Invité à la matinale de Radio Gabon, le 7 novembre dernier, le ministre des Relations avec les institutions constitutionnelles s’est longuement épanché sur l’interaction institutionnelle, donnant le sentiment que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes.
En quoi consiste le travail du ministère dont vous avez la charge ?
En réalité, le rôle d’interface joué par le ministère chargé des Relations avec les institutions constitutionnelles est dévolu au chef de l’Etat. C’est lui qui est garant du pouvoir exécutif, donc de l’interface entre le public gabonais, le gouvernement et le législatif. Mais quoi qu’il en soit, l’article 28 de notre loi fondamentale stipule que le gouvernement conduit la politique de la nation sur l’autorité du chef de l’Etat et en concertation avec lui. Et l’article 29 stipule qu’il peut déléguer certains de ses pouvoirs aux autres membres du gouvernement. C’est à ce titre que le ministère dont nous avons la charge assure l’interface entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif, mais aussi les institutions constitutionnelles non parlementaires. Pour les institutions parlementaires, il s’agit de l’Assemblée nationale et du Sénat, quand celles non parlementaires sont, entre autres, le Conseil national de la communication, le Conseil économique et social, et plus récemment le Conseil national de la démocratie. Aussi, les pouvoirs judiciaires, avec la Cour des comptes, le Conseil d’Etat, la Cour de cassation, la Haute cour de justice et la Cour constitutionnelle.
Comment se fait l’exécution de vos missions régaliennes, et comment appliquez-vous les principes de légalité et d’égalité, en rapport avec le principe de l’Etat de droit ?
L’application de l’Etat de droit et des missions régaliennes repose sur le décret 00937/PR du ministère de l’Enseignement supérieur, de l’Innovation technologique et des Relations avec les institutions constitutionnelles. Ce décret établit exactement le rôle du ministère, en ce qui concerne ses actions au niveau du Parlement, au niveau des institutions non parlementaires et au niveau de l’exécutif. De ce fait, l’action du ministère se déroulait en quatre étapes essentiellement : la première est de suivre l’élaboration des projets de lois, les transmettre au Parlement après leur mise en forme par les techniciens du ministère et du secrétariat général du gouvernement, en vue de leur adoption en plénière et leur retour au gouvernement puis au secrétariat général de la présidence de la République pour leur promulgation. A la suite de quoi, elles seront publiées dans le journal officiel avant la phase exécutoire. Cette démarche permet au socle juridique, à la diplomatie institutionnelle, qu’assure notre ministère, donc à l’Etat de fonctionner de façon normale.
L’une des missions de votre département est de créer un climat de courtoisie et de tolérance entre les deux assemblées aux travers des rencontres avec la majorité et l’opposition. Cela est-il vérifiable dans les faits, au regard du climat politique actuel ?
Le climat, aujourd’hui, est d’une sérénité parfaite, parce que notre ministère a le devoir d’avoir un fair-play permanent entre l’opposition et la majorité présidentielle. C’est lui qui doit anticiper les actions et les réactions des uns et des autres concernant une loi ou une proposition de loi.
Les relations institutionnelles sont-elles pour autant au beau fixe ?
C’est ce qui est devenu la diplomatie institutionnelle dont je parlais précédemment. Le ministre des Relations avec les institutions constitutionnelles ne reste pas dans son bureau. Il est forcément au Parlement pour réguler l’action et les idées des uns et des autres, entre le Parlement et l’exécutif. Au niveau du Parlement, notamment entre l’Assemblée nationale et le Sénat, le ministre doit faire la navette.
Parlant de cette navette et du rôle d’interface que vous jouez. Comment expliquer les retards constatés dans la transmission des textes entre le Parlement et le gouvernement ?
L’interface, c’est le milieu. C’est un milieu qui permet à l’un et à l’autre de se contacter, de se parler et de faciliter le contact des pouvoirs exécutif et législatif. Le retard, moi, je n’en ai pas trouvé. Ma collègue et prédécesseur a fait un travail extraordinaire, qui a permis de faire aboutir les ordonnances car une ordonnance, lorsqu’elle a été prise en conseil des ministres sur instruction du chef de l’Etat, elle doit être ratifiée lors de la prochaine session. S’il s’avère que par le passé il y avait quelques petits retards, actuellement, on n’en compte pas du tout. Mais quoi qu’il en soit, l’objectif du ministère est de mettre dans chaque département des points focaux, qui ont le devoir d’analyser quotidiennement les textes en vigueur, les textes en attente et ceux en projet. Partant, notre ministère se chargera de les ventiler au niveau du Parlement pour qu’ils suivent la voie normale.
