Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Femmes    Pratique    Gabon    Publicité
NEWS
Comment

Accueil
News
Société
Article




  Sondage



 Nous suivre

Nos réseaux sociaux



 Autres articles


Comment

Société

«Notre objectif est d’accompagner les médias dans leur développement», dixit Bilie-Bi-Nzé
Publié le mardi 8 decembre 2015   |  Gabon Review


Alain
© Gabon Review par DR
Alain Claude Bilie By Nze lors de conférence de presse, le 5 août 2015 à Libreville.


 Vos outils




 Vidéos

 Dans le dossier

Amorçant une série de visites de courtoisie au sein des rédactions privées à Libreville, le ministre de la Communication s’est rendu le 7 décembre courant, au siège de Gabonreview. Ses rapports avec les médias, le mythe du déshabillage du recteur, la subvention à la presse, l’annulation par la Cour constitutionnelle du projet de réforme de la justice, ont notamment été abordées à cette occasion.

Gabonreview : Six ans après l’accession d’Ali Bongo au pouvoir, dans quel état avez-vous trouvé la presse gabonaise ? Et dans quel état est-elle à l’heure actuelle ?

Alain-Claude Bilie-Bi-Nzé : En réalité, il y a un gros malentendu sur la question du rapport entre l’exécutif, le gouvernement et la presse. Ce malentendu nait du fait que la presse est le lieu par excellence de l’expression des libertés d’opinion, de penser et que les gouvernants, en général, par la volonté de réglementer des secteurs, apparaissent un peu comme les censeurs, les empêcheurs d’écrire ou de parler en rond. Et ce gros malentendu fait en sorte qu’il y ait une sorte de méfiance ou de défiance. L’option qui est la nôtre aujourd’hui est plutôt d’accompagner la presse dans son organisation ou dans son développement. Car un pays qui veut se développer doit se donner les moyens d’avoir une presse véritablement libre, une presse de qualité. Ça nous fait toujours mal au cœur lorsqu’on écoute les grands diffuseurs internationaux, à l’instar de Radio France international (RFI), faire une revue de presse africaine sans qu’aucun média gabonais ne soit cité. Nous avons l’impression d’être dans un Landerneau où nous avons l’impression, en définitive, que l’international, l’économie ou encore les grands enjeux de l’environnement n’existent pas.

Ce qui intéresse aujourd’hui dans la presse gabonaise, c’est un peu la politique politicienne. Et c’est ce qui fait qu’aujourd’hui l’état de la presse n’est pas si reluisant que cela. Certes il y a des titres, ce qui est déjà un mérite. Mais après il faut aider ces derniers à mieux se structurer, à mieux s’organiser, à mieux se développer. Et c’est tout le challenge qui est le nôtre aujourd’hui.

Quid de l’outil de production de certains organes phares comme L’Union ou encore Gabon Télévision ?

L’Union est le quotidien qui, depuis une plusieurs décennies, est marqué par une régularité dans sa parution et son développement. Hormis ce titre, qui s’est développé et modernisé, les autres sont un peu à la traine et il faut les aider à se structurer. Les outils publics sont en mauvais état ! Gabon Télévision aujourd’hui ne rencontre pas un public en dehors des principales sessions d’information. Ce média a du mal à trouver un espace qui corresponde aux attentes des populations en termes de divertissement et de programmes de télévision. Il en est de même pour la radio, quoique celle-ci propose des programmes de meilleure qualité, même si le rendu n’est pas forcément le meilleur possible. Mais au moins il y a de bonnes recherches en termes de magazines santé, éducation, agriculture… On sent des efforts pour coller aux attentes des populations. Pour ce qui est de l’Agence gabonaise de presse (AGP, ndlr), vous connaissez leurs difficultés qui sont d’ordre budgétaire et organisationnel. Nous sommes actuellement concentrés sur le programme Gabon Télévision. Après cette étape, nous allons essayer de voir le cas de l’AGP, pour offrir le fil qui permettra aux quotidiens papiers, aux journaux en ligne, d’avoir une vraie source d’information. Et après, chacun analysera et traitera l’information selon son moule. Mais au moins, qu’il y ait déjà la première base.

Un élément important c’est le développement du cinéma. A titre d’exemple, l’Institut gabonais de l’image et du son (Igis, ndlr) a de grosses ambitions sans pour autant en avoir les moyens, aussi bien humains, matériels que budgétaires. Ce que nous essayons de faire, c’est de trouver des sources complémentaires et innovantes de financement. Je me suis attelé à rencontrer les cinéastes et producteurs pour discuter avec eux, car il existe aujourd’hui un cinéma indépendant qui commence à se structurer même si les produits ne sont pas encore de grande qualité. Mais il faut leur donner l’occasion de s’organiser. C’est d’ailleurs dans ce sens que j’irai à Franceville pour le festival du film de Masuku, montrer l’intérêt de l’Exécutif pour ce genre d’organisations.

