Tout homme politique qui se respecte n’ignore pas que dans toute démocratie digne de ce nom, les médias ont un rôle de veille qu’il ne faut pas reléguer au dernier rang, si l’on tient évidemment à se faire une idée de ce que le troisième acteur en système démocratique, l’opinion publique, se fait de lui. Le constat ici est que parce qu’ils sont muselés, qu’ils ont obligation d’obéir à la main qui donne sous le couvert d’une prétendue ligne éditoriale ou parce qu’ils sont simplement aux ordres du fait de leur position, les médias ne sont perçus que comme de vulgaires caisses de résonance, ce qui constitue une véritable entrave au processus de développement.
S’il est une constante, c’est d’observer le traitement réservé aux hommes des médias par les hommes politiques, surtout en périodes électorales. Ce qu’il est à déplorer, c’est la manipulation qu’ils en font au point d’oublier que les professionnels que sont les journalistes sont régis par des règles éthiques et déontologiques qui fondent l’exercice de leur métier. Leur travail consistant à collecter, traiter puis diffuser l’information devrait être vécu comme un sacerdoce en dépit de la coloration du média pour lequel ils travaillent.
Les nouvelles qu’ils mettent sur leurs colonnes, projettent sur les écrans ou diffusent sur les antennes, puisqu’au préalable vérifiées, devraient pousser tous ceux qui s’affrontent dans l’arène politique, à ne pas en faire fi, puisqu’elles reflètent parfois une réalité qui, si elle n’est pas prise en compte, pourrait menacer le cher équilibre socio-politique, tant recherché sous d’autres cieux. Point n’est besoin pour le camp au pouvoir, devant certaines dénonciations, de se croiser les bras ou de se taire comme pour minimiser la situation ou encore répliquer quand elle demande de trouver une solution ou se présente comme quelque chose de criard ; et pour l’opposition d’enfoncer volontairement le clou ou de retourner le couteau dans la plaie.
La presse devrait être assimilée à l’intellectuel soumis à la rupture épistémologique qui veut qu’il ne corrobore pas des thèses nuisibles dans le but de mettre le feu aux poudres, pas plus qu’il ne doit faire prévaloir son ego pour légitimer des positions condamnables. Certes, la confrontation pousse l’autre camp, devant la « confiscation » par le pouvoir des médias d’Etat, à évoluer dans une logique d’affrontement, ponctuée de réponses du tac-au-tac, mais, cela ne devrait pas faire que la presse soit utilisée à des fins autres que celles consistant à informer, éduquer et distraire. Informer le public sur la réalité, sur ce qui constitue une menace pour la nation, sur les travers du régime en place pour le pousser à opter pour la raison si cela lui dit, en évitant de multiplier, ce qui est regrettable et ne grandit ses professionnels, des actes de désinformation, de calomnie, de haine dont on connait quelles ont été les conséquences sous d’autres cieux.
Quand médias riment avec vitrine de la société !
C’est dire combien les médias qu’ils soient du pouvoir ou de l’opposition sont plus que jamais attendus sur le terrain de la responsabilité, le seul qui vaille non seulement pour sauver la grande famille de la presse dont l’image est aujourd’hui bien édulcorée, mais aussi de sauver tout un pays d’une situation catastrophique, sachant que les réparations ne se feront jamais au même rythme que les destructions. Cela impose à ceux qui ont en mains les instruments de répression de l’Etat à ne pas se comporter comme de vulgaires va-t-en guerre, prêts à semer le trouble pour justifier une posture quelconque. La période que nous traversons qui est marquée comme jamais avant par le refus des opposants de prendre part au dialogue auquel vient de les convier Ali Bongo Ondimba, refus bien repris par les médias, chacun selon la logique qui lui est propre, devrait plutôt que d’amener les forces vives à développer des allures bellicistes, les conduire à une profonde réflexion sur ce que gagnerait le Gabon d’une « descente aux enfers ».
C’est aussi cela faire preuve de patriotisme, tout comme s’interdire de voler, violer ou tuer, même si cela est par moments fait impunément. Que l’on fasse prévaloir les valeurs démocratiques, laissant le peuple opérer son choix en août 2016 et laisse les médias jouer leur rôle pleinement pour que notre pays mérite respect sur la scène internationale et donne encore envie d’être une terre d’existence et à visiter. Les hommes politiques qui se servent donc des médias pour communiquer ou faire passer leurs communications se doivent d’intégrer les principes cardinaux susmentionnés pour éviter au peuple les affres d’une violence inouïe qu’il n’aurait pas lui provoquée, mais dont il sera appelé à faire les frais comme partout ailleurs où les hommes n’ont été mus que par la volonté de puissance incarnée dans leur rapport au pouvoir. Ainsi, vivra-t-on cette démocratie que l’on appelle tant de tous ses vœux !