Le Premier ministre, Daniel Ona Ondo, conformément aux dispositions de l’article 28a de la Constitution gabonaise, a fait ce lundi 10 mars 2013 à l’Assemblée nationale, sa déclaration de politique générale. Celle-ci touche tous les domaines d’existence des Gabonais, avec un accent prononcé pour la recherche des solutions contre la pauvreté qui touche au moins 30% de la population.
Nommé le vendredi 24 janvier 2014, le Premier ministre avait un délai constitutionnel de 45 jours pour présenter sa politique générale, pour ne pas dire la feuille de route que le gouvernement entend dérouler pour pouvoir mener à bon port les projets annoncés dans «l’Avenir en confiance», projet de société sur la base duquel le président Ali Bongo Ondimba a été élu, avant que le Plan stratégique Gabon émergent (PSGE) ne les définisse globalement pour conduire définitivement le Gabon vers l’émergence d’ici à 2025.
Pour fixer son propos qui duré plus d’une heure et quart, le Premier ministre a d’emblée déclaré sa disponibilité, mais surtout sa volonté de bien conduire le bateau dans lequel il se retrouve capitaine. «Face aux enjeux économiques, sociaux et politiques de 2016 et 2025 et aux formidables défis à relever pour y faire face avec succès, je tiens à rassurer sur la volonté sans faille, la détermination, la fermeté, le courage, l’abnégation et l’enthousiasme dont je compte faire montre dans la façon de conduire l’action du Gouvernement».
Ceci posé, le Pr Daniel Ona Ondo a articulé son propos autour du social, de l’économie, de la politique, du développement des sports, du logement et particulièrement de la lutte contre la pauvreté et la précarité devenue le cheval de bataille du gouvernement. «Nous avons ainsi l’obligation, de parvenir, sinon à éradiquer les fléaux de la pauvreté et de l’exclusion sociale, du moins à en diminuer de manière drastique les effets délétères. Nous devons parvenir à améliorer significativement le niveau et la qualité de vie des Gabonaises et des Gabonais», a-t-il déclaré.
Bilan et état des lieux
«Comme vous le savez, nous nous sommes engagés depuis 2009, à donner corps à la vision du Président de la République de faire du Gabon un pays émergent à l’horizon 2025, à travers son Projet de Société, «l’Avenir en confiance» qui s’articule autour de neuf axes, au rang desquels la lutte contre les inégalités, la pauvreté et l’exclusion», a rappelé le Premier ministre qui a également indiqué que «L’atteinte de ces objectifs requiert à la fois, la consolidation des quatre fondations de l’émergence que sont: « le développement durable, les infrastructures, la gouvernance et le capital humain », le développement des trois piliers, à savoir: « le Gabon industriel, le Gabon vert et le Gabon des services » et l’aboutissement de la prospérité partagée».
Ona Ondo a également précisé que de «nombreux chantiers ont été engagés depuis plus de quatre ans». Et cela a entrainé des réussites puisqu’il note que «certains succès sont déjà enregistrés». «C’est ainsi que des infrastructures supplémentaires dans tous les secteurs sont visibles dans le pays. Une nette amélioration de l’environnement des affaires est également constatée si bien que le Gabon a gagné onze (11) places, dans le classement mondial Doing Business 2014 de la Banque mondiale. Il constitue ainsi l’une des cinq économies africaines les plus performantes, à travers les réformes mises sur pied pour assurer le développement de son secteur privé», a expliqué le Chef du gouvernement qui fait remarquer que «le reflet de l’ensemble de ces efforts est que le Gabon présente une croissance économique de 6% en moyenne entre 2010 et 2013, tirée essentiellement par le dynamisme du secteur hors pétrole dont la croissance a atteint 8,1% en moyenne sur la période».
Ces éléments mis ensemble ont permis au Premier ministre de déclarer que «l’objectif de la croissance à deux chiffres est à notre portée». Il a cependant noté que ces indicateurs n’ont pas permis de faire en sorte que les indicateurs sociaux s’améliorent. 30% de Gabonais vivant en effet avec moins de 80.000 francs CFA par mois, c’est-à-dire en dessous du seuil de pauvreté. La question du chômage a été naturellement abordée en ce sens que le Pr Daniel Ona Ondo a expliqué que depuis 2005, ce phénomène a pris de l’ampleur à tel point que sont taux, en 2010, s’élevait à 20%. «Mais en réalité, il est de l’ordre de 28% si l’on considère toutes les personnes qui ne sont pas, de manière active, à la recherche d’un emploi. Ce chômage reste le reflet de l’inadéquation entre la formation et le marché de l’emploi et interpelle tout particulièrement les autorités publiques. Les femmes et les jeunes en sont les principales victimes. D’autres domaines sociaux présentent encore des carences qui ne peuvent laisser indifférent le Gouvernement que j’ai l’honneur de diriger», a-t-il expliqué.
