Après la 2ème réunion en rapport avec l’élaboration et la mise en place des politiques nationales de sécurité alimentaire et de nutritionnelle au Gabon, le coordonnateur de ce projet s’est exprimé sur l’importance de la mise en place de cette politique nationale.
Le Gabon dispose-t-il d’une politique en matière de sécurité alimentaire ?
Avant de répondre à cette question, je vais revenir sur la notion de sécurité alimentaire. Cette notion s’échelonne sur quatre dimensions dont les aspects de production, les aspects d’accessibilités, les aspects d’utilisation (la conservation par exemple) et enfin la stabilité. Lorsqu’un seul élément de cette chaîne présente un problème, nous rentrons dans ce que nous appelons l’insécurité alimentaire
Pour revenir à votre question, à savoir si le Gabon dispose d’une politique de en matière de sécurité alimentaire, on va dire oui et non.
Oui, parce qu’en 2008, on a eu deux politiques qui constituent le cadre réglementaire pour ce qui est du secteur agriculture au Gabon : il s’agit de la loi sur le code des investissements agricoles et la loi sur la politique agricole au Gabon.
Non, car nous n’avons pas une politique qui prend en compte les aspects de sécurité alimentaire et nutritionnelle. Malgré la mise en place en 2015, la politique nationale d’investissement de sécurité alimentaire et nutritionnelle (Pniasan), l’aspect nutritionnel n’est pas pris en compte dans tout ce qui est fait jusque-là.
Si vous m’aviez demandé si le Gabon dispose d’une politique et matière de sécurité alimentaire et nutritionnelle, je vous direz non, nous n’avons pas encore une politique qui prend de manière globale ces deux aspects.
En regardant les choses sous cet angle, vous comprenez aisément l’importance de mettre en place une politique en matière de sécurité alimentaire et nutritionnelle.
Il y a une nouvelle vision qui se dégage aujourd’hui, c'est-à-dire que lorsqu’on parle de sécurité alimentaire, on doit y inclure les aspects nutritionnels, parce que la nutrition c’est par exemple s’assurer que nous avons une agriculture diversifiée qui permette d’avoir tous les éléments nutritifs qu’il faut pour notre alimentation. Le tout n’est pas de parler de sécurité alimentaire si on ne produit en quantité que du manioc et de la banane ; il faut qu’on arrive à combiner l’agriculture à l’arboriculture ou encore l’agroforesterie. On a par exemple les produits forestiers non ligneux à l’exemple du Nkumu qui participe beaucoup à la nutrition.
Si le côté nutritionnel n’est pas pris en compte, comment veillez- vous à la bonne santé des populations ?
Je suis tout à fait d’accord avec vous. En ce moment même, en plus du problème de sécurité alimentaire de manière globale, puisse que nous avons les problèmes de routes, nous avons des problèmes de production, de diversification, nous avons donc les problèmes de sécurité alimentaire. Mais comment y veillons-nous ? Je ne dirais pas que rien n’est fait ; beaucoup a été fait et nous devons par contre nous pencher sur le comment va-t-on faire pour améliorer cette politique.
En effet, au niveau du ministère de l’Agriculture, nous avons déjà l’Agence gabonaise de sécurité alimentaire (Agasa) qui a des missions. Je ne dirais pas qu’elle ne fait pas son travail sauf que des manquements sont observés. Il n’y a pas suffisamment de laboratoires, de personnels ni de moyens pour assurer cette sécurité sanitaire. Celle-ci consiste à veiller à ce que la population consomme une nourriture saine et riche, mais il y a peut-être des efforts à faire à ce niveau. La direction de l’agriculture une mission, celle de veiller à la réglementation des produits phytosanitaire, les pesticides. Nos maraîchers en utilisant les pesticides ne respectent pas souvent la norme, on peut donc se retrouver avec un beau plat de laitue, qui n’est rien d’autre que du « poison ». Ainsi, nous, à la direction générale de l’agriculture, nous avons des missions qui participent à la sécurité alimentaire et nous essayons de le faire, mais le problème est plus général, car il va falloir qu’il y ait une véritable politique qui impliquerait tout le monde, un budget et un personnel adéquat déployé sur le terrain afin de veiller à ce que les normes phytosanitaires soient respectées, pour veiller à ce que les manuels d’utilisation de pesticides qu’on peut distribuer à tous nos maraîchers à nos producteurs locaux dans tous le Gabon.
