Lorsque l’on observe les hommes politiques gabonais se déployer devant leurs compatriotes avec pour principal argument les mots, on a l’impression aujourd’hui d’avoir déjà tout entendu. C’est qu’alors que le peuple demande à ces derniers d’épouser de plus en plus l’ère du pragmatisme, ils semblent tourner le dos à cette requête qui visiblement exige d’eux un comportement peut-être hors du commun.
Le Gabon, à en juger par les actes posés par la majorité des hommes politiques, ressemble bien à un gâteau qu’il faut partager entre quelques individus qui se croient investis de la mission de diriger ce pays. L’on a connu Omar Bongo Ondimba comme homme politique « exemplaire », cela est discutable, mais l’une de ses bourdes, selon ceux pour qui le Gabon n’est encore qu’une épaisse vache laitière, majorité-opposition confondues, c’est d’avoir en plein milieu de son magistère oser proposer à tous les dignitaires de son régime de prendre un peu de ce qu’ils avaient en épargne, sachant comment leur fortune était bâtie, pour venir ainsi renflouer les caisses d’un Etat qu’ils disaient servir avec abnégation, alors qu’ils se servaient en vérité plutôt de lui.
Aujourd’hui, l’envie de gérer le Gabon se dessine comme une volonté affichée par la plupart des hommes politiques de se hisser à la tête du pays et imposer leur diktat à ceux qu’ils appellent pompeusement ‘’compatriotes’’. Même s’il est vrai que le premier indicateur pour juger un politique est son projet de société et sa probité morale, le pouvoir étant une drogue comme l’affirmait un Gabonais, le vécu quotidien nous recommande de soutenir qu’une fois ledit projet déballé et la confiance de la majeure partie du peuple obtenue, celui qui l’a sollicitée se mue souvent en une personnalité sourde aux attentes de ses compatriotes qui déchantent et cherchent par tous les moyens les voies de hisser aux fonctions présidentielles quelqu’un pour qui le bien du grand nombre revêt une signification.
Qu’est- ce que cela coûte d’être pragmatique ?
Dommage, car étant aux affaires, les dirigeants du moment s’entourent des garanties nécessaires pour pérenniser leur pouvoir. Au lieu de passer le temps à distraire le peuple en n’évoquant que les questions liées à la liste et au fichier électoral, pourquoi pouvoir et opposition qui ont dans la plupart des cas emmagasiné, ne réfléchissent-ils pas aux moyens de se tourner vers les paradis fiscaux dans lesquels sommeillent leur argent en milliards de dollars ou d’euros, qu’ils fêtent chacun à sa manière pour, si cela leur dit encore d’être honnêtes, aider comme cela se fait sous d’autres cieux, l’Etat à élaguer les difficultés auxquelles il fait face.
Dieu seul sait combien il y en a entre celles qui relèvent des erreurs humaines, mauvaise gouvernance par exemple, et les conjoncturelles comme c’est le cas aujourd’hui avec la baisse drastique du coût du baril de pétrole. Aucune, mais alors aucune voix, alors que l’on n’est pas loin de penser que c’est ce qu’attendent avec impatience la majorité des Gabonais, ne s’élève chez ceux que l’on appelle les « barons » pour changer le discours trop politicien qui se résume en une phrase bien connue de tous : « ôtes- toi que je m’y mette ! ». Le peuple va-t-il après avoir vécu l’expérience des années 90 et l’illustration de personnalités oh combien ambivalentes tel le père Paul Mba Abessole, continuer à se laisser berner par un discours qui n’est plus livré avec foi, mais par pur et simple opportunisme, le vendeur d’illusions profitant d’une situation sociopolitique marquée par une indescriptible confusion ?
Une question qui en appelle une autre !
Est-il temps pour l’homme politique gabonais de faire son introspection afin qu’il se ravise sur les maux qu’il a occasionnés à la société dans le but de lui restituer un peu de ce qu’il lui doit s’il pense encore avoir un peu en épargne. A ce moment là, le débat politique, parce que c’est de cela dont il s’agit, serait intéressant et enrichissant puisqu’il amènerait des institutions comme la Commission nationale de lutte contre l’enrichissement illicite à mieux s’exprimer sur le terrain et les tribunaux à être un peu plus opérationnels en la matière.
Jean- Boniface Assélé s’est toujours vanté d’avoir, dixit, pris dans les caisses de l’Etat, mais avoir investi dans le pays. Ce qui est vrai et vérifiable en même temps que l’on sait qu’il mérite bien de porter son qualificatif de « Tonton associé » quand on sait son investissement dans le sens de l’éclosion de la jeunesse gabonaise. Qui dit mieux ? Sommes-nous tentés de nous demander. Peut- être allons- nous reconnaître pour le regretter que Maître Louis- Gaston Mayila s’est, lui aussi, essayé avec « Mazda », « Sotega » avant de créer, ce qui fait aujourd’hui sa fierté auprès de la population du tout Tsamba Magotsi, une usine à Yombi son village natal où il emploie de nombreux compatriotes.
En dehors de ces quelques exemples qui souffrent de ne pas être exhaustifs à notre décharge, ils ne courent pas la rue les innombrables milliardaires façonnés par Omar Bongo Ondimba qui s’illustrent dans des œuvres à caractère social. Et pourtant, ils veulent tous gouverner le pays qu’ils disent aimer plus que quiconque. N’y’a-t-il pas lieu ici de parler de paradoxe ? S’ils émettent des réserves, il est temps qu’ils le fassent savoir au peuple, preuves à l’appui, pour qu’ils se disculpent, profitant du climat qui prévaut en ce moment et qui est plus que jamais propice à la contradiction.