Mayila : «en quarante ans, vous n’avez développé aucun projet, vous n’avez rien fait, nous, nous allons mettre en œuvre le PSGE». Omar Bongo et ses compères n’ont-ils vraiment rien fait en quarante-deux ans au pouvoir ? Ceux que l’on appelle, au sein du PDG, les «caciques» sont-ils aujourd’hui les seuls à défendre l’héritage politique et moral de l’homme de Lewaï ? Plus que ne le font les opposants, c’est du PDG «nouvelle vague» -PDG Emergent- que les critiques les plus acerbes émergent sur l’action du père de la Rénovation du Gabon.
«En quarante ans, vous n’avez rien fait»
On se rappelle que, lors d’une autre émission télévisuelle sur Gabon Télévision, le Pr. Daniel Franck Idiata, commissaire général du Cenarest, et membre du Parti démocratique gabonais, avait lui aussi affirmé que «c’est depuis 2009 avec l’arrivée de Séraphin Moundounga à la tête du ministère de l’Education nationale que l’on a pu définir, au Gabon, ce qu’est une école, un collège, un lycée».
En fait, «la petite phrase de Guy Nzouba Ndama sonne comme un constat amer selon lequel les gouvernants actuels ne veulent commenter que le passif des années Omar Bongo et ne veulent pas reconnaître l’actif, le positif», selon l’analyse d’un sociologue enseignant à l’Université Omar Bongo ayant requis l’anonymat. Et celui-ci d’ajouter : «sur de nombreux points, les analyses de Guy Nzouba Ndama rejoignent ceux d’un Jacques Adiahénot qui a dénoncé, jeudi dernier, le traitement réservé au bilan des années Omar Bongo et la mal gouvernance». A travers sa petite phrase, le député de la Lolo-Bouenguidi a, semble-t-il, voulu asséner quelques vérités aux membres de l’exécutif.
Tout ce qui est négatif relève de l’ère Omar Bongo
Un ancien ministre originaire de la Nyanga, actuellement parlementaire, affirme que pour les Emergents, tout ce qui est négatif relève de l’ère Omar Bongo, et tout ce qui est positif a été fait par eux. «Franchement, le PDG doit profiter de la célébration de son quarante-sixième anniversaire en cette année 2014 qui marque aussi le cinquième anniversaire de la mort de son fondateur pour réhabiliter le nom et l’image d’Omar Bongo», a conclu le même ancien ministre. Réagissant à la petite phrase du président de l’Assemblée nationale, un politologue franco-gabonais a estimé qu’il était dommage que «les hommes politiques gabonais attendent souvent de sortir du PDG et du système après leur mise à l’écart des affaires publiques pour exprimer leur pensée ; là, il faudrait saluer honorablement Guy Nzouba Ndama pour avoir osé. Il a osé en une phrase dans un discours qui en avait cinquante-trois, mais il a osé quand même !»