Dans une œuvre de 213 pages, l’avocate du président gabonais, Claude Dumont Beghi, retrace aussi bien les relations du Gabon avec son ancienne puissance colonisatrice, la France, que son parcours en tant qu’avocate dans ce pays depuis l’époque tumultueuse d’Air Gabon à celle beaucoup plus tendre d’aujourd’hui au cours de laquelle elle s’occupe de la défense d’Ali Bongo Ondimba en même temps que la Fondation de la première dame sollicite ses services.
Claude Dumont Beghi vient d’entrée confirmer ce qi s’est toujours dit dans les cercles des érudits ou des connaisseurs de l’histoire de cette République d’Afrique centrale, le Gabon, faisant dans un passé encore récent partie de ce que l’on qualifiait de pré carré de la France, ce groupe d’Etats qui comptaient pour l’Hexagone aussi bien pour les richesses de leur sol et sous- sol, que pour servir de bases- arrières aux expéditions punitives de Paris contre certains « potentats » africains qui avaient pour certains le malheur d’être trop libéraux quoique la Déclaration universelle des Droits de l’Homme, leur reconnaisse des droits fondamentaux dont le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion, et pour d’autres celui d’être très populaires et porteurs de projets anticoloniaux.
Sait- on dans quelles conditions sont morts les Um Nyobé, Sylvanius Olympio, Medhi Ben Barka, pour ne citer que ces quelques noms oh combien révélateurs ? Que dire de l’action des grandes puissances que ne représentent pas que des pays, mais aussi des grandes firmes internationales à l’instar d’Elf absorbée par Total et du contrat qui les liait aux dirigeants africains postiches placés à la tête des Etats nouvellement indépendants et balbutiants par la Métropole ?
Claude Dumont Beghi qui ne cache pas sa prétention connait un peu du Gabon, normal, elle y vit depuis un certain temps déjà. Est-ce la raison qui la pousse à écrire ceci : « Que savez- vous du Gabon, de sa culture, de sa mutation, de son projet pour les générations à venir ? Des réponses méritent d’êtres données en dehors de toute caricature, polémique ou arrière- pensée ».
Est ici dévoilée la posture que l’avocate entend prendre tout au long de ses écrits, certes bourrés de renseignements complets comme incomplets, en l’absence de ceux venant de certains témoins de l’histoire qui ont préféré soit se murer dans un silence que nous qualifions de coupable, soit ne s’occuper que de politique politicienne, distrayant leurs compatriotes tétanisés dans un certain cas, démotivés dans un autre ou encore et toute simplement amnésiques et insouciants quant à leur avenir comme les décrivait en substance feu Philippe Mory.
Mais si, elle l’a connu, pour ne pas dire le connaît ce Gabon des Bongo depuis les années 80 avec tout au début les péripéties de ce qu’il convient d’appeler l’affaire Air Gabon. Elle qui dit pourtant partager un engagement et un amour sans faille pour le Gabon a appris à ses dépens qu’ici la confiance n’est parfois qu’un vain mot puisqu’elle fut répudiée sans motif, on appelle cela un licenciement abusif, elle la professionnelle du droit sait mieux que quiconque qu’est- ce que cela veut dire. Elle qui fait allusion un instant dans son livre à Thomas Hobbes et son Leviathan, ignorait qu’ici comme sous d’autres cieux hélas, la loi du plus fort pouvait être la meilleure ! Bienheureusement pour elle que la connaissance des outils professionnels et l’usage à des procédés orthodoxes est souvent venu la rétablir dans ses droits bafoués.
Il est intéressant de reconnaître avec elle que malgré la mobilisation de personnalités comme la première dame, les poches de pauvreté sont grandissantes et les politiques pour y mettre fin souvent vaines ou carrément lâches. C’est ce que nous laisse interpréter ce passage page 37 « Cette description n’est ni un leurre ni une publicité. Aucune volonté de masquer les réalités du pays ni d’oublier les poches de pauvreté qui perdurent. L’engagement de la Première dame est total. L’amour que les Gabonais et Gabonaises lui portent l’est tout autant ». Honnêteté oblige, il faut reconnaitre qu’à l’actif de Sylvia Bongo Ondimba, même si on ne le dit jamais assez, il y a la célébration tous les 23 juin depuis 2011 de la journée internationale des veuves, la lutte contre le cancer féminin qui donne chaque année droit à l’organisation d’évènements de collecte de fonds pour venir en aide aux malades. Comme il est tout aussi vrai de reconnaitre que la Première dame du Gabon œuvre également pour l’éducation de qualité, l’inauguration en mai 2014 de l’école « Ruban Vert » en est un exemple patent. La décennie de la femme proclamée par Ali Bongo Ondimba ne serait –elle pas une de ses inspirations ?
C’est bien de justifier que la franc- maçonnerie est une institution, qui se donne pour objet la recherche de la vérité, l’étude de la morale et la pratique de la solidarité, c’est également bien d’avancer qu’elle dit travailler à l’amélioration matérielle et morale, au perfectionnement intellectuel et social de l’humanité, mais Claude Dumont Beghi qui reprend Jung qui soutient que le rationalisme et la superstition sont complémentaires, et que plus on devient consciemment rationaliste, plus le monde inconscient s’anime, non sans évoquer le syncrétisme marquant notre nôtre société, se soucie-t-elle un instant de la manière dont cette franc- maçonnerie est vécue sous les tropiques en général, au Gabon en particulier ou veut- elle affirmer, on la comprend aisément, que tout est bien dans le meilleur des mondes et nous rappeler Panglos ? Comme toute société africaine pour ne pas dire toute société tout court, le Gabon a ses spécificités qui sont celles de ses peuples et de leurs particularismes, ce sont par exemple le fait d’être de tradition orale ou la culture se transmet de génération en génération, gardée qu’elle est par des détenteurs du savoir « universel » en ce sens qu’ils sont chargés de le relayer aux générations contemporaines et montantes.
