Auteur d’une requête envers la Cour constitutionnelle visant à contester le dosage provincialiste, au bénéfice du Haut-Ogooué, dans la liste des présidents des Commissions électorales provinciales, départementales, communales et consulaires, le président de Démocratie nouvelle a été amené à réexpliciter sa requête et sa pensée sur le sujet. L’occasion pour aborder, par ailleurs l’impartialité des institutions, les raisons d’aller à l’élection, la candidature unique de l’opposition et sa récente tournée dans le Woleu-Ntem.
Gabonreview : Monsieur Ndemezo’o, vous avez récemment alimenté la chronique pour avoir dénoncé la composition de la liste des commissaires de la Cenap. De quoi était-il réellement question, que dénonciez-vous ?
Ndemezo’o Obiang : Après la publication de la liste des présidents des Commissions électorales provinciales, départementales, communales et consulaires, notre parti, Démocratie nouvelle, a observé qu’il y avait manifestement des déséquilibres flagrants dans la composition sociologique des membres de ces commissions. Nous avons remarqué un nombre extrêmement élevé de ressortissants de la province du Haut-Ogooué et nous avons trouvé cela anormal. Nous avons fait un pointage qui nous amène à plus de 40 membres, présidents de commissions, ressortissants de cette province. D’autres ont fait un pointage beaucoup plus élevé qui a atteint une cinquantaine. Que cela soit 40 ou 50, de toute évidence et de façon manifeste, il y a un trop grand nombre de ressortissants du Haut-Ogooué nommés présidents de commissions.
Pour bien faire apparaître ce déséquilibre, nous avons fait une comparaison avec le nombre de ressortissants de l’ethnie Fang qui, comme on le sait, se retrouve dans 5 des 9 provinces de notre pays ; en l’occurrence l’Estuaire, le Woleu-Ntem, le Moyen-Ogooué, l’Ogooué-Ivindo et l’Ogooué-Maritime. Pour un groupe ethnique dont l’importance se situe, au bas chiffre, à environ 40% de la population du pays, il n’y avait que 15 ressortissants de l’ethnie Fang sur les 117 présidents des commissions électorales concernées. Nous avons montré que ce type de déséquilibre est susceptible d’aviver les tensions qui existent déjà dans notre pays, à la veille de l’élection présidentielle. Ce type de nominations déséquilibrées risquait de faire accentuer deux aspects de tension. L’une contre les ressortissants de la province du Haut-Ogooué qui serait considérés par une partie de la population comme des privilégiés. Naturellement, il va de soi que les ressortissants de la province du Haut-Ogooué ont les mêmes compétences que les ressortissants de toute autre province pour occuper la fonction de président. Là n’est pas le débat que l’Émergeant en chef a faussement essayé de développer à Franceville lors de son meeting, à travers sa diatribe contre ma personne.
Il n’est pas question de contester que les ressortissants de telle ou telle province aient des compétences, comme les ressortissants de toutes les autres provinces, pour occuper les fonctions de président de commissions. Mais le déséquilibre, tel qu’il apparaît, je dis bien manifeste, à la lecture de la composition de ces présidences de commissions risque d’aviver, dans le pays, le sentiment selon lequel il y aurait une place particulière que les ressortissants du Haut-Ogooué devraient avoir dans le processus électoral, et pour ainsi dire dans la gestion du pays. Ce sentiment n’est pas bon et des ressortissants de la province du Haut-Ogooué, membres de mon parti ou proches de mon parti, ont exprimé à mon niveau des inquiétudes par rapport à cette situation comme s’ils étaient une espèce de boucs émissaires, pour qu’au cas où il y aurait des problèmes qui se passent dans la gestion de ces commissions au cours de ce processus électoral, ils soient pris pour victimes expiatoires alors qu’ils n’y sont pour rien. Ils ne se sont pas auto-nommés. Voilà le premier sentiment que je crains : qu’il puisse être ravivé par ces nominations. L’autre sentiment, c’est la résurgence de la fameuse ligne «Tout sauf les Fangs», parce qu’on comprend mal qu’un groupe ethnique reconnu unanimement comme le plus important parmi les groupes ethniques qui peuplent notre pays, ne se retrouve à peine qu’avec 15 membres sur les 117 présidents de commissions. Je ne dis pas ressortissants de telle ou telle province, je dis les ressortissants de l’ensemble de l’ethnie Fang. On retrouve là, de façon subtile, mais de façon visible, la fameuse ligne «tout sauf les Fangs». On a bien l’impression que les Fangs ne seraient pas des présidents de commissions fiables. On les a donc pris au compte-goutte. Quelques-uns ont pu passer à travers les mailles du filet. Voilà ce qui m’a amené, en tant que président de Démocratie nouvelle, à saisir la Cour constitutionnelle pour faire remarquer ce déséquilibre qui ne participe pas de la volonté d’apaiser les tensions et d’amener à un processus électoral serein apaisé dans notre pays.