«Il est patent que beaucoup reste à faire», a-t-il reconnu pour ajouter que «certes, il est vrai que nous avons à conduire des réformes et à provoquer des changements qui nécessitent souvent du temps et de la persévérance avant que d’engranger les récoltes attendues, eu égard à leurs dimensions structurelle, comportementale, sociétale».
Contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale
Si le premier ministre a commencé par faire un round-up de ce qu’a été les quatre premières années de l’exécutif au Gabon notamment en termes de performance, il précise par ailleurs que son gouvernement se fixe deux objectifs pour concrétiser le projet de société du Président de la République. Il s’agit d’un «objectif général qui consiste à accélérer la mise en œuvre du Plan Stratégique Gabon Emergent et un objectif spécifique, celui de déployer une stratégie pour gagner la guerre, d’une part contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale, d’autre part contre les inégalités».
La bataille sera donc engagée sur deux fronts selon le chef du gouvernement. «Le premier concerne la consolidation et le renforcement des acquis, aux plans de la paix et du développement. Le second a pour objet la mise en œuvre de notre nouveau Pacte social visant à concrétiser l’ambition de partage des fruits de la croissance». Tout cela passera par un environnement apaisé, sécurisé, protecteur et que le gouvernement compte garantir dans le but de permettre la poursuite du développement du Gabon.
Pour y parvenir la sécurisation des frontières doit être une priorité. «Compte tenu des situations dangereuses qui sévissent à nos portes et des menaces potentielles qu’elles portent en germe pour l’équilibre régional, il est indispensable que notre diplomatie d’une part, nos forces de défense, d’autre part soient à même de nous préserver», a-t-dit le Pr Daniel Ona Ondo qui souligne que «Nous devons, notamment, garantir la sécurité à nos frontières et de notre territoire pour éviter que ne se reproduisent les évènements récents que nous avons connus : drames liés à l’immigration clandestine ou actes de piraterie dans nos eaux territoriales. La lutte contre ces derniers est nécessaire pour un pays comme le Gabon qui possède un peu plus de 800 kms de côtes et qui ambitionne de se tourner vers la mer pour assurer son développement, que ce soit à travers la pêche et la transformation des produits de la mer, le transport, l’exploitation pétrolière off–shore, le tourisme et la protection de biodiversité des écosystèmes marins».
De la liberté et de la justice
Dans sa déclaration Daniel Ona Ondo a accordé une place de choix à la liberté, au droit et la justice. Pour ce qui est de ces questions, il a annoncé que le gouvernement élaborera un plan stratégique sur les droits humains au Gabon, conformément aux recommandations des Nations-Unies et de l’Union Africaine. Par ailleurs, a-t-il dit, un module sur les droits humains sera introduit dans les programmes de formation de l’Ecole Nationale d’Administration, de l’Ecole Nationale de Magistrature et de l’Ecole de Préparation aux Carrières Administratives, ainsi que dans les cycles primaire et secondaire. Des campagnes seront en outre organisées pour sensibiliser les citoyens à cette question.
Un clin d’œil a même été adressé aux médias. «Parmi les libertés publiques, je voudrais tout particulièrement insister sur la liberté d’opinion et d’information. Elle concerne au premier chef les médias qui jouent le rôle que l’on sait, dans nos sociétés où l’opinion publique tient une si grande place. Notre cadre juridique et institutionnel protège les médias et permet de remplir leur mission. Mais j’en appelle, ici encore à la responsabilité de chacun : l’éthique, le professionnalisme, la pédagogie, doivent être des valeurs cardinales de tous ceux qui choisissent d’informer, pour ne pas mésinformer ou désinformer», a relevé le chef du gouvernement.
L’on note également ce propos qui relève l’extension de l’offre juridictionnelle à travers notamment, la modernisation des infrastructures et des équipements, la création d’un tribunal correctionnel pour mineurs, accompagné d’un dispositif de réinsertion des petits délinquants mineurs.