Par ailleurs, nous réfléchissons actuellement avec l’Igis, à la création d’un marché du film indépendant (documentaire, fiction, etc.). Et voir comment, au cours du mois de février 2016, on pourra lancer une première quinzaine du film indépendant avec les différents producteurs, et leur donner une possibilité de s’exprimer. Ce sont là autant de chantiers que nous sommes en train d’ouvrir, dans une démarche participative. Car nous sommes dans le domaine de la communication et il est impossible de prendre un certain nombre de mesures sans impliquer les principaux concernés. Nous allons donc impliquer les uns et les autres pour trouver des solutions qui correspondent à la fois à ce qu’eux-mêmes sont capables de faire ; mais aussi à ce que l’Etat, dans les conditions budgétaires actuelles, est capable de faire.

Vous avez parlé de Gabon Télévision. D’aucuns estiment que vous y êtes trop souvent ou, encore, que vous vous immiscez dans les conférences de rédaction. Quelle explication ? Gabon Télévision serait-il votre cheval de bataille ?

D’entrée, je dirai avoir l’impression, de façon globale, que la presse aujourd’hui mène contre moi une forme de guerre préventive. On m’accuse de choses, sans qu’il n’y ait le moindre commencement de preuve de quoi que ce soit. Depuis mon arrivée au ministère de la Communication, je n’ai encore pris aucune décision à l’encontre d’un organe de presse ou d’un journaliste ; aucune ! Je n’ai encore pris aucune décision nuisible à la presse. Bien au contraire. J’ai été à Gabon Télévision et Radio Gabon tous les matins pendant plus d’un mois à l’occasion de la série d’interviews quotidiennes des membres du gouvernement dans le cadre des six ans du mandat du président. Et je me suis fais le devoir de recevoir personnellement, chaque matin, les membres du gouvernement qui arrivaient, estimant que c’était un minimum de courtoisie de les accueillir. C’est ce qui, en définitive, a donné aux gens l’impression que j’étais là en permanence. Or depuis que la «Matinale» s’est achevée, je n’ai quasiment plus été à la maison Georges Rawiri. Pour ce qui est de la rédaction, je suis allé le même jour à celle de Gabon Télévision et Radio Gabon pour voir comment elles fonctionnaient et comment elles étaient structurées.

Et j’ai été étonné de constater que cette rédaction n’a pas de patron. Vous avez un directeur des actualités et son adjoint mais il n’y a pas de rédacteur en chef, comme le veut la structuration d’une rédaction normale (…) Il est donc de notre responsabilité, en tant que ministre de la Communication, d’essayer de relever les standards de nos médias publics. J’ai donc interpellé la hiérarchie pour que ces rédactions s’organisent et soient structurées comme il se doit. C’est la seule chose que j’ai faite. Je ne suis jamais intervenu dans le contenu d’un reportage, pour sanctionner un reportage, quand bien même certains de mes éléments ont été mal diffusés à la télévision. J’ai été invité dans une émission au cours de laquelle j’ai subi comme personne avant moi, avec notamment de l’incorrection de la part de journalistes en face de moi. Pourtant ces derniers n’ont nullement été sanctionnés par moi. Car c’est au public de sanctionner. C’est à lui de juger de la pertinence d’un journaliste, pas à moi.

La rumeur veut pourtant que vous soyez à l’initiative de la suppression de l’émission «Débat de presse»…

Ce n’est pas rumeur car, oui, j’ai demandé à ce que cette émission soit reformatée. Nous parlons ici d’un média public qui signe avec l’Etat un contrat d’objectif et de performance. Ce contrat a été signé. Et lorsque vous lisez un tant soit peu les textes qui régissent à la fois le ministère de la Communication et ceux créant Gabon Télévision, il y a un certain nombre d’exigences de qualité, de pluralité et autres exigences pour faire en sorte que les composantes de la nation se retrouvent au niveau des éditions d’information et différents magazines. Le reproche que j’ai fait à cette émission, après avoir reçu Sylvain Abessolo et son compère, c’est d’en avoir fait un rendez-vous de copains où il y a en réalité une distribution de rôles. Et que la pluralité des médias ne soit pas représentée dans cette émission, pas plus que la diversité ethnolinguistique du pays. J’ai donc clairement signifié aux animateurs de cette émission qu’ils ne pouvaient pas avoir cinq invités, dont quatre sont de la même communauté ethnolinguistique et qui prennent la même position à l’antenne. Position victimaire d’une communauté qui subit, soi disant, les affres du régime. Je leur ai donc demandé de re-formater le produit. Une fois cela fait, l’émission reviendra à l’antenne, avec la présence d’éditorialistes, des personnes ayant rédigé des articles et qui viennent défendre leur production. Et là, ça aura certainement plus de sens que ce qui était fait auparavant.

