Le porte-parole de la présidence de la République a tenu à livrer son appréciation au sujet de la xénophobie des Gabonais évoquée par Jeune Afrique. C’était le 8 septembre courant.Interrogé, le 8 septembre dernier lors de sa traditionnelle conférence de presse, sur la xénophobie des Gabonais évoquée par Jeune Afrique, Alain-Claude Billie-By-Nzé s’est étendu sur cette affaire qui fait couler encre et salive. Ci-après, le verbatim intégral de sa réponse :
«S’agissant des hommes de la présidence qui, pour beaucoup, effectivement, subissent de graves altérations de la part de Jeune Afrique, vous avez raison, il n’y a eu aucune réaction officielle et nous le déplorons. Le ministère Garde des Sceaux a encore le temps de réagir. Mais, lorsque vous le soulignez, c’est parce qu’il s’agit d’un journal qui n’est pas gabonais. Lorsque les journaux gabonais bafouent, tous les jours, les symboles de la République et les institutions, vous ne réagissez pas. Là aussi, il ne faudrait pas que nous ayons des réactions à géométrie variable. On doit fixer une ligne que tout le monde doit respecter : que ce soit les journaux gabonais ou étrangers. Les symboles de la République, on n’y touche pas. Là, pour le coup, vous avez raison. Ceci est inacceptable et il faut une réaction officielle. Il y a encore le temps de réagir et de protester.
Sur la question de fond, est-ce que le Gabon est un pays raciste ? Je comprends que les Gabonais aient pu être choqués. Moi, le premier. Effectivement, le dire à la Une d’un hebdomadaire panafricain, a quelque chose de choquant. Mais dans le même temps, si vous avez un regard objectif sur vos propres journaux que nous lisons au Gabon, sur certains discours qu’on entend au Gabon, tenus par une certaine opposition, tout observateur étranger se poserait cette question. Le Gabon n’est-il pas devenu un pays raciste ? Parce que nous avons des journaux, ici au Gabon, qui, tous les jours, titrent sur la question de l’étranger. L’étranger qui dirige, l’étranger qui décide, et l’observateur lit ça. Il peut légitiment se poser la question de savoir si le Gabon est devenu raciste.
Lorsque des hommes politiques, dans notre pays, font de la question de l’étranger un projet ; lorsque dans un pays, on a inventé la question de la légion étrangère pour désigner les compatriotes d’origine étrangère, comment ne voulez-vous pas qu’on se pose la question de savoir si le Gabon est devenu raciste ? Le Gabon n’a jamais été raciste. Le Gabon a toujours su intégrer des communautés qui arrivaient d’Europe ou d’Afrique. Nous avons des familles entières ici dont les enfants sont parfois nés et ont fait leurs carrières au Gabon jusqu’au sommet de l’administration. Les Mamadou Diop existent, personne n’a jamais posé cette question, les Bâ Oumar existent… Toutes les familles dont les noms sont à consonance étrangère… On a connu, pendant de longues années, l’équipe nationale de football, Azingo, qui avait pour capitaine François Amégasse, cela n’a jamais posé de problème. Il a d’ailleurs été élu meilleur joueur gabonais de tous les temps. Ça n’a choqué personne parce que le Gabonais n’est pas raciste, tribaliste ni xénophobe.
Mais il faut bien reconnaître que depuis quelques années, il y a bien des dérives qui doivent tous nous interpeller. Et lorsqu’en septembre 2012, le président de la République s’est rendu devant le Parlement pour interpeller les députés et sénateurs, pour demander qu’une loi soit votée contre la xénophobie, le tribalisme, le racisme, certains ont estimé que le chef de l’Etat voulait protéger les uns et les autres. On en est où aujourd’hui ? Il y a un vrai problème, il y a un vrai malaise. Vous ne pouvez plus ouvrir un journal sans la question des étrangers. Reconnaissez qu’il y a malaise et que ce malaise a un nom et qu’il y a des partis politiques qui ont trouvé en cela un terreau pour prospérer. Quand vous lisez les réseaux sociaux, c’est la haine contre les étrangers. Lorsque dans un pays, on brûle une ambassade parce qu’il y a un leader politique qui est décédé, et qu’il y a aucun lien avec l’ambassade qu’on a brûlé, que pensez-vous que va croire l’observateur étranger ? Quand on arrive dans un pays, on lit la presse, on écoute les conversations et on en tire des déductions. Plutôt que de s’en prendre à ceux qui ont écrit cela, il faut s’interroger soit même.»
