Affirmant que le pays est dans une «situation intenable», l’évêque et homme politique estime que seule une concertation nationale peut permettre au pays de se relancer.Se présentant comme un «très proche de feu André Mba Obame», Mike Jocktane a effectué sa rentrée politique le 8 septembre courant à Libreville. Revenant sur le climat politique actuel, il a évoqué les maux qui concourent à la déliquescence des valeurs et contribuent au mal-être des Gabonais. Cette sortie a eu le mérite de lui permettre de faire davantage part de son «sentiment sur la situation intenable» vécue depuis six ans. «Une situation qui n’est pas à notre avantage, pour nous les partisans du changement. Une situation qui est disséquée par tout ce que le Gabon compte d’experts en économie et en politique, une situation qui est relayée très largement dans tous relais d’informations et de communication, notamment dans les réseaux sociaux. Mais une situation de laquelle, avec détermination et courage, nous pouvons nous sortir si nous restons déterminés. J’en suis convaincu», a-t-il dit dans son propos liminaire.
L’évêque et militant de l’Union nationale (UN) estime qu’à 11 mois de la fin du mandat du président de la République, «l’état de la nation gabonaise se dégrade de manière irréversible». Il n’en veut pour preuve que la prise conscience de certains hiérarques du PDG. Voilà pourquoi, il en appelle au dialogue inclusif sans tabou. «Puisque nous entrerons bientôt en 2016, année de la future élection présidentielle, je lance un ultime appel à Ali Bongo, afin qu’il comprenne enfin l’urgence de ce dialogue politique. Ce rendez-vous exceptionnel sera l’occasion de discuter enfin, ensemble, des problèmes de notre pays aux plans politique, économique, social et culturel», a-t-il déclaré. Mike Jocktane exclut cependant un dialogue dans le cadre du Conseil national de la Démocratie (CND).
Pour lui, il faut un espace neutre où tous les protagonistes auront leur mot à dire. «Le Gabon a besoin d’une ambition nouvelle. Nous devons lui présenter une offre politique originale. Je plaide donc en faveur d’un nouveau système politique. Les élections de 2016 seront peut-être l’occasion de la recomposition de la vie politique. Nous devrons dès que possible pouvoir nous rassembler autour des valeurs de modernité, d’authenticité, de liberté et de progrès», a-t-il soutenu, indiquant défendre un certain nombre d’idées, notamment la limitation du nombre de mandats présidentiels et le retour au scrutin à deux tours. «Nous sommes nombreux déjà et dans tous les bords politiques à militer pour un régime avec des pouvoirs équilibrés, associant différents acteurs à l’exercice du pouvoir. Un régime avec des élections politiques à deux tours, la limitation du nombre de mandats présidentiels, garantissant au Chef de l’Etat véritablement élu, une légitimité synonyme d’acceptation par le peuple. Le Gabon doit devenir une vraie démocratie avec une présidence de la République forte mais aux antipodes de l’hyper-présidence actuelle, qui confère paradoxalement au président de la République, l’omnipotence, l’irresponsabilité mais la permanence au pouvoir», a-t-il lancé, laissant entendre que sa responsabilité est de proposer un Pacte républicain pour une société plus juste, ouverte, où la différence d’opinion sera considérée comme une source d’enrichissement. Ce faisant, il a indiqué son adhésion au principe de primaires au sein de l’opposition.
S’appuyant sur son statut d’homme d’église et, par conséquent, d’autorité morale, il a expliqué que sa responsabilité lui commande de comprendre non seulement la misère de plus en plus accablante du peuple, mais également les raisons de celle-ci. «L’indifférence complice ne peut plus être une attitude acceptable. J’ai fait le choix de réagir et de répondre», a-t-il martelé, se prononçant pour une action volontaire en vue de «réinventer l’unité nationale, gravement affaiblie, ces temps derniers, par une gouvernance politique fondée sur le règne d’une minorité de nantis défiant la République et son idéal et prônant au contraire et seulement la loi du plus fort». «Je voudrais que pour chaque Gabonaise et chaque Gabonais le dépassement de soi puisse être possible. J’aimerais que le goût de la liberté soit plus fort que la peur de l’échec. Je souhaiterais que vous soyez toujours fiers d’être Gabonais», a-t-il exhorté quelque peu lyrique.
Revenant sur André Mba Obame, il a indiqué que ce dernier a mené avec courage, détermination et patriotisme, le noble combat pour la restauration de la République et la grandeur du Gabon éternel, souvent dans des difficultés extrêmes et ce jusqu’au sacrifice de sa vie. «Le Gabon tout entier a su à l’occasion des obsèques historiques de notre grand leader se rassembler pour lui rendre un hommage plus que mérité», a-t-il fait remarquer, avant d’appeler à la mobilisation générale du «peuple d’Amo pour faire aboutir son ambition dans les délais les plus brefs». «Je l’ai déjà dit et je le dis encore j’irai jusqu’au bout», a-t-il conclu.