Un autre reproche que vous fait la corporation, c’est d’avoir porté plainte contre un journal du groupe Oloumambe…

Visiblement, la corporation n’a que des reproches à me faire. Nous sommes dans un Etat de droit. Je consens qu’on écrive tout mais lorsqu’on le fait, sans vouloir passer pour un donneur de leçons, le minimum c’est de vérifier les sources. Les journaux L’Aube et La Loupe, puisque que c’est d’eux qu’il s’agit, se sont spécialisés dans l’injure et dans des contradictions extraordinaires. Prenez juste deux affaires, notamment l’affaire de l’université où on me reproche d’avoir déshabillé le recteur. Pendant des semaines, La Loupe a ouvert ses colonnes à Aimé Mapangou qui a longuement expliqué que Billié-By-Nzé n’a rien à voir avec cette histoire. Cela a été écrit. Quelques semaines plus tard, le même journal écrira que c’est Billié-By-Nzé qui a déshabillé le recteur. Où est la logique là-dedans ? On s’interroge donc sur la déontologie de vos confrères. L’autre exemple est un article selon lequel Billié-By-Nzé serait un escroc multi-récidiviste. Je rappelle que les faits concernant cette histoire m’ont opposé à une amie (Blandine Mbadinga, ndlr). Ce n’était pas de l’escroquerie : j’ai acheté un véhicule auprès de cette dame. Je lui émis un chèque qu’elle a présenté avant délai et, par conséquent, a été estampillé sans provisions. A l’issue de ça, j’ai connu des difficultés avec la justice qui ont été réglées.

Je rappelle quand même pour mémoire que je suis allé en cassation et que cette dernière a classé tous les actes qui ont été posés dans cette affaire et m’a totalement blanchi. Mais qu’est-ce que cela a y voir avec mon activité de ministre aujourd’hui ? Je veux bien qu’on critique mon action de ministre. Mais évoquer des faits remontant à plus de 21 ans et pour lesquels ces journaux ont eux-mêmes écrit dans leurs colonnes que je n’avais rien à y avoir, allez-y comprendre quelque chose. Voilà donc le problème qui m’oppose au groupe auquel appartiennent ces deux organes de presse. J’ai donc porté plainte contre L’Aube et j’ai d’ailleurs eu l’honneur de recevoir les créateurs de ces titres qui m’ont informé qu’ils n’avaient plus rien à voir avec ces journaux et que leurs noms sont utilisés aujourd’hui contre leur gré et qu’il s’agit donc de journaux en totale illégalité. Je me demande donc comment ces journaux continuent à paraître dans un Etat de droit, son directeur de publication est un prête-nom, le créateur un faux nom, les articles sont systématiquement signés de personnes qui n’existent pas au civil.

Vous parlez d’Etat de droit. Ce qui nous pousse à évoquer l’ordonnance n°15/PR/2015 du 11 aout 2015 portant organisation et fonctionnement de la justice que l’on reproche au gouvernement d’avoir pris en intersession alors qu’il n’y avait pas urgence. Comme si l’on voulait éviter que le Parlement ne puisse revoir le texte…

Cette lecture n’est ni conforme à la vérité, ni à l’ordonnancement des choses dans notre pays. Une ordonnance, quand bien même elle est prise en intersession parlementaire, c’est une prérogative confiée au gouvernement par la Constitution. Il est vrai que la Constitution la limite aux cas d’urgence, mais cette urgence n’est pas déterminée. Cette dernière est donc évaluée par l’autorité qui prend l’ordonnance, donc le chef de l’Etat et le gouvernement qui l’assiste dans cette opération. Ensuite, l’ordonnance doit être ratifiée par le Parlement. Ce n’est donc pas une façon d’éviter quoi que ce soit mais d’agir au plus vite. Car nous étions confrontés à la nécessité de réformer la justice. Et chacun, depuis des années, appelle à ce qu’il y ait effectivement une réforme de la justice. Nous étions dans l’obligation de donner à la justice des outils nouveaux pour affronter de nouveaux défis, avec la grande délinquance, aussi économique que financière mais également la criminalité de sang observée et dénoncée par tous.

