La Prime d’incitation à la Performance (PIP), pièce maîtresse, selon Ali Bongo, de la stratégie de lutte contre la baisse du pouvoir d’achat des agents de l’Etat, n’aura donc vécu qu’une année ! Du coup, «on va retomber sur la situation d’avant : certains ont des primes et des fonds communs, d’autres se contenteront uniquement des augmentations de salaire», pense un leader syndical.
Le communiqué du Premier ministre, publié dans le quotidien L’Union le week-end dernier, a surpris plus d’un. D’abord parce qu’il annonçait, en pleine année budgétaire, que la PIP était supprimée. Or, lorsqu’une ligne budgétaire est prévue pour une dépense, on la tient toute l’année, sauf abrogation par une loi de Finances rectificative. Or, de loi de Finances rectificative, il n’y a point. Du moins, pour le moment.
Ensuite, parce que le Premier ministre a grossièrement menti en disant dans ce communiqué que «la Prime d’incitation à la Performance a été instituée en attendant la mise en œuvre du nouveau système de rémunération». Ce qui n’est pas vrai. La mise en place de la PIP répondait plutôt à un souci du chef de l’Etat : celui de mieux redistribuer les ressources financières de l’Etat. Ali Bongo Ondimba avait affirmé, le 18 février 2014 à la présidence de la République lors d’une rencontre avec les responsables des partis politiques, qu’il n’était pas normal que certains agents de l’Etat aient des primes, et d’autres pas. Dans la foulée, il avait alors annoncé la création de la PIP. Il ne s’agissait pas, contrairement à ce qu’affirme Daniel Ona Ondo dans son communiqué, de créer une prime provisoire dans l’attente de la mise en œuvre d’un nouveau système de traitement des fonctionnaires. Il s’agissait de répartir les primes à l’ensemble des agents publics. En tout cas, c’est ainsi que l’avait présentée le chef de l’Etat lors de sa mise en place.
Enfin