Votre réunion du 18 juillet 2016 portait sur l’élaboration et la révision des politiques nationales de sécurité alimentaire et nutritionnelle au Gabon. De quoi s’agit-il ?
Pour bien cerner les choses, il faut que je vous fasse la genèse de ce projet. Vous savez que les conventions internationales que nous signons sont au-dessus de nos lois nationales, c’est une règle universelle. En 2014, lors de la conférence universelle sur la nutrition à Rome et le Gabon y a participé. Au sortir de cette réunion il y a eu 60 recommandations subdivisées en une quinzaine de thématiques. Ces recommandations visaient à prendre en compte dans nos politiques de développement, la dimension nutritionnelle qui, semble-t-il, est ignorée par plusieurs pays.
Il faut souligner que la malnutrition ne renvoie pas seulement à une personne qui a une carence en micronutriments, c’est aussi une personne qui abuse de ces micronutriments. Dans ce cas on plonge dans des problèmes d’obésité, des problèmes de maladies non transmissibles à l’exemple des maladies cardiovasculaires.
Cette grande conférence a donné des orientations pour que les gens prennent l’aspect nutritionnel dans les politiques nationales. Le Gabon, ayant signé puis ratifié ces recommandations, a donc l’obligation de mettre en place une politique nationale de sécurité alimentaire et nutritionnelle.
En octobre 2015, le Gabon a organisé une rencontre sous régionale sur le suivi des recommandations de Rome, organisé par la Fao et l’Oms. Cette rencontre a donné naissance à l’élaboration de la feuille de route pays. Et sur la feuille de route Gabon figurait la mise en place d’une politique nationale de sécurité alimentaire et nutritionnelle en priorité. C’est dans ce cadre que nous avons pu mettre en place avec l’aide de la Fao et l’Oms ce projet qui a été signé en 2016 par le ministre de tutelle.
M. N’gosso pourquoi l’emploi des termes élaboration et révision ?
Le projet de coopération technique avec la Fao regroupe quatre pays, dont la République Démocratique du Congo, la République centrafricaine, le Congo Brazzaville et le Gabon, c’est ce que nous appelons l’élaboration et la révision des politiques nationales de sécurité alimentaire et nutritionnelle. Dans ce groupe, tous les pays ne sont pas au même niveau.
En effet dans le cas de la République Démocratique du Congo qui est déjà en avance dans la mise en place une politique nationale de sécurité alimentaire et nutritionnelle, s’inscrit dans la révision, les experts sont même en train de mettre sur pied des stratégies mais le pan nutritionnel n’est pas pris en compte dans toute sa globalité. Le Gabon par exemple qui n’a rien dans ce domaine, ne peut que faire dans l’élaboration d’une politique nationale, mais comme c’est un projet qui regroupe quatre pays, on ne peut que mettre en évidence ces deux thématiques.
Comment appréciez-vous les efforts du Gabon dans le domaine de la sécurité alimentaire?
Je suis un technicien, et je pense qu’au-delà du cadre normatif la volonté affiché par le gouvernement gabonais prouve son engagement. Cependant lorsqu’on fait une photographie de la réalité, l’on observe néanmoins que la population reste tout de même exposée à l’insécurité alimentaire des aliments, on observe des problèmes sur toute la chaîne. En somme la volonté politique est bien présente, mais elle ne se manifeste pas assez sur le terrain.
Y a-t-il des standards en matière de sécurité alimentaire ? Quels sont ces standards ? Le Gabon les respecte-t-il ?
Bien entendu, il y a des standards, c’est pour cette raison qu’il y a l’Agasa, la direction générale de l’Agriculture en l’occurrence sa direction en charge de la protection des végétaux. Si on prend en exemple le secteur de l’importation des produits avicoles, au niveau de l’Agasa, il se doit de s’assurer que ce qui rentre est propre à la consommation. A côté de l’Agasa, nous avons la direction générale de la consommation et de la concurrence et l’agence gabonaise de normalisation (Aganor) qui ont des missions similaires. Ça veut dire que, s’il y a synergie, on ne devrait plus avoir des problèmes. Vous voyez qu’il y a des normes, des standards pour la sécurité alimentaires.
Pour revenir sur les standards de normalisation, je pense qu’il devrait y avoir un travail de fond pour fédérer tous les efforts de l’Agasa, la Dgcc, l’aganor…