Mais qui est cet homme d’Etat, cultivé et mesuré, à l’opposé de l’exubérance ou encore du vedettariat qui caractérise certains acteurs politiques au Gabon ? Quel est son positionnement réel ? Est-il en embuscade pour la présidentielle de 2016 ?
Depuis Janvier 2015, que ce soit avec le Front de l’opposition pour l’alternance (le Front) ou de sa propre initiative, aucun mois ne s’écoule sans que Didjob Divungi Di Ndinge n’aille à la rencontre des populations gabonaises. L’intéressé justifie cette activité politique, que beaucoup d’observateurs n’ont pas manqué de relever, par le souci d’informer ces populations sur la situation du pays et sur les activités du Front et par celui de leur partager son point de vue sur les problèmes brûlants de l’heure.
Didjob Divungi Di Ndinge se positionne déjà en vue de la prochaine élection présidentielle. Mais il s’en défend et il persiste à convaincre ceux qui lui en parlent, que sa posture est essentiellement motivée par la situation politique, économique et sociale grave que connaît le pays et par le besoin de renouer avec la base de son parti, l’Alliance démocratique et républicaine (Adere), après une longue absence.
Culture du riz
L’on n’a pas oublié que suite au décès d’Omar Bongo, il s’était montré perplexe, devait choisir entre la continuité du régime hérité du défunt président et que se proposait d’assurer Ali Bongo et le changement que prônaient les candidats de l’opposition, y compris les néo-opposants. A la surprise générale, il décide de ne pas présenter sa candidature et, avec l’Adere, de ne soutenir ni Ali Bongo ni aucun autre candidat. Il prend alors ses distances, se met en retrait de la vie politique et se consacre à la promotion d’un projet agricole : la culture du riz.
Mais telle une drogue à accoutumance, la politique finit toujours par rendre dépendant. Ainsi après cinq années de retrait, il décide de sortir de sa réserve et prend ses responsabilités. Il a certainement pris tout le temps de la réflexion avant de rejoindre ses compatriotes. De son avis, «depuis six ans, le Gabon tend à perdre en crédibilité au niveau international. Le pouvoir par des effets d’annonces sans lendemain ruine les espoirs et les attentes des populations tout en niant leurs droits légitimes». Un seul coupable est pointé du doigt par de nombreux compatriotes : Ali Bongo Ondimba.
Retour dans l’arène
Le 6 Décembre 2014, dans une déclaration sans complaisance sur la situation du pays et la gouvernance d’Ali Bongo Ondimba, Divungi Di Ndinge se range du côté de l’opposition et adhère au Front de l’opposition pour l’alternance.
«Je me bats pour une politique économique et sociale en rupture avec les exclusions et les dérives autoritaires. J’assume la responsabilité de mon engagement pour la promotion d’un véritable État de droit au Gabon. Je me mets au service des femmes et des hommes qui aspirent à une véritable démocratie, à une réduction drastique de la fracture sociale grâce à une meilleure répartition de la richesse nationale. Je milite pour une alternative politique unitaire et crédible qui doit permettre de restituer au peuple gabonais sa souveraineté, à la Nation sa dignité et au pays la garantie d’une réelle prospérité pour tous», déclare alors l’ancien vice-président d’Omar Bongo.
Pour lui comme pour les autres membres du Front, la solution pour atteindre ces objectifs ne peut être que l’alternance au pouvoir grâce à un cadrage institutionnel, administratif et opérationnel des futures élections, susceptible d’en garantir la liberté, la transparence et la crédibilité. A Port-Gentil, au cours d’une causerie politique, le 7 novembre dernier, faisant le point sur la situation du pays, il a estimé que celui-ci traverse une crise multisectorielle sans précédent. Celle-ci se manifeste depuis 6 ans par «une politique d’exclusion qui favorise le repli dans des identités restreintes, une politique d’exclusion qui substitue la discrimination à l’union et la solidarité clanique à l’unité nationale». Pour lui, cette crise est matérialisée, sur le plan institutionnel, par l’arrivée et le maintien au pouvoir d’un président «sans papiers», qui s’est fait établir un faux acte de naissance et l’a utilisé pour son dossier de candidature à l’élection présidentielle de 2009.
Le Président de l’Adere dénonce, pêle-mêle, la confiscation des libertés publiques, la corruption, l’enrichissement illicite, le détournement des deniers publics, la gabegie de la gestion financière. «Les caisses de l’Etat sont vides» a-t-il laissé entendre, toujours à Port-Gentil. Pour lui, «le pays est presque dans le chaos», situation dans laquelle se complaît à le voir «une dictature rampante» incarnée par un «pouvoir qui cultive l’ignorance, la pauvreté et la peur pour mieux asservir le peuple».
Présidentielle 2016
Le président de l’Adere qui reconnaît qu’il est impossible d’avoir un système électoral parfait, exige cependant la mise en place des conditions d’une meilleure transparence avant toute élection. «Nous ne pouvons pas aller à la prochaine élection présidentielle avec un adversaire « sans papier ». Nous demandons le retour aux dispositions de la constitution de 1991 avec notamment une élection à deux tours et la limitation des mandats». Par ailleurs, il souhaite que soient revues de fond en comble, la composition de la Cour constitutionnelle, celle de la Cenap ainsi que les prérogatives du ministère de l’intérieur en matière électorale. Divungi Di Ndinge ajoute : «Je n’accompagnerai personne à la prochaine élection présidentielle dans les conditions actuelles, parce que je sais que c’est peine perdue. Ce qui s’est passé en 1993, en 1998 et en 2009 risque de se produire en 2016. Les mêmes causes produisant les mêmes effets». Et de conclure: «Mon engagement politique est un engagement citoyen. Mon ambition est de permettre aux gabonaises et aux gabonais d’être au cœur de l’action politique et au cœur du développement de notre pays».