Alors qu’on croyait le débat clos à ce sujet, avec la publication par le tribunal de Nantes en France d’un acte «authentique», nouveau rebondissement : les commissaires nationaux à l’assemblée plénière de la Commission électorale nationale autonome et permanente (Cenap) représentant l’opposition sont formels : un nouvel acte de naissance d’Ali Bongo est apparu, n’ayant rien à voir avec celui de Nantes ni aucun autre consulté auparavant.
Franklin Okenkali, Paul Marie Gondjout et Paul Désiré Gnama ont parlé d’une situation inédite. M. Gondjout a réitéré ce qu’il avait dit la veille : «Sur les 14 candidatures à dossier complet, il y avait celle d’Ali Bongo Ondimba. Nous avons eu un consensus sur les 13 autres candidats, à l’exception d’Ali Bongo Ondimba où il n’y a pas eu de consensus. Il a fallu donc recourir au vote, pour la première fois dans l’histoire de la Commission nationale électorale, des huit membres du Bureau. Donc seule la Cenap s’est prononcée pour la candidature d’Ali Bongo Ondimba, 5 voix contre 3 pour l’opposition».
Les éléments de contestation fournis par l’opposition n’étaient pas de sérieux appuis pour retenir l’attention de la Cenap, aurait souligné René Aboghé Ella, le président de la Cenap, refusant que l’Assemblée plénière ne se prononce sur les pièces fournies par les plaignants. Selon le témoignage de Paul Marie Gondjout, le président de la Cenap a fait preuve d’une confusion totale, avançant sur le fait que la Cenap n’est pas une juridiction pour pouvoir se prononcer sur la validité et la fiabilité des pièces qui sont produites à l’appui des dossiers de candidature. Toujours selon l’éminent membre de l’Union nationale (UN), il a volontairement occulté la responsabilité de l’administration dont il a la charge, qui est celle d’appliquer la loi dans ses missions et dans son domaine de compétence. «La loi lui reconnaissant même de porter devant les tribunaux toutes infractions supposés d’un parti politique, d’un candidat ou d’un électeur dans le cadre du processus électoral (article 16 de la loi 7/96 portant dispositions à toutes les élections politiques en République gabonaise)», a martelé M. Gondjout.
Déterminés tout de même à faire constater l’irrégularité dans le dossier Ali Bongo, les commissaires de l’opposition ont souhaité faire recours aux archives de la Cenap pour confronter les pièces des candidats ayant déjà participé à une élection antérieurement. Que nenni, René Aboghé Ella n’a pas voulu faire appel aux archives pour régler ce genre de cas, a dit M. Gondjout.
À l’examen de ce dossier de 2016, il apparaît «qu’entre 2009 et 2016, M. Ali Bongo Ondimba a présenté deux actes de naissance différents. Ils sont signés à la même date (29 mai 2009), du même maire, celui du 3e arrondissement, Akassaga Serge William Okinda (qui n’est d’ailleurs plus en fonction). Seulement, en 2009, son père s’appelle Albert Bernard Bongo, en 2016, le père s’appelle El Hadj Omar Bongo Ondimba. Le numéro de l’acte de naissance est lui aussi différent. En 2009, l’acte porte le numéro 65/R2/A3 et en 2016, c’est le numéro 58/R2/A³NNM. Voyez à quel point nous en sommes réduits. Malgré le fait que le service central de l’état civil de Nantes ait sorti un acte de naissance d’Ali Bongo Ondimba, lequel acte de naissance n’a pas les mêmes mentions que celui déposé par Ali Bongo Ondimba pour l’élection de 2016 », le sociétaire de l’UN.
Malgré ces éléments ajoutés à la requête d’inéligibilité d’Ali Bongo Ondimba, le patron de la Cenap est resté impassible, rapporte Paul Marie Gondjout, se demandant quel plaisir masochiste M. Aboghé Ella a-t-il de se coucher sur la loi et la violer impunément ? «C’est la preuve du peu de considération qu’il a pour les lois de la République quand elles ne le servent pas», a-t-il dit. «C’est la preuve qu’il a du mépris pour les Gabonais. Je suis d’autant plus outré que se sont les gabonais qui lui donnent l’occasion de le faire, par leur couardise, leur appétit d’argent et de pouvoir», a-t-il déploré.
Pour lui, Réné Aboghé Ella a fait tomber le masque. Il est sorti de sa neutralité pour soutenir la candidature d’Ali Bongo Ondimba. Car, rappelle Paul Marie Gondjout, il a fallu plus de 30 minutes de débat pour le président de la Cenap accepte de laisser à l’examen des commissaires toutes les pièces des dix neuf dossiers de candidatures et a refusé de porter à l’examen des commissaires les arguments en contestation de la candidature d’Ali Bongo Ondimba, se bornant à faire lire trois lettres de contestation et la réponse des avocats d’Ali Bongo
Si on pouvait sentir la tension monter, Paul Marie Gondjout n’a pas masqué ses émotions, traduites par un pessimisme quand à la tenue d’une élection transparente. Il a estimé qu’aucune élection ne permettra l’alternance, en l’état actuel des choses. «Ma recommandation est de laisser Ali Bongo Ondimba faire son élection avec ses institutions, et le peuple gabonais qui est le seul détenteur de la souveraineté nationale devra faire son élection à sa manière, comme tout peuple sait le faire quand il veut se libérer des chaines qui l’emprisonnent», a-t-il conclu.
En réaction au rapport des commissaires, l’Union sacrée pour la patrie, coalition de l’opposition a donné une déclaration ce dimanche toujours au siège de l’Adere à l’Ancienne Sobraga.