Directeur de la Caistab et ancien patron des services de renseignement, Léon Paul Ngoulakia, «frère» du président de la République, a démissionné du Parti démocratique gabonais.
Non officialisée par le Parti démocratique gabonais (PDG), la démission de Léon-Paul Ngoulakia du parti au pouvoir a été confirmée en off par des personnalités haut placés et, d’une certaine manière, par une déclaration de Jean Boniface Assélé, oncle du concerné et patriarche de la famille Dabany. Dans une prise de parole médiatisée effectuée à Franceville, le 19 octobre, le président du Centre des libéraux réformateurs (CLR) a indiqué : «Je viens d’apprendre par les réseaux sociaux, tout en m’étonnant et en même temps que je le déplore, la démission du PDG de mon neveu Léon-Paul Ngoulakia. En ma qualité d’oncle de Léon-Paul Ngoulakia et de patriarche de la famille Dabany, je déclare devant l’opinion nationale et internationale, que ma famille et moi-même condamnons sans réserve, avec la plus grande énergie l’acte solitaire qu’il vient de poser et qui par ailleurs n’engage que lui.»
Raisons personnelles
Dans l’après-midi du même jour, en effet, un manuscrit présenté comme la lettre de démission de Léon-Paul Ngoulakia circulait sur les réseaux sociaux dont le contenu et la signature apposée ont été attestés par des proches du concerné, visiblement au fait de ce qui se tramait depuis le 16 octobre, date de rédaction de ladite lettre. Laconique et sobre, le directeur de la Caisse de stabilisation et de péréquation (Caistab) y signifie au secrétaire général du PDG sa démission de ce parti «pour des raisons personnelles». Interrogés sur celles-ci, quelques intimes de Ngoulakia indiquent que cet acte n’est que l’effet tardif de causes lointaines, remontant à l’animosité entre le démissionnaire et le directeur de cabinet du président de la République (Lire «Léon Paul N’goulakia en danger de mort ?». Le DG de la Caistab déplorerait également un certain autisme, un entêtement de son cousin de président de la République dans sa gestion controversée ou jugée catastrophique des affaires du pays, de même il lui reproche ne pas écouter les forces vives de la nation.
Dans les cercles les plus proches du pouvoir, il se raconte plutôt que depuis un bon moment Léon-Paul Ngoulakia faisait du chantage au chef de l’Etat et s’opposait aux réformes au sein de la Caistab, initiées par le gouvernement ; tout comme il dédaignait d’exécuter les résolutions du conseil des ministres. L’on se souvient notamment de son refus d’entériner des nominations d’un conseil des ministres. Le tout nouveau démissionnaire du PDG estimait alors qu’elles avaient été faites par un adjoint, maître de l’entourloupette, qui avait alors contourné son DG. «Il a dit au SG du parti qu’on l’emmerde et que le président ne prend pas son parti», indique une source du palais présidentiel qui ajoute : «il ne s’est jamais remis de la décision du gouvernement de libéraliser le secteur des hydrocarbures et de suspendre toutes les subventions publiques à ce domaine. Ce qui le prive tout de même d’une manne de plus de 10 milliards de francs CFA, issue chaque année de la taxe de péréquation sur les hydrocarbures.»
Famille et ricochet sur la Caistab
Le patron de la Caistab se trouve actuellement en Italie où il doit passer un accord avec Euro Chocolat, séduit par la qualité organoleptique du cacao gabonais présenté à l’exposition universelle de Milan qui s’achève le 31 octobre courant. «De fait, il peut considérer qu’il a également démissionné de la Caistab», note la source susmentionnée.
Assureur de carrière, Léon-Paul Ngoulakia était DG de l’Agence de promotion des investissements privés (APIP) avant d’être porté à la tête du Conseil national de sécurité (CNS, qui coordonne tous les services secrets du pays). Fils d’Emma Rose Ngoulakia, la sœur aînée de Patience Dabany, Léon-Paul Ngoulakia est le cousin germain du chef de l’Etat. Lors de la présidentielle anticipée de 2009, il en était le coordonnateur du cabinet de campagne électorale, directeur de campagne pourrait-on dire.
Intervenue alors que la famille était en réunion de crise à Franceville, cette démission pourrait ouvrir la voie à d’autres dans la province du Haut-Ogooué. Il se raconte que Pascaline Mferri Bongo a été urgemment dépêchée en Italie en vue d’obtenir de Ngoulakia le retrait de sa démission du PDG. En attendant, Jean Boniface Assélé a condamné «l’acte suicidaire que vient de poser monsieur Léopold Ngoulakia.»