Le président de l’Union du peuple gabonais (UPG) a adressé au président de la République une lettre à travers laquelle il dénonce le fonctionnement de la justice et revient sur les blocages dans la mise en place de la Haute Cour de justice.
Peu avant la tenue du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) du 27 juin courant, le président de l’Union du peuple gabonais (UPG) a adressé une correspondance au président de la République, invité à «remettre la bonne gouvernance judiciaire au centre des préoccupations de la République». Pour le leader de l’UPG, cette bonne gouvernance judiciaire passe d’abord par un bon usage du pouvoir de nomination. «Plutôt que de promouvoir aux emplois judiciaires et administratifs en fonction des grades et de leurs juridictions de rattachement, la pratique nous donne à constater, qu’il a été érigé un système qui vous conseille, qu’il vous suffit de contenter la hiérarchie et de nommer à certaines fonctions pour vous assurer du contrôle de l’appareil judiciaire», a-t-il dénoncé.
Au passage, Jean de Dieu Moukagni-Iwangou est revenu sur la fronde des magistrats, début juin. A ses yeux, elle doit être un indicateur de «la profondeur des solutions à envisager à l’égard d’un corps tenu à l’obligation de réserve, qui appelle ouvertement désormais à l’indépendance fonctionnelle et organique du pouvoir judiciaire vis-à-vis du pouvoir exécutif».
Dès lors, il estime qu’il faut «garantir la totalité de l’offre de justice à la totalité de la demande de justice», déplorant que le CSM n’ait jamais procédé à la nomination des juges devant siéger à la Haute cour de justice. «Pour parvenir à ce constat, dont la carence est sanctionnée aux peines de droit, je n’ai fait l’économie d’aucune précaution», a-t-il prévenu.
Le président de l’UPG a aussi révélé avoir adressé une correspondance au dépositaire de toutes les nominations. Sans suite. «Le silence réservé à mon courrier, par un magistrat dont on ne peut surprendre la diligence, lève le voile sur une situation d’une particulière gravité, qui vous incombe, et qu’il importe de faire cesser, à partir du bon usage de votre pouvoir de nomination», a-t-il soutenu, avant de poursuivre : «Dans la position éminente que vous offre la présidence du Conseil supérieur de la magistrature, vous saurez faire comprendre à tous les membres, l’urgence qu’il y a, à ne pas priver plus longtemps, le droit d’accéder au juge naturel à ceux des justiciables qui entendent y recourir».
Jean de Dieu Moukagni-Iwangou conseille donc au président de la République d’attirer l’attention du CSM sur le fait que la loi n°49/2010 du 25 septembre 2011, déterminant la composition et le fonctionnement de la Haute Cour de justice, n’offre aucune disposition supplétive, permettant, à titre transitoire, de recourir à un juge d’appui pour connaitre du contentieux relevant des missions de cette juridiction. De son point de vue, tout ceci conduit irrémédiablement vers «une impasse intolérable, qui couvre du sceau de l’impunité, tous les membres du régime au pouvoir, en commençant par (le président de la République, qui est le principal justiciable de cette juridiction)». «Le Conseil supérieur de la magistrature, dont vous assurez la présidence, ne peut plus porter une telle forfaiture dans un Etat qui proclame l’égalité de tous les citoyens devant la loi», a conclu Jean de Dieu Moukagni-Iwangou.