Une vie politique pacifiée
«Le temps des batailles électorales est provisoirement terminé. Nous avons donc le temps devant nous pour travailler, agir, construire, bâtir. C’est ce qu’attendent les Gabonaises et les Gabonais», ce propos du Premier ministre vient en appui à ce qu’il dira en ce qui concerne la consolidation des acquis politiques dans le pays. Daniel Ona Ondo souhaite ainsi que la démocratie soit consolidée et le climat apaisé. Pour cela, il a déclaré que pour améliorer de façon substantielle la gouvernance politique, «le Président de la République a réactivé le Conseil National de la Démocratie et a engagé une démarche visant à faire appel, pour des sujets essentiels, à toutes les forces politiques représentatives et respectueuses des institutions de la République».
Cela implique donc un climat social détendu. Toute chose qui passera par la prévention des risques sociaux et le renforcement du dialogue social qui doivent être des priorités. Car, non seulement l’agitation sociale n’est jamais très éloignée de l’agitation politique et peut être une menace au bon déroulement de la vie économique, à la croissance et, au final, à l’efficacité des politiques sociales, mais aussi parce que des syndicats organisés, représentatifs et responsables sont indispensables à la défense des intérêts des travailleurs et à l’harmonie de la vie en société.
Sur ce point, Ona Ondo a appelé au sens des responsabilités des dirigeants syndicaux pour que soient évités la surenchère et les débordements. «Les grèves trop vite déclenchées ne profitent à personne, surtout lorsque elles ont pour effet collatéral de prendre des tiers en otages. Ces grèves ont un coût financier, économique, social et sociétal que nous ne pouvons pas nous permettre de supporter dans notre marche vers l’émergence et dans notre volonté d’éradiquer la pauvreté», a-t-il notifié.
Consolidation impérative des acquis économiques
Pour aborder ce point le Premier ministre a souligné que «le maintien d’une croissance économique soutenue est la condition sine qua non d’une prospérité à partager». Dès lors, il a affirmé que son gouvernement engagera ou accélèrera, avec la participation active des agences spécialisées, la mise en œuvre des mesures contribuant à améliorer l’environnement des affaires, aux plans juridique, administratif et fiscal, propice d’une part, à l’attractivité de notre pays pour les investisseurs étrangers, d’autre part au développement de PME-PMI, créatrices d’emplois.
Il poursuivra également le déploiement de la stratégie nationale de développement des infrastructures portant sur la route, le transport, les infrastructures de santé, le logement, l’énergie, l’eau, l’assainissement et l’information et les communications.
Par ailleurs, le gouvernement veut, entre autres, améliorer les modalités de financement de l’économie en facilitant l’accès au crédit pour les PME-PMI et les organismes relevant de l’économie sociale, en favorisant la mise en place du financement de l’accès à la propriété, en développant et renforçant les organismes de micro-financement, en développant les partenariats publics-privés, en accompagnant la création et la gestion des entreprises (pépinières, formation à la gestion…) et en promouvant l’innovation, en luttant contre le chômage par le renforcement des capacités des organismes dédiés, l’accompagnement à la recherche d’emploi, l’adaptation du système national de formation aux besoins de l’économie grâce au rapprochement avec les entreprises et une meilleure compréhension de leurs besoins, la mise en place de conditionnalités en matière d’emploi pour les entreprises étrangères bénéficiaires de commandes publiques.
Pour lui, tout cela mis en œuvre conduira l’économie gabonaise à un taux de croissance de près de 8% à la fin de cette année 2014.
Eveil et épanouissement de la jeunesse
Le Premier ministre Ona Ondo a pensé à la jeunesse en lui consacrant ce point qui stipule que «l’éveil et l’épanouissement de notre jeunesse implique la mise en place d’une politique sportive orientée vers la réalisation et l’équipement d’infrastructures multifonctionnels, le renforcement et la diversification du financement des activités sportives».
Il a par ailleurs noté que seront également engagées des actions visant à la valorisation du sport d’élite, à la détection et l’encadrement des talents, à la professionnalisation de toutes les disciplines sportives et à l’amélioration du statut des sportifs.
Les actions annoncées dans le cadre de la Politique Nationale de la Jeunesse du Gabon seront progressivement mises en œuvre. Il s’agira notamment de la restructuration du Conseil National de la Jeunesse et de la construction de son siège.