Devant passer ce 23 août à la télévision dans le cadre du débat organisé par le CNC, Jean Ping a faussé compagnie à tout le monde. Ce qui a donné lieu à un communiqué de l’équipe de campagne d’Ali Bongo, auquel a répondu le staff du «candidat consensuel» de l’opposition.
Alors que l’essentiel de son état-major de campagne, composé entre autres de Casimir Oyé Mba et Didjob Divungi Di Ndinge, l’attendait ce mardi 23 août à Gabon Télévision pour son passage au débat télévisé organisé par le Conseil national de la communication (CNC), Jean Ping a désappointé tout le monde en brillant par son absence.
Des réactions à cette attitude ont immédiatement été enregistrées, notamment du staff de campagne du candidat Ali Bongo qui a publié, dans la soirée, le communiqué ci-après livré in extenso : «L’équipe de campagne du candidat Ali Bongo Ondimba s’étonne et dénonce le comportement du candidat Jean Ping qui ce soir a montré le mépris qu’il porte au peuple gabonais et à ses institutions en refusant de se présenter à l’émission de débat organisée par le CNC dans le cadre de l’élection présidentielle.
Attendu par le peuple gabonais pour répondre aux questions légitimes sur son projet de société et aux questions tout aussi légitimes sur les nombreuses affaires de corruption et de rétro-commissions dans lesquelles lui et ses enfants sont impliqués, le candidat Jean Ping a choisi la fuite, prouvant encore une fois son incapacité à affronter la réalité et montrant ainsi qu’il représente un véritable risque pour le pays.»
Un peu plus tôt, en fin d’après-midi, un premier communiqué signé de «la coordination nationale de campagne du candidat Jean Ping» indiquait que celui-ci «demande au CNC l’organisation d’un véritable débat contradictoire entre les candidats», soulignant que son candidat «invite Monsieur Ali Bongo Ondimba à un débat télévisé devant la Nation, organisé sous l’égide du CNC, avec la participation des journalistes choisis par les candidats et représentant la diversité de la presse et des médias de notre pays.»
L’organisation des émissions «Expression directe» et «Le Débat» est encadrée par un décret tandis que l’ordre de passage des candidats a été tiré au sort le 10 août dernier au siège du CNC sous la supervision d’un huissier de justice, Maître Eliane Oberdeno Ontala Lewori, et devant les représentants des candidats ayant bien voulu y assister. On pourrait donc reprocher à l’équipe de Jean Ping de vouloir changer les règles du jeu en cours de partie, le débat entre candidats n’étant pas prévu dans le décret organisant les émissions pour la campagne à la télévision. Ce qu’a effectivement déploré le ministre de la Communication, Alain-Claude Bilie-By-Nze, joint au téléphone. Un membre du back-office de l’organisation de la campagne d’Ali Bongo a estimé pour sa part que Jean Ping s’est soustrait du débat avec «des journalistes qui le connaissent bien. Il préfère se livrer aux télévisions étrangères qui le connaissent mal et qui ne savent pas grand-chose des dossiers scandaleux qui pèsent sur lui. Il avait pourtant là l’opportunité de se défendre enfin.»
Ayant indubitablement pris connaissance du communiqué de l’équipe de campagne du candidat Ali Bongo, le staff de Jean Ping n’a pas manqué de réagir. Signé de Jean Gaspard Ntoutoume Ayi, président de la Commission communication, un communiqué du camp Ping a été publié encore plus tard dans la nuit, ci-après rendu in extenso : «L’équipe de campagne n’est pas surprise par la réaction de l’équipe de campagne de Monsieur Ali Bongo, tant elle confirme la panique qui désormais caractérise le candidat sortant.
Le CNC, dans le cadre de ses prérogatives légales offre à chaque candidat la possibilité de s’exprimer à travers une émission d’échanges avec des journalistes du service public. Ce droit d’expression proposé à chaque candidat constitue une obligation pour le CNC, mais pas pour le candidat. Dans sa position, Jean Ping n’a violé aucune loi et n’a fait que faire valoir son droit à la libre expression de ses opinions.
Toutefois, alors que le CNC n’a pas jugé utile de réagir, c’est l’équipe de campagne d’Ali Bongo qui se trouve dans l’obligation de le faire. Étonnant mélange des genres tout de même.
Le Communiqué de l’équipe de campagne d’Ali Bongo est rassurant pour le Peuple gabonais. Ainsi donc, lors de son passage à la même émission, le Peuple gabonais saura enfin toute la vérité sur les 5 actes de naissance d’Ali Bongo, il saura également comment Ali Bongo est-il devenu docteur en droit ou encore ce qu’est devenue la Résidence “Pozzo di Borgo” qui a coûté 65 milliards de Fcfa à l’Etat Gabonais pour son achat et plus de 50 milliards de Fcfa pour les travaux d’aménagement.
Ce mercredi 24 août 2016, Jean Ping se rendra à Lastourville puis Koulamoutou. L’accueil qui lui sera réservé permettra à tous et à chacun de se faire son idée de ce que pense le Peuple gabonais de la décision historique prise par Jean Ping.»
Jean Ping fait nécessairement une entorse à la pratique républicaine. Depuis 1993, année de la première élection présidentielle post-monopartisme au Gabon, aucun candidat n’avait encore refusé d’utiliser son temps d’antenne. Ce qui n’est pas sans rappeler que cela s’est vu sous d’autres cieux à quelques chose près, notamment en France où Jacques Chirac avait refusé, en 2002, de passer à la télévision pour débattre avec Jean-Marie Le Pen. Cette année-là, il n’y avait pas eu de débat télévisé entre les deux candidats avant le 2nd tour des élections présidentielles.