Depuis son lancement, le 24 mai dernier, la nouvelle chaîne de télévision «tout info» du groupe public Gabon Télévision ouvre difficilement ses studios et plateaux à la société civile et à l’opposition. Une attitude plutôt surprenante pour une chaîne qui voulait «voir le Gabon autrement» et qui surmédiatise, encore plus que Gabon Télévision, les activités des hautes personnalités de l’État !
Lancée il y a quarante-cinq jours, Gabon 24 fait déjà l’objet de critiques de la part de nombreux téléspectateurs. Ils avaient cru y voir une chaîne différente de Gabon Télévision qui a toujours servi d’«outil électoral» pour le gouvernement et le parti au pouvoir. Ses journaux de 20 heures et de 23 heures, ainsi que son journal dédié aux provinces, diffusé à 19 heures, servent de relais aux entités sus citées. Même si on y a dernièrement aperçu Casimir Oyé Mba au sortir de la visite des candidats déclarés de l’opposition à la Commission électorale nationale autonome et permanente (Cenap), le fait, qui avait de quoi étonner, est rarissime, les invités des principales éditions de cette chaîne n’étant essentiellement que du camp présidentiel. «Lorsque des figures de l’opposition ou de la société civile apparaissent sur cette chaîne, c’est souvent pour en donner des informations non valorisantes», fait remarquer un universitaire.
Beaucoup d’observateurs avaient cru, lors du lancement de Gabon 24, que les choses changeraient. Mais, après les 45 premiers jours, ils en sont arrivés à affirmer que «c’est le tabac de la même pipe». «Gabon 24, qui s’est installée dans les locaux qu’occupait la RTG2, au sein même de la présidence de la République, et qui a recruté certains de ses responsables et la plupart de ses dix journalistes à Kanal 7 et à TéléAfrica, est clairement perçue aujourd’hui comme la «chaîne des Émergents», affirme, pour le regretter un journaliste de Gabon Télévision pas toujours très proche des dirigeants de cette chaîne.
«Si vous avez aimé le 20-heures de Gabon Télévision, vous aimerez Gabon 24»
Le défi que s’était elle-même fixée cette chaîne de faire «voir le Gabon autrement» n’est donc pas tenu, aux yeux de certains observateurs. «Gabon 24 fait trop la part belle aux tenants du pouvoir», s’insurge un internaute, ajoutant : «si vous avez aimé le 20 heures de Gabon Télévision, vous aimerez Gabon 24». Des internautes n’en veulent pour preuve que «les interviews de certaines personnalités passant en boucle toute une journée, et qui reviennent deux jours plus tard pour passer de nouveau en boucle toute une journée». C’est le cas des entretiens réalisés avec le président de l’Assemblée nationale, Richard Auguste Onouviet, ou encore du ministre de la Communication, Alain-Claude Bilie-By-Nzé, qui reviennent très souvent sur le petit écran !
La bande déroulante de la chaîne est, elle aussi, encore plus sélective. «S’ils parlent de Jean Ping, c’est pour dire que son adhésion au Parti gabonais du progrès «suscite des réactions d’étonnement sur le net. Ce qui est une information dévalorisante», affirme un internaute qui soutient que «Gabon 24 ne parle pas du meeting de Jean Ping à Port-Gentil ou de celui de Guy Nzouba Ndama à Kango ; comme vous le voyez, Gabon 24 c’est Gabon Télévision-bis sur le plan du traitement de l’information politique et sociale du Gabon, et c’est bien dommage, car on voit que les Emergents confisquent tous les médias d’Etat».
Peut-être faudra-t-il que Gabon 24 sorte rapidement de cette image qu’on commence à lui coller dans l’opinion, celle d’une chaîne exclusivement dédiée aux activités du chef de l’Etat et de son gouvernement ! Il faudrait commencer par montrer la diversité politique et sociale du Gabon…