Candidat de la Convention nationale de l’interposition, Dieudonné Minlama Mintogo a accordé à l’hebdomadaire La Loupe une interview dans laquelle il insiste que le dialogue est le préalable fondamental à l’organisation des prochaines élections et au maintien de la stabilité du pays. Lecture.
La Loupe : Selon vous, toutes les conditions sont elle réunies pour aller à la Présidentielle de 2016 ?
Dieudonnée Minlama Mintogo : La situation socio-politique du pays ne cesse de s’empirer depuis les dernières élections présidentielles anticipées de 2009. Notre « vivre en semble » est aussi sérieusement mis à mal.
Comme vous le constatez, notre démocratie a considérablement reculé. Les tensions entre les acteurs politiques (tous bords confondus) sont vives, le climat de suspicion est général. La haine, l’invective, les règlements de comptes, la calomnie, la xénophobie, la violence, la frustration, l’exclusion, la confusion, le mensonge …sont désormais érigés en valeur d’animation et de gestion de notre démocratie.
La crise de confiance entre les acteurs politiques, les membres de la société civile, une grande partie du peuple et les institutions chargées de l’organisation et de la gestion des élections est réelle. Plusieurs Gabonais ne disposent pas de pièces d’état civil et sont de facto exclus des opérations électorales et privés de l’un de leurs droits fondamentaux. La biométrie est restée à l’état embryonnaire : elle comporte toujours les failles et les lacunes que nous avons identifiées au terme des élections locales de 2013.
En gros le tableau est sombre et la situation explosive. Maintenant si, malgré cette situation, nous nous obstinons à organiser ces élections, je crois que nous prendrions là un grand risque aux conséquences regrettables et incalculables devant la nation, devant le monde et devant Dieu.
Que faut il faire pour amener la sérénité dans la Nation ?
La solution est simple : le dialogue inclusif. Ce dialogue doit nous permettre de :
solder la face sombre de l’héritage Bongo qui fait tant peur à beaucoup de nos compatriotes en mettant en place une commission « Vérité et Réconciliation » parce que le peuple a soif de savoir et réconciliation ;
Mettre en place de façon consensuelle, tous les mécanismes nécessaires afin d’organiser les élections crédibles, renforcer la démocratie et l’état de droit ;
Examiner les revendications des organisations syndicales et trouver un consensus fort et durable sur la crise sociale qui secoue le Gabon depuis plusieurs années ;
Redéfinir les concepts et les principes qui nous permettront de consolider notre « vivre ensemble ».
Le dialogue inclusif est il encore possible ?
Oui. Déjà le mardi 15 mars 2016, nous avons rencontré une délégation de l’Organisation Internationale de la Francophonie. Nous avons discuté avec elle sur le dialogue et les élections de cette année. Je crois que la Francophonie croit, tout comme nous, que le dialogue est la seule, solution à la crise actuelle. A cette position de la Francophonie, il faut ajouter celles de l’UNOCA, de la France, de l’Union Européenne …
En un mot la Communauté Internationale, dans son ensemble et dans sa diversité, encourage ce dialogue. De toute façon aucune autre alternative crédible et responsable n’existe. Ce dialogue s’impose à nous. Nous avons le choix entre le dialogue et le chaos.
Toutefois, je sais que parmi nous, il y a des acteurs politiques qui sont prêts à mettre ce pays à feu et à sang, à organiser l’épuration ethnique, à exacerber les haines et les rancœurs, à diviser les Gabonais, juste pour accéder ou pour s’accrocher au pouvoir, retrouver ou conserver leurs privilèges. Pour cette catégorie de nos compatriotes, le dialogue parait comme une perte de temps, une distraction, un frein à l’atteinte de leurs sordides ambitions … mais pour nous, pour moi je persiste et signe, le dialogue est le préalable fondamental à l’organisation des prochaines élections et au maintien de la stabilité du pays.
Cela veut-il dire que vous pourrez militer pour le boycott de cette élection, en cas de non organisation du dialogue ?
Non, non et non ! J’exclu toute option de boycott de cette élection. Mais il est de mon devoir de présenter la réalité de la situation et de promouvoir la solution idéale qui nous permettra de ne pas plonger notre pays dans l’instabilité et l’incertitude.
Dans tous les cas l’histoire jugera chacun de nous en fonction de ses positions et de ses actes. Le peuple nous regarde. L’humanité aussi est témoin. Le Gabon n’est pas à détruire. Nous n’avons qu’un seul exemplaire de notre pays. Il n’en existe pas de duplicata et nous n’avons pas de patrie de rechange ailleurs.