Il se dit que votre pointage s’est fait sur la seule base des noms et que du fait des mariages inter-ethniques notamment, un nommé Mboumba ou Ikapi peut bien être Fang. Ceux qui avancent ce point de vue n’ont pas si tort que ça, vraisemblablement…
Oui, c’est vrai, c’est possible. J’ai répondu à cela, à la Cour constitutionnelle, qu’il est possible que sur un, deux ou trois noms il y ait pu avoir des compatriotes qui, du fait d’un patronyme, sont considérés, à tort, comme ressortissants du Haut-Ogooué alors que c’est un simplement problème de nom et qu’ils sont ressortissants d’une autre province. Mais ça ne change rien au déséquilibre global, manifeste en regardant cette liste. Je ne pense pas que la plupart des noms de ressortissants du Haut-Ogooué qui sont sur cette liste porteraient des noms connus pour être d’autres provinces. Ce serait trop facile de l’expliquer ainsi. Lorsqu’on regarde en profondeur, il y a un déséquilibre manifeste. Je pense qu’il peut avoir des erreurs à la marge sur ce genre de choses, mais globalement parlant il reste que le nombre de ressortissants de l’ethnie Fang dans cette liste est infime au regard du poids démographique de ce groupe ethnique dans le pays. C’est un fait incontestable. Il est incontestable que le nombre de ressortissants du Haut-Ogooué, toutes ethnies confondues, est trop élevé par rapport aux ressortissants des autres provinces. Même si on partait de 45, 44 et qu’on arrivait à 30, cela resterait toujours exagéré lorsqu’on tient compte du fait qu’il y a 9 provinces dans notre pays et que les compétences pour exercer les fonctions de président de commission sont, je pense, également réparties dans les ressortissants des différentes provinces. La compétence ne peut pas avoir pour exclusivité une seule province.
Croyez-vous à la ritournelle selon laquelle le Haut-Ogooué est le bastion du pouvoir ou du candidat Ali Bongo et, par conséquent, que les présidents de commissions que vous indexez comme étant en majorité du Haut-Ogooué, rouleraient forcément pour le candidat du PDG ?
Je ne sais pas si ces ressortissants rouleraient pour le pouvoir émergent, mais ce dont je suis convaincu c’est que les nominations telles qu’elles ont été faites l’ont été dans ce sens. Est-ce que ces ressortissants vont aller dans ce sens ? Là c’est une autre chose qu’on verra à la lumière du développement des élections. Je pense que la volonté du pouvoir est de montrer que le Haut-Ogooué aurait un intérêt particulier à défendre le pourvoir émergent actuel. Je crois que la nomination d’un nombre élevé de ressortissants de cette province à la tête des commissions électorales vise à distiller ce sentiment selon lequel «nous vous avons mis en avant pour que vous soyez là pour défendre notre cause».
Nous avons, par exemple, des responsables politiques du parti majoritaire qui, lorsque le débat sur la question de l’acte de naissance du président actuel a été posée, ont dit que c’est un problème du Haut-Ogooué, province qui saura réagir à cela et qu’au fond, il revient aux seuls ressortissants du Haut-Ogooué de se préoccuper de cette question. Il y a donc une volonté d’instrumentaliser les compatriotes du Haut-Ogooué pour leur faire croire que la défense du régime actuel serait avant tout leur devoir à eux. On retrouve des théories qui ont circulé dans le passé et qui visent à montrer le Haut-Ogooué comme le bastion du pouvoir. C’est cette volonté de faire que l’on devine à travers les nominations telles qu’elles ont été faites.
A contrario, s’il y avait un peu plus de présidents de commissions de l’ethnie Fang, croyez-vous qu’ils rouleraient, par exemple, pour le candidat de Démocratie nouvelle ou pour un autre qu’Ali Bongo ?
