Au-delà de ce que l’on peut penser du phénomène de la pauvreté qui accable un bon nombre de Gabonais, ou encore des spécificités subjectives qu’on peut attribuer à cette situation sociale, la précarité au Gabon présenterait des caractéristiques blâmables, selon les conclusions d’une étude réalisée, entre octobre et décembre 2013, par le cabinet McKinsey & Company qui indique un besoin annuel de 110 milliards francs CFA pour éradiquer la pauvreté.
Selon les conclusions de l’étude sur l’état de la pauvreté au Gabon, commandée par le couple présidentiel, Ali et Sylvia Bongo Ondimba, en dépit du bon niveau global de développement humain que présente le Gabon aujourd’hui, le pays connaîtrait des inégalités persistantes au sein de la population, et un net décrochage sur un certain nombre d’indicateurs sociaux.
Menée dans 48 départements du Gabon comparativement avec 25 autres politiques d’aides sociales, réparties sur 23 pays dans 4 continents, dont 8 pays ont fait l’objet d’une étude plus approfondie, à savoir : le Brésil, le Rwanda, l’Île Maurice, le Mexique, le Maroc, la Jamaïque, l’Equateur et l’Argentine, l’étude du cabinet McKinsey & Company a permis de caractériser le phénomène sur la base de deux principaux axes : une cartographie de la pauvreté et une cartographie de l’accès aux minima sociaux et infrastructures de base.
Selon la méthodologie utilisée par le cabinet McKinsey & Company, la cartographie de la pauvreté a consisté à analyser la répartition des Foyers économiquement faibles (ou FEF), ainsi que la répartition géographique du taux de pauvreté. Pour ce faire, de nombreuses informations ont été compilées, à partir notamment de bases de données nationales, telles que les données de la CNAMGS, l’enquête gabonaise pour l’évaluation de la pauvreté (EGEP 2005) ou des données issues du recensement de 2003.
Ainsi, selon le rapport final intitulé «Stratégie d’investissement humain du Gabon», «le Gabon présente une importante proportion de Foyers économiquement faibles percevant moins de 80 000 FCFA par mois. Ces Gabonais sont aujourd’hui environ 95 000, soit 30% de la population gabonaise qui perçoit des revenus sept fois inférieurs à la moyenne nationale. L’analyse de ces foyers révèle sept segments particulièrement fragiles : les familles avec enfants (comprenant aussi les familles monoparentales), les mères célibataires, les personnes âgées, les veuves, les personnes handicapées, les étudiants isolés, et les orphelins et enfants des rues».
De même selon la même étude, «le nombre de personnes en situation de pauvreté est équitablement réparti entre milieux urbain et rural, mais le taux de pauvreté est plus élevé en milieu rural. Ainsi, 55% des FEF vivent dans 6 départements essentiellement urbains quand 45% des FEF sont recensés dans des départements essentiellement ruraux. Dans les villes, les FEF se concentrent en particulier (environ 60%) dans des arrondissements périurbains, souvent peu intégrés sur le plan économique et social. Le taux de pauvreté des villes (c’est-à-dire le nombre de personnes pauvres rapporté au nombre d’habitants) est cependant limité à 20%, quand le taux de pauvreté des campagnes est bien plus élevé et atteint 45%».
S’agissant de l’accès aux minima sociaux et aux infrastructures de base, 11 indicateurs ont été utilisés pour chacun des 48 départements du Gabon, recouvrant les dimensions de l’accès à la santé, l’éducation, aux services publics et aux infrastructures de base. Selon le rapport, «la situation des FEF est aggravée par un accès limité aux services sociaux et publics de base. Et 60% des départements, soit 28/48 sont en décrochage sur ces services».
Sur la base de la nouvelle stratégie d’investissement humain du Gabon, les dirigeants entendent renverser la tendance par l’éradication pure et simple de ce malaise social. Reposant sur une politique intégrée autour de 4 volets complémentaires : des «filets sociaux», des activités génératrices de revenus (AGR), le développement de l’accès aux services de base, et le déploiement d’infrastructures d’intégration économique et sociale (en urbain et en rural). Le remède à la pauvreté et à la précarité au Gabon nécessite une enveloppe budgétaire de l’ordre de 80 à 110 milliards francs CFA par an.
Il s’agira de multiplier par deux les revenus des foyers économiquement faibles via les aides directes, de créer environ 10.000 projets d’autonomisation sur tout le territoire en 5 ans, notamment dans les domaines de l’agriculture, de la pêche, l’artisanat, le tourisme, etc., d’initier la mise en place de 15 à 20 infrastructures d’accueil pour les segments les plus fragiles (personnes âgées, orphelins, handicapés) et la mise à niveau de 25 départements sur l’ensemble des indicateurs sociaux (santé, éducation, logement…).