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Akanda : Touche pas à mes terres !
Publié le lundi 24 aout 2015   |  Gabon Review


Akanda
© Autre presse par DR
Akanda : Touche pas à mes terres !


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Bravant l’interdiction du ministère de l’intérieur, les communautés locales du 1er arrondissement de la commune d’Akanda ont organisé une marche de protestation, le samedi 22 août 2015, en vue de dénoncer les appropriations abusives de leurs terres. Un signe du «scandale écologique et foncier», prédit par André Mba Obame ?

Il est 8 heures du matin. Des camionnettes remplies des personnes vêtues de blanc font des va-et-vient entre les différents villages du Cap Estérias et ses environs pour emmener les populations au stade Papa Ndjoni. Il n’y a pourtant pas de match de football en préparation. Il y a tout simplement que c’est dans l’enceinte sportive du premier arrondissement que les habitants se sont donné rendez-vous, pour lancer une marche de protestation contre les appropriations abusives des terres de la localité.

À 10 heures une rumeur se répand dans les lieux : « La marche n’a pas reçu l’autorisation du ministère de l’Intérieur», dit-on ci et là. Les organisateurs se concertent. La tension monte d’un cran. Près de 1000 personnes sont déjà au stade Papa Ndjoni. Après une trentaine de minutes de flottement, les organisateurs décident de délocaliser la marche vers Bolokobouet : théâtre des ventes illicites des terres et appropriations abusives. C’est le soulagement général du côté des autochtones, qui s’impatientaient déjà.

À 11 heures 15, les populations vont enfin lancer leur marche, du carrefour Bolokobouet jusqu’au lieu dit de la nouvelle chefferie Benga, bravant l’interdiction du ministère de l’Intérieur. Le roi des Benga, Marcel Nkombouet, entouré de ses conseillers est en tête du peloton. Derrière lui les gardiennes de la tradition et des centaines de jeunes en file indienne. Ils tiennent des banderoles sur lesquelles on peut lire : «Non aux appropriations abusives des terres», «Non aux SCI pour la vente voilée», «Non aux 40 hectares, 20 hectares, 80 hectares, jusqu’à 240 hectares» ou «Oui aux projets qui tiennent compte des populations locales».

Après 35 minutes de marche dans la forêt, le roi des Benga s’adresse à son peuple. Il invite les siens à «la protection de la nature, pour la préservation des plantes médicinales et des écosystèmes», dénonçant l’activité mafieuse de ceux qui, au mépris des lois de la république et de l’autorité des chefs traditionnels, se sont lancés dans le juteux commerce illégal des terres. «La marche de ce jour est une marche d’avertissement. Nous voulons marquer notre opposition aux appropriations illégales des terres et à la vente illégale des parcelles», martèle Marcel Nkombouet. Premier conseiller du roi, Pablo Oupolongo promet pour sa part des poursuites judiciaires contre tous ceux qui se rendront, dans l’avenir, coupables d’actes liés au commerce illégal des terres. Et d’inviter également ceux qui possèdent des centaines d’hectares de terres au détriment des populations, de rendre à l’Etat, une partie de leur patrimoine foncier, très souvent acquis dans des conditions douteuses.

Suspicion

Bon nombre d’habitants de la commune d’Akanda, rencontrés ce samedi indexent la responsabilité des agents de l’Agence nationale de l’urbanisme et des travaux topographiques (ANUTT) quant au «désordre foncier» à l’origine de la manifestation du jour. «C’est l’ANUTT qui délivre les papiers à ceux qui disposent des centaines d’hectares de terre», vocifère un habitant courroucé. Info ou intox ?

Une chose est sûre : créée dans des conditions troubles et pour des raisons mal définies, la commune d’Akanda suscite, depuis deux ans, craintes et suspicions de la part des premiers habitants de cette zone. «Nous assisterons au plus grand scandale écologique et foncier de notre pays. Ce que vise le pouvoir […] à Akanda, ce sont les terres pour faire de la spéculation immobilière et rien d’autre», avait prédit André Mba Obame, en décembre 2013, dans une interview au journal Echos du Nord. Une suspicion confortée par la présence, la même année, dans la liste du parti au pouvoir pour les élections municipales dans la commune d’Akanda, «du promoteur immobilier Claude Sézalory, du directeur général de l’ANUTT, Auguste Akomezogho, ainsi que de Pacôme Moubelet, coordonnateur de la cellule censée réfléchir à la formulation du plan national d’affectation des terres», faisait alors remarquer un membre de la société civile.

Dès mars 2014, les populations de la zone dénommée «Premier campement» avaient manifesté pour dénoncer la volonté des «riches» de s’imposer sur les terres des «pauvres». Elles étaient alors menacées de déguerpissement, leurs terres, disaient-elles alors, étaient sujettes à une forte spéculation foncière entretenue par des visites inopinées d’huissiers de justice mandatés par des promoteurs immobiliers dont la plupart prétendaient être propriétaires ou simplement réservataires de lotissements. La spéculation foncière soupçonnée devenait réelle et elle semble ne s’être jamais arrêtée, les populations indiquant toujours des menaces de déguerpissement.

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