Détenue à 51% par Veolia, la Société d’énergie et d’eau du Gabon (SEEG) bénéficie d’une concession depuis bientôt 20 ans. Pour préparer la fin de cette convention, le gouvernement vient de signer un protocole de négociation avec l’entreprise. Cependant, les populations restent insatisfaites de la qualité des prestations.
Le gouvernement gabonais, représenté par le ministre de l’Energie et des ressources hydrauliques, Guy Bertrand Mapangou et celui de l’Economie, Régis Immongault Tatangani, et le groupe Veolia, représenté par Antoine Frerot, ont signé le 7 juillet dernier un protocole de négociation en vue de préparer la fin de la convention qui lie les deux acteurs, prévue en juin 2017.
Signée le 13 juin 1997 pour une durée de 20 ans, le contrat de concession entre l’Etat gabonais et SEEG-Veolia prévoit à titre exclusif la production, le transport et la distribution de l’eau potable et de l’énergie électrique, d’une part, et la production de l’énergie électrique à titre non exclusif sur le périmètre de la concession, d’autre part.
Plusieurs années après, le constat est amer. Les populations gabonaises dans leur majorité se plaignent des prestations du groupe français. Coupures intempestives d’électricité, délestage, obsolescence des équipements, mauvaise qualité de l’eau, facturation démesurée, etc. sont autant de critiques nourries contre la SEEG par les populations qui, désabusées, se voient quelques fois obligées de faire le sit-in devant le siège social du concessionnaire.
Excédé par cette situation préoccupante, le gouvernement gabonais, réuni le 6 juin 2008 autour de l’ancien chef de l’Etat, avait instruit le ministre des Hydrocarbures, de l’énergie, des ressources hydrauliques et de la Promotion des énergies nouvelles à renégocier la convention liant l’Etat à cet opérateur économique. Avant de lancer en avril 2010 sous Ali Bongo Ondimba un audit comptable, financier, tarifaire et technique du contrat de concession.
Engagements non tenus
Réalisé par le cabinet Deloite Touche Tohmatsu, cet audit a permis de mettre en exergue plusieurs écarts, imputables à la SEEG, sur la gestion administrative et commerciale. Voire même sur les performances techniques. « La revue des obligations en matière de gestion commerciale, de qualité et de performance de services met en évidence plusieurs manquements », inique l’audit.
1. Des performances techniques en constante dégradation sur les installations auditées
2. La gestion des compteurs ne permet pas actuellement de garantir la fiabilité des mesures et le renouvellement apparait insuffisant. Une situation critique pour l’alimentation en eau potable de la ville de Libreville, liée principalement à un déficit d’investissement. Le renouvellement des réseaux en eau potable est faible. Les valeurs transmises par la SEEG font état d’un renouvellement très faible des réseaux d’eau potable évalué à 0,13% du linéaire réseau sur les 10 dernières années. Il apparait souhaitable que la SEEG augmente le taux de renouvellement des réseaux dans les années à venir afin d’en limiter le vieillissement et la dégradation. L’usine de Franceville présente un état de vétusté et apparait dégradée.
3. Des manquements significatifs dans le cadre de l’exploitation du domaine concédé électricité en matière de renouvellement. Un retard considérable a été constaté en matière de renouvellement des biens de retour dans tous les domaines (production, transport, distribution). L'insuffisance d'investissement pour le renouvellement et les extensions, dans les domaines du transport et de la production, empêchent une amélioration de la qualité du service.
4. Des tarifs à la hausse qui sont décorrélés de la structure des coûts actuels et futurs de la SEEG.
5. Des investissements réalisés par la SEEG qui ne permettent pas de faire face à la demande et aux exigences de qualité de services requis par la convention de concession. Sur les installations électriques, les retards constatés au niveau de l’investissement dans les capacités de production ont réduit les marges de sécurité existantes au début de la concession compromettant ainsi la continuité de services.
6. Un pilotage administratif et financier qui révèle des insuffisances et requiert des ajustements. Une refonte en profondeur de la comptabilité analytique semble donc nécessaire, qui pourra aller de pair avec la révision du mode de fixation des tarifs… », relève le rapport d’audit publié dans le magazine le Quorum.
La défense du concessionnaire
Pour se défendre, la SEEG indexe l’Etat Gabonais, pour n’avoir pas honoré ses engagements, en la privant des ressources nécessaires pour réaliser les investissements. Mieux, les responsables de cette société affirmaient le 20 avril dernier qu’ils avaient engagé de gros efforts pour satisfaire les besoins en eau et en électricité de ses clients. Selon eux, entre 1997 et 2013 plus de 388 milliards Fcfa ont été investis, dont plus de 82 % sur le domaine concédé. Pourtant, le contrat de gestion déléguée ne prévoyait sur cette période qu’une enveloppe d’investissements de près de 300 milliards Fcfa.
Par ailleurs, la SEEG dit avoir conduit de façon volontariste, au cours des trois premières années de la concession, la réhabilitation et la mise à niveau des installations mises à disposition. Aussi, l’extension des réseaux et l’alimentation de nouveaux centres ont permis en 17 ans, selon eux, d’augmenter considérablement le nombre d’abonnés. Soit plus de 188 % pour l’électricité et plus de 212 % pour l’eau potable. Sans compter les travaux qui ont été réalisés sur la centrale d’Owendo afin d’accroître et de moderniser les capacités de production de la SEEG.
Pour autant, les populations ne sont pas satisfaites en raison du calvaire dû à la qualité du service et des difficultés qu’elles rencontrent pour s’approvisionner en eau potable. D’où leur souhait de voir ce marché s’ouvrir à la concurrence.