Parlant du Conseil national de la démocratie. Ce cadre réaménagé est-il véritablement opportun à ce jour ?
Je pense que le projet social et politique qui a amené à ce que les Gabonais apportent leurs suffrages à Ali Bongo Ondimba repose sur sa volonté de mettre en place un cadre démocratique leur permettant de s’exprimer, pour avoir une avancée démocratique au niveau international, mais surtout pour que le Gabon émergent repose sur un socle, un ciment. Voyez, le Gabon émergent, cette maison que le président de la République présente en permanence, a trois piliers qui reposent sur la gouvernance, et cette gouvernance est du rôle du ministère des Relations avec les institutions constitutionnelles. De ce fait, pour renforcer cette démocratie, et au regard de ce qui s’est passé lors des Accords de Paris, le chef de l’Etat a insisté pour que le CND soit redynamisé. Cette institution a été dirigée par de grandes personnalités, dont M. Jules Bourdès Ogouliguende, M. Maganga Moussavou et Pierre Claver Nzeng Ebome. En janvier 2015, le président a pris une ordonnance pour lui donner plus de pouvoir. Ordonnance qui a été ratifiée en juin 2015. Aujourd’hui, le CND constitue le cadre juridique de discussion politique, comme on dit chez nous, le «Mbandja». Cette action a d’ailleurs été saluée et encouragée par les organisations internationales, dont l’Organisation internationale de la francophonie, lors de la dernière visite de son secrétaire général au Gabon. J’ai, moi-même, assisté à l’ouverture et à la clôture de la deuxième session ordinaire, présidée par le président actuel, Me Séraphin Ndaot Rembogo, au cours de laquelle nous avons constaté l’avancée des discussions, avec des débats politiques d’un très haut niveau, qui vont permettre au gouvernement de s’en approprier, et au Parlement de regarder en profondeur, dans l’objectif de faire avancer la démocratie au Gabon.
En cas de litige entre différents partis politiques, votre département peut-il jouer un rôle de médiateur pour tenter de régler le différend ?
Non ! Le médiateur, c’est le CND. Il est chargé de régler les questions de position politique entre les partis. C’est le «Mbandja», l’endroit où, chaque parti, s’il est discordance avec un autre de la majorité ou de l’opposition, doit se retrouver pour débattre. Le ministère des Relations avec les institutions constitutionnelles viendra en tant qu’observateur. Il écoute, regarde et en fait la synthèse, pour rendre compte fidèlement au chef de l’Etat.
Vous avez cité à l’instant les personnalités ayant présidé le CND jusqu’au président actuel. Ils appartiennent tous à la classe de l’opposition. Effet de coutume ou force de droit ?
Force de droit ! La loi dit clairement que le poste de président du CND est occupé par l’opposition et celui de la vice-présidence par la majorité. Et aujourd’hui, la présidence est occupée par un membre de l’opposition et la vice-présidence par un membre du PDG (Parti démocratique gabonais, ndlr). Ce n’est pas du tout anodin. C’est justement pour l’équilibre, pour qu’on n’ait pas de parti pris au sein de l’institution. De même, il s’agit d’insister sur la séparation des pouvoirs.
Pourtant, des voix au sein de l’opposition se font entendre, qui condamnent ce cadre, bien qu’il compte un nombre importants de partis politiques…
Lors de la création de toute structure, l’adhésion totale n’est naturellement pas de mise. Cette adhésion vient de façon progressive, à ce jour, sur environ 56 partis légalement reconnus, 51 étaient présents lors de la deuxième session plénière. C’est donc 90% ! C’est tout à fait normal que certains en qualifient comme ils veulent, mais nous constaté que les appels du pied étaient là. D’aucuns se sont approchés de nous, sollicitant une invitation officielle. A ceux-là, nous demandons d’assister aux débats qui sont forts intéressants, de même la façon qu’ils ont volontairement créé leurs partis politiques.
Votre ministère entend informatiser le système administratif public, en vue de meilleurs échanges entre les institutions. Où en est-on avec ce projet ?
Ce projet est d’actualité. Nous avons reçu récemment des techniciens chevronnés dans le domaine, qui travaillent avec les nôtres dans le cadre de sa mise en place, avant sa présentation au gouvernement pour qu’il soit validé.