Non, le problème n’est pas celui-là. Le problème est que les groupes ethniques de notre pays sont très nombreux. Je pense que les compétences pour occuper telle ou telle fonction républicaines sont égales quels que soient les ressortissants des groupes ethniques, quelles que soient les provinces d’origine. Donc, ce qui est nécessaire pour qu’un pays comme le nôtre continue à se développer dans la paix et la sérénité, c’est qu’il y ait un équilibre dans tout ce qui est fait. Vous savez, lorsqu’on prend un gouvernement, il n’existe pas (je l’ai dit au cours de l’audition à la Cour constitutionnelle) de règle qui dit que lorsqu’un gouvernement est formé, il faut tant de ministres originaires de telle province. Mais, il y va du sens commun qu’on ne saurait faire un gouvernement en prenant les deux tiers de ses membres, par exemple, d’une seule province ou d’une seule famille, en utilisant comme unique critère la compétence. La compétence se retrouve partout, mais on doit reconnaître que le pays est multi-ethnique ; on doit reconnaître que le pays se compose de 9 provinces et lorsqu’on fait des nominations dans un processus électoral extrêmement sensible comme celui auquel nous avons affaire actuellement, on doit respecter ces équilibres-là. C’est un problème d’équilibre, ce n’est pas le fait de dire que les ressortissants de telle ethnie, s’ils sont plus nombreux, rouleraient pour tel ou tel autre candidat. C’est un problème d’équilibre. Si un autre groupe ethnique ou les ressortissants d’une autre province se seraient retrouvés largement majoritaire dans la nomination des présidents de commissions électorales, nous à Démocratie nouvelle, l’aurions dénoncé avec la même vigueur. C’est un problème d’équilibre. Et cet équilibre, même s’il n’existe pas sur des documents écrits, on s’efforce de le respecter dans tout ce que nous faisons, parce que c’est un pays multi-ethnique, avec de nombreuses provinces, parce que dans toutes les nominations, il faut savoir raison gardée et ce n’est pas parce que les membres d’une même famille auraient par exemple des compétences qu’on serait fondé de donner toute une administration à des frères et des sœurs au motif qu’ils ont tous des compétences. On s’efforce toujours d’observer un équilibre. Notre pays, depuis les temps immémoriaux, depuis le président Léon Mba jusqu’à celui qui l’a suivi, s’est toujours efforcé, tant bien que mal, à rechercher et à respecter ces équilibres.
Les présidents de commissions sont censés être neutres, en principe. Mais le sont-ils ? Si nous regardons le vote qui s’est passé au bureau de la Cenap, sur la question du dossier de la candidature d’Ali Bongo Ondimba, il y avait d’un côté trois membres du bureau, représentant l’opposition, trois membres du bureau représentant la majorité, il y a un eu un vote qui aurait dû, au moins dans un premier tour, donné une égalité parfaite. Mais le président du bureau et le rapporteur général ont voté avec la majorité. On s’est bien rendu compte que le président de la Cenap et le rapporteur général de la Cenap ne sont pas neutres et j’ai dit devant la Cour constitutionnelle qu’on peut se poser la question de savoir si ces gens qui ne sont pas neutres peuvent nommer des présidents de commissions qui, eux, observeront une neutralité absolue. Et qu’il y a de fortes chances qu’eux-mêmes étant penchés d’un côté, les présidents qu’ils nomment penchent du même côté. Ceci relève du secret de polichinelle. Je ne pense pas qu’il y ait besoin de faire de nombreux dessins là-dessus.
En allant à la Cour Constitutionnelle, qu’espériez-vous ? Et pour ceux de nos lecteurs qui ont raté un épisode, qu’est-ce qui vous a été répondu ?
