Alors que l’Assemblée nationale a adopté en plénière, le 27 novembre dernier, la loi de finances 2016, Alexandre Barro Chambrier s’est refusé à voter ce budget en l’état. Si Gabonreview s’est étonné de ce qu’au moment du vote, l’élu du 4è arrondissement de Libreville, ait levé la main pour signifier son abstention, un observateur de la scène politique gabonaise explique qu’il ne pouvait en être autrement. «Dans l’usage parlementaire, on ne peut voter contre son propre camp, sauf à rallier celui d’en face. En s’abstenant de voter, Barro Chambrier a manifesté son refus. Voter contre signifierait, symboliquement, qu’il est passé à l’opposition. Or, il reste un PDGiste qui ne peut voter contre son camp, tout au plus peut-il s’abstenir pour marquer sa désapprobation. Il a agit dans la règle. Il faut plutôt s’étonner de ce que l’opposition à l’Assemblée nationale se soit également abstenue, plutôt que de voter contre», explique l’observateur plutôt proche de l’opposition. Voilà qui remet les pendules à l’heure.
Alexandre Barro Chambrier s’est donc refusé à donner son approbation au budget de l’Etat tel que présenté.
«Nous pensons en notre âme et conscience que ce budget n’est pas adapté à la situation actuelle de notre pays», a déclaré l’ancien ministre du Pétrole. «Ne pouvant nous résoudre à laisser nos marges de manœuvre à la bonne fortune du secteur pétrolier et compromettre la mise en œuvre du PSGE et le financement de la stratégie nationale d’investissement humain au profit des projets structurants liés à l’organisation de la Coupe d’Afrique des nations 2017, il ne nous est pas possible de voter ce budget en l’état», a réitéré le député, appelant à la restauration d’un appareil statistique fiable.
Selon lui, aucune donnée sur le stock d’arriérés des deux exercices précédents n’est disponible. «Il convient donc de maîtriser le niveau réel des arriérés externes et internes aux fins de les apurer», a-t-il insisté, relevant que les dépenses supplémentaires non supportées sont estimées entre 1 et 5% des dépenses totales.
A ces manquements, l’élu du 4è arrondissement de Libreville a souligné d’autres faiblesses comme les écarts entre les transactions budgétaires et la compatibilité qui s’y rapporte ; les écarts entre l’état de paie et les fiches du personnel. «Ce qui suscite des interrogations sur les 732,6 milliards de francs CFA estimés pour les dépenses du personnel, la réalité devant être bien au-delà», a-t-il relevé.
Autre urgence évoquée: la mise en œuvre des mesures d’ajustement supplémentaires pour ne pas sacrifier les dépenses d’investissement et favoriser une saine relance de l’économie.
Fort de ce qui précède, le député pense que «l’analyse proprement dite du budget 2016 laisse transparaitre un budget déséquilibré. En dépit des artifices comptables, le déficit file à près de 108 milliards et la dette ne cesse de croître dans des proportions insoutenables». A ses yeux, le choix de laisser libre cours au déficit et à la dette, n’est pas raisonnable, aussi bien économiquement, politiquement que socialement.
Alexandre Barro Chambrier estime, en conséquence, que «cette orientation fait peser des risques sur la stabilité financière et macroéconomique du pays et sa capacité à maintenir les niveaux d’investissement requis pour les années à venir». «La situation va s’aggraver et les plafonds annuels des nouveaux engagements ne seront pas respectés», a-t-il averti, non sans préconiser de revoir urgemment les bases ayant permis d’octroyer des exonérations généreuses, contribuant à éroder le rendement des recettes fiscales, notamment en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA).
Alexandre Barro Chambrier a également accordé une place de choix aux recettes hors pétrole, relevant qu’il y a une «une tendance à sous-estimer l’effet d’entrainement du secteur pétrolier sur le secteur hors pétrole, lui-même plombé par l’insuffisance des réformes structurelles sur l’environnement des affaires». Insistant sur la hausse des dépenses, il a mentionné que les paramètres pétroliers ont diminué de plus de 40 voire 50% par rapport à leur niveau de la première moitié de l’année 2014.
«Il sera dans un tel contexte difficile de maitriser le niveau de la dette publique dont l’encours a plus que doublé en six ans pour dépasser le plafond de 35% du PIB que s’est imposé le gouvernement aujourd’hui à 37,04%», a-t-il laissé entendre, affirmant que dans un tel contexte, il faudra nécessairement recourir à de nouveaux emprunts.