Malheureusement, les juridictions actuelles ne donnaient pas la possibilité d’aller plus loin. Le ministre de la Justice a donc jugé utile de passer par cette ordonnance pour réformer la justice. Il est apparu, à la lecture du rendu de la Cour constitutionnelle, qu’il n’aurait pas fallu le faire de cette façon là. On en prend acte, sachant que les décisions de la Cour ne font pas l’objet de recours. Nous n’avons pas, là-dessus, à critiquer quoi que ce soit. N’empêche que la décision de réformer la justice demeure. Le gouvernement passera par un mécanisme plus adapté pour atteindre cet horizon.

Cette décision de la Cour constitutionnelle va tout de mettre en flottement certaines actions ou procédures entamées. On pense notamment au procès de Serge Maurice Mabiala et à l’enquête en cours au ministère des Eaux et Forêts… Que compte faire le gouvernement à ce niveau ?

Lorsqu’on parle de l’Etat de droit, le gouvernement lui-même est soumis au respect de la loi et des décisions de justice. Les cas sus évoqués, sans en faire un débat de personnes, montrent bien les difficultés qu’il y a dans un pays lorsque la justice n’a pas les outils nécessaires pour se prononcer. Concernant l’enquête en cours au ministère des Eaux et forêts, un rapport a été fait en conseil des ministres qui a fait état d’un certain nombre de trafics s’agissant des essences rares, notamment le kévazingo. Trafics qui auraient impliqué plusieurs responsables dudit ministère, aussi bien à Libreville qu’à l’intérieur du pays. Le conseil des ministres a donc instruit le ministre de tutelle de poursuivre les enquêtes par les voies régulières, surtout que ces enquêtes ont été confiées à une juridiction qui vient d’être retoquée par la Cour constitutionnelle. En l’état actuel, nous ne savons pas encore comment réagir. Il y a sûrement des mécanismes de droit qui vont être explorés pour que, d’une part, il n’y ait pas relaxes systématiques et que, d’autre part, cela soit orienté vers des juridictions qui soient à même de répondre de ces questions.

Pour la première fois depuis sa mise en place, rien n’a filtré sur la subvention à la presse alors que nous sommes déjà en décembre. Vous affirmiez il y a quelque temps que cette manne serait désormais étendue aux télévisions et radios, avec une enveloppe de 500 millions qui n’était dédiée qu’à la presse écrite. N’avez-vous pas fait un amalgame avec le Fonds national d’aide à la presse ?

L’amalgame n’a pas été fait par moi, mais par ceux qui interprètent ce que je dis. J’ai indiqué que la subvention à la presse qui a fait l’objet d’une inscription budgétaire, qui est passé de 500 à un peu moins de 300 millions de francs dans la loi des finances rectificative, concerne uniquement la presse écrite. Et j’ai précisé que le Fonds d’aide à la presse (Fonapresse, ndlr) qui s’étendra aux autres médias, est un fonds de 2 milliards de francs. Et nous attendons que la loi soit définitivement adoptée pour être promulguée par le président avant d’être mise en exécution. J’insiste là dessus : cette année nous ne donnerons pas de subvention aux médias qui sont en porte à faux avec la loi en ce qui concerne les déclarations à la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS, ndlr), le paiement des impôts, l’existence d’un siège… Qu’ils écrivent et crient autant qu’ils le peuvent, la loi s’appliquera. Pour ceux qui sont en conformité avec la loi, il n’y a pas de raison qu’ils ne bénéficient pas de cette aide de l’Etat.

Y a-t-il un sujet que nous n’avons pas abordé, mais sur lequel vous auriez souhaité vous prononcer ?

Je ne l’ai pas abordé mais je tenais à insister sur le fait que notre objectif au ministère de la Communication est d’accompagner les médias, aussi bien publics que privés, dans leur développement. Car, pendant longtemps, on a pensé que le ministère n’était en place que pour les médias publics. Pour exemple, Gabonreview et l’ensemble des médias en ligne méritent d’être accompagné par notre administration, au même titre que les radios, télévisions et journaux privés. Cet accompagnement signifie par ailleurs que nous aidons les médias à se conformer à la loi. Il ne s’agit pas de tuer ou de liquider qui que ce soit comme je l’entends et le lis. Voici donc l’orientation que nous avons : faire en sorte qu’il y ait un vrai développement des médias au Gabon, loin de l’informel.

 Commentaires