Je ne peux pas redonner les réponses de la Cour constitutionnelle. Cela la regarde. Mais si j’ai interpellé la Cour constitutionnelle, c’est parce qu’elle est garante de l’ensemble du processus électoral. En réalité, les nominations ont été faites par la Cenap. J’aurais pu, j’aurais même dû écrire au président de la Cenap pour lui dire de revoir sa copie. Mais j’estimais la démarche à la limite inutile. J’ai donc saisi directement la Cour constitutionnelle sans me faire du reste des illusions sur la décision qu’elle allait prendre. En fait, pour prendre l’opinion publique nationale et internationale à témoin, que l’institution chargée de réguler l’ensemble du processus électoral a été interpelée sur un problème de déséquilibre dans les nominations qui peut avoir des conséquences demain et après demain, au moment du déroulement des élections et lors, ce que je crains, des tensions post-életorales qui peuvent s’en suivre. Et, il faut bien lui dire, le président de Commission électorale est nommé sur proposition du président de la Cour constitutionnelle. Il est, en fait, nommé par la présidente de la Cour constitutionnelle. On peut penser que les nominations auxquelles a procédé la Cenap en ce qui concerne les présidents des commissions et le reste, ont reçu l’avis tout à fait favorable de la Cour constitutionnelle. Si elle avait constaté le même déséquilibre que moi, elle aurait pu, à mon avis, corriger cela. Elle ne l’a pas fait. Je suis donc en droit de penser qu’elle partage tout à fait le déséquilibre tel qu’il a été rendu manifeste par la Cenap. J’ai donc jugé inutile d’intervenir auprès de la Cenap pour lui demander de revoir sa copie, j’ai saisi directement l’institution qui est au-dessus d’elle et qui est le garant de l’ensemble du processus électoral. Ils m’ont fait l’honneur de m’auditionner en réunissant l’ensemble des 9 juges de la Cour, je les en remercie parce que cela permis que ce problème soit porté à l’attention du plus grand nombre, même si je regrette que dans le rendu qui a été fait à la télévision gabonaise et dans les médias, ce soit plutôt les interventions de la Cour qui ont été rendues à longueur d’émissions, alors que les développements que j’ai faits devant cette Cour ont été vraiment rendus en peau de chagrin. Je profite donc de l’opportunité que vous m’offrez pour repréciser tout ce que j’ai eu à développer devant la Cour constitutionnelle.
À vous entendre, il y a un côté un peu pessimiste quant à ce qu’on peut attendre de la Cour constitutionnelle et il y a cette antienne, «la Cour constitutionnelle c’est la Tour de Pise qui penche toujours du même côté», avec une Cenap qui, comme vous dites, vient de faire voter son président en faveur d’un candidat. Peut-on encore croire aux institutions gabonaises et pourquoi, dans ce pessimisme, aller aux élections ?
Les Institutions sont là. Tant qu’il n’y a pas d’autres, ce sont celles-là qui, malheureusement, existent. Je ne pense donc pas qu’on puisse faire fi des institutions. De mon point de vue, dès qu’il y aura l’élection d’un nouveau président de la République, l’une de ses tâches prioritaires devra être le toilettage institutionnel pour permettre qu’il y ait une réelle démocratie qui s’implante dans notre pays. Est-ce que le fait que les institutions soient manifestement penchées d’un côté doit entrainer l’opposition à ne pas aller aux élections ? C’est un débat qui agite l’opposition gabonaise depuis de longues années. Lorsque j’ai rejoint les rangs de cette opposition, le 28 février de l’année dernière, en adhérant au Front de l’opposition pour l’alternance, j’ai trouvé ce débat. J’y ai pris part avec la vision qui est la mienne.
Mon point de vue est que ne pas aller aux élections, c’est ouvrir tout simplement un boulevard à Ali Bongo Ondimba. Aller aux élections ne garantit pas qu’Ali Bongo Ondimba, à la fin du processus, sera renversé. Mais ne pas aller aux élections, c’est se mettre dans une position où il n’existe même pas un pourcentage d’incertitude, puisque je n’ai pas d’exemple dans le monde où des élections, notamment présidentielles, ont été boycottées par l’opposition et qu’elles aient été reprises tout simplement parce que l’opposition a refusé d’y participer. Ne pas aller aux élections revient tout simplement à offrir la victoire sur un plateau d’argent à Ali Bongo Ondimba. Aller aux élections ne veut pas dire qu’on est naïf et qu’on se trompe sur la neutralité des institutions en place. Mais, c’est se battre jusqu’au bout. là, nous nous sommes battus.
Toutes les forces de l’opposition pour une fois, rassemblées, unies, se sont battues pour obtenir l’empêchement, si je peux parler ainsi, de la validation de la candidature d’Ali Bongo Ondimba par la Cenap ou la Cour constitutionnelle. La Cenap puis la Cour constitutionnelle ont validé cette candidature. À mon avis, le combat de l’opposition ne doit pas s’arrêter là. Le combat doit continuer à user de tous les moyens pour obtenir l’alternance, et l’élection fait partie de ces moyens. De la même manière qu’il n’était pas possible, parce que nous nous préparions aux élections, de ne pas recourir à toutes les marches, à toutes les protestations, à toutes les initiatives qui ont été entreprises depuis des années, depuis ces derniers mois en particulier, pour empêcher la candidature d’Ali Bongo Ondimba, de la même manière, dès lors que nous nous trouvons à une autre phase du processus qui fait que nous avons les élections dans 4 semaines, cela fait partie du combat que l’opposition doit continuer à mener.
Il y a un combat pour empêcher Ali Bongo d’être candidat. Pour l’instant, ce combat n’a pas abouti. Mais l’opposition ne peut pas se dire que comme ce combat n’a pas abouti, ce n’est pas la peine de mener les autres formes de combat. Nous allons aller aux élections, mais nous n’y allons pas avec la naïveté comme croient certains qui pensent qu’il suffit d’aller aux élections pour que le régime d’Ali Bongo Ondimba s’effondre comme un château de cartes. Nous disons que même s’il n’y a qu’un 10, 15, 20% de chance qu’à travers les élections on en vienne à bout de ce régime, il faut jouer cette chance-là, de la même manière qu’on a joué nos chances en utilisant les autres formes de lutte. L’opposition ne peut pas se priver des autres formes de lutte tout simplement, parce que a priori rien ne dit qu’elle aboutirait. C’est pour cela qu’aujourd’hui, moi je pense que ce qu’il faut dire aux Gabonais, c’est à la suite des décisions tout à fait iniques de la Cenap et de la Cour constitutionnelle, de ne pas tomber dans le désespoir, de ne pas avoir comme réaction de dire, ce n’est plus la peine». Ce qui aurait pour conséquence, par rapport aux élections, d’entrainer un taux d’abstention élevé. L’abstention, c’est le pire ennemi pour l’opposition.
Partout où l’alternance démocratique a eu lieu en Afrique ou dans le monde, il a fallu que les partisans du changement soient les plus nombreux pour aller aux urnes. Aujourd’hui, nous demandons au peuple gabonais de se mobiliser pour aller aux urnes avec la même ferveur qui lui a permis de se mobiliser, pour continuer à utiliser toutes les autres formes de luttes pour en venir à bout du régime Bongo-PDG. Nous n’excluons aucune forme de lutte, mais ce que nous récusons de manière catégorique, nous à Démocratie nouvelle et je peux me permettre de dire dans l’ensemble des forces qui soutiennent le candidat Jean Ping, c’est le fait de dire : puisqu’on n’a pas pu empêcher par les voies des recours la candidature d’Ali Bongo Ondimba, ce n’est plus la peine, on se croise les bras. Si on adopte cette attitude, dès maintenant, monsieur Ali Bongo Ondimba va sabrer le champagne.
Il n’y aura pas reprise des élections tout simplement parce que l’opposition n’y a pas participé. Le pouvoir a pris le soin, parmi les candidats, d’avoir des candidats qui sont mandatés pour, après la proclamation des résultats en faveur d’Ali Bongo, reconnaître que malgré quelques récriminations, les choses se sont passées à peu près correctement. Ces candidats sont là. Même si l’opposition véritable refuse d’aller aux élections, ces candidats iront aux élections pour légitimer le coup d’Etat électoral de monsieur Ali Bongo Ondimba. Nous ne devons pas permettre cela.
C’est pour cela que nous disons qu’aujourd’hui la bataille se déplace de terrain. C’est une bataille qui a porté principalement, jusqu’à présent, puisqu’il y a un certain nombre de recours sur les questions de la nationalité d’Ali Bongo Ondimba – notamment le recours de M. Léon Paul Ngoulakia devant la Cour d’appel judiciaire – tout ceci participe des démarches en vue d’empêcher la candidature d’Ali Bongo Ondimba. Mais en même temps qu’on continue ces démarches-là, les mobilisations doivent continuer. Si ces mobilisations du peuple gabonais peuvent amener Ali Bongo Ondimba à retirer sa candidature, ce serait une bonne chose. J’ai vu un appel comme celui de Me Fabien Méré qui a demandé à M. Ali Bongo de se retirer. Pour moi, c’est un appel qui va dans le bon sens, même si je doute qu’Ali Bongo Ondimba l’écoute. De toutes ces démarches, il ne faut en exclure aucune et en même temps, puisque les élections sont programmées, il faut que l’opposition accepte d’aller utiliser ce moyen que sont les élections pour chercher à obtenir l’alternance démocratique dans notre pays. Ce n’est pas gagné d’avance, mais ce n’est pas parce que ce n’est pas gagné d’avance qu’il ne faut pas utiliser ce moyen de lutte. Les élections sont également un moyen de lutte. Il n’y a pas de raison qu’on recourt à d’autres moyens de lutte et qu’on renonce de nous-mêmes à utiliser ce moyen-là.
Est-ce dans ce sens que vous êtes reparti tout récemment dans le Woleu-Ntem ? Bref, qu’est-ce qui justifie votre tournée dans le Woleu-Ntem peu après qu’Ali Bongo y soit passé ?
Le passage d’Ali Bongo dans le Woleu-Ntem a été précédé, de quelques jours, du passage d’une délégation du parti Démocratie nouvelle, conduite par son président que je suis. C’est pour dire que c’est une coïncidence que cette tournée de Démocratie nouvelle se soit retrouvée presque au passage de M. Ali Bongo Ondimba dans la province. Mais, c’est une coïncidence dont nous sommes plutôt heureux. Elle nous a permis de passer immédiatement après le passage d’Ali Bongo Ondimba pour porter aux populations du Woleu-Ntem le discours de l’opposition.
Nous sommes allés dans le Woleu-Ntem pour au moins trois objectifs : le premier est comme vous le savez, Démocratie nouvelle est un nouveau parti. Un parti crée les 27 et 28 avril dernier. Le 30 juillet en cours, nous avons reçu le récépissé définitif de légalisation de ce parti. Nous sommes donc allés dans le Woleu-Ntem après avoir fait une première sortie à Port-Gentil et trois autres à Libreville, respectivement dans le 6e arrondissement, à Owendo et dans le 1er arrondissement. Nous sommes allés dans le Woleu-Ntem pour présenter ce parti nouveau et procéder à l’installation de ses responsables locaux. C’était un objectif fondamental.
Le parti soutient, comme vous le savez, monsieur Jean Ping pour l’élection présidentielle de ce mois, mais la vie du parti ne va pas s’arrêter à l’élection présidentielle. Nous sommes en démocratie et la démocratie c’est un enchainement d’élections ininterrompues. Après les élections présidentielles, dans quelques mois, si le calendrier constitutionnel est respecté, nous devrons aller aux élections législatives. Après les législatives, nous serons à moins de deux ans des nouvelles élections locales et après nous aurons déjà un regard sur les nouvelles élections présidentielles. Dans l’optique de notre parti, qui s’inscrit dans la durée, nous allons pour implanter le parti pour qu’à terme, il s’engage dans toutes ces batailles. C’était le premier objectif.
Le deuxième objectif que nous avons poursuivi au cours de cette tournée de Démocratie nouvelle dans le Grand nord c’est de redire le message que nous avons porté l’année dernière lorsque nous y avons accompagné M. Jean Ping. Il s’agit de présenter ce dernier, selon nous, comme le candidat de l’opposition qui réunit aujourd’hui le maximum d’atouts pour succéder à Ali Bongo Ondimba à la tête de l’Etat. Nous avons en quelque sorte effectué cette précampagne en faveur de Jean Ping. Nous avons justement insisté au cours de notre campagne sur le fait que le peuple du Woleu-Ntem, comme le peuple de toutes les provinces du pays, évite la dispersion des voix. Il doit concentrer son vote sur le candidat de l’opposition qui apparaît avoir les meilleures chances de remporter face à Ali Bongo Ondimba, sans que pour autant que nous excluons qu’en dernière minute il y ait un accord au sein de l’ensemble de l’opposition pour présenter un candidat unique. Pour ce qui nous concerne, jusqu’à la dernière minute, nous continuerons d’espérer un sursaut au-delà des égos pour qu’un seul candidat de l’opposition véritable se présente face à Ali Bongo Ondimba. Mais dans le cas où ce serait la situation actuelle qui devait perdurer jusqu’au 27 août, nous avons invité le peuple du Woleu-Ntem à faire le bon choix. Et pour nous le bon choix, c’est Jean Ping pour de multiples raisons dont l’une est qu’il a une carrure internationale sans égale,