Oui, le Gabon existe en tant que société organisée depuis la nuit des temps avec, lui aussi, sa justice sous forme de palabres et ses conceptions « philosophiques », nous allions y inclure les manières d’être de ses populations, leurs manières de concevoir la vie et la mort, l’univers visible et invisible, leur sagesse pour emprunter aux Senèque et autres Socrate. Bien entendu, au contact des autres civilisations et avec le phénomène de mondialisation auquel aucun peuple de la terre n’échappe, le Gabon est bien pris dans un égrenage qui l’oblige à épouser comme qui dirait l’ère du temps. Histoire de dire qu’il est comme bien d’autres pays victime dune perte d’identité au sens où celle- ci représente ce que l’on de strictement différent de l’autre ou d’autrui.
Le livre de Claude Dumont Beghi nous édifie sur le caractère des personnalités qui animent le landerneau politique gabonais. Il peint les contre- vérités volontairement entretenues ou entretenues par ignorance comme cela est le cas pour la question de l’acte de naissance, de la filiation du chef de l’Etat ou encore de sa nationalité qui sont toutes trois liées. Sur ces points préjudiciels, personne n’arrive jusqu’ici effectivement à apporter la lumière pour que s’effacent les ténèbres, si ténèbres il ya. L’on apprend également qu’Ali Bongo Ondimba et sa sœur aînée Pascaline M’ferri Bongo Ondimba sont les deux à avoir depuis 1987 été désignés par feu leur père comme gérants de la succession.
Mais, certaines interrogations demeurent quant à la procédure de partage du patrimoine familial par Ali Bongo Ondimba et la concrétisation de l’érection d’une université et d’un conservatoire de musique donnés pour déjà existants par l’avocate. Quant à l’affaire des « biens mal acquis », elle ne devait pas faire grand bruit si les populations percevaient quelque chose des retombées des embellies économiques connues par leur pays, elle est retournée dans tous les sens non seulement par les ONG, mais aussi par les populations les plus averties parce qu’elle constatent le contraste frappant et scandaleux entre ceux qui possèdent et les démunis qui n’est pas propice au développement du pays, eu égard au fait que pour constituer par exemple un marché, il faut que les populations disposent d’un pouvoir d’achat, que le pays produise et que les conditions d’accès aux produits industriels et manufacturés soient assouplies.
Ce qui est loin d’être le cas pour ce pays d’Afrique équatoriale où l’une des principales caractéristiques est même l’inexistence au sens propre d’une classe moyenne, celle qui, chez les autres propulse le développement. Il faut en plus signaler que les complaisances occidentales méritent ici d’être interrogées avant que se lancer dans des opérations de saisie de biens ou d’interpellations. L’opacité qui entoure les transactions entre dirigeants occidentaux tous bords confondus et africains n’est pas propice aux enquêtes fiables dans ce domaine, tout comme elle prédispose à des informations parcellaires et parfois mensongères. Est- ce les équipes actuelles, elles- mêmes fruit de cette époque, qui sont les mieux placés à mettre fin à se pratiques sordides ou à en parler avec le maximum d’aisance et de clarté ?
Là où l’avocate du chef d’Etat gabonais nous donne la preuve de son habileté, c’est quand elle manie le droit avec dextérité, avec professionnalisme allions-nous dire, mais aussi quand elle fait preuve d’honnêteté en osant pas trop s’avancer sur des questions comme celle des atteintes graves à l’humanité ou du rôle de la justice, car ce qui se passe au Gabon ces temps derniers prouvent à suffisance qu’elle reste ou est forcée des rester partisane et qu’à ce titre, elle aura du mal à être rendu au nom du peuple ! Courage à elle d’avoir, c’est normal en tant qu’avocate d’Ali Bongo Ondimba, recadré les choses dans l’affaire dite Onaida Maisha, en présentant sous son vrai jour cette dernière et les Myboto dont elle est issue et montrant à la face du monde que la cupidité peut conduire à des errements déplorables et fâcheux.
De quoi interpeller tout un chacun dans un monde où de nombreux citoyens ont encore tendance à agir comme des moutons de Panurge. La sœur cadette d’Ali Bongo Ondimba manque cruellement de preuves pour arriver à assigner ce dernier devant la justice et a intérêt à se plier aux principes de la famille africaine qui veulent qu’un aîné soit respecté et non vilipendé. De toute façon, il lui a été depuis demandé d’apporter la preuve de ses allégations « mensongères et calomnieuses ».
Le même grief est fait aux principaux dirigeants de l’opposition, Jean Ping et Nzouba Ndama à qui l’on reproche après avoir contribué sérieusement au pillage du Gabon, de vouloir, plutôt que de s’excuser, jouer les donneurs de leçon ou les sauveurs de populations qu’ils ont contribué à précariser. Il leur faut un sérieux tour de manivelle, semble se dire Claude Dumont Beghi, pour réaliser leur dessein de bouter hors du palais présidentiel Ali Bongo Ondimba que de plus en plus d’associations et partis politiques, même de l’opposition, curieux, adoubent. Surtout quand on lit l’atmosphère qui s’empare de l’opposition qui gagnerait, l’histoire nous l’apprend, à être solidaires. Ni la France, accusée à tort ou à raison de placer les dirigeants gabonais, ni l’opposition ne gagneraient à adopter des comportements injurieux et calomnieux vis- à- vis du chef d’Etat gabonais dont le défi est qu’il soit battu à la régulière par les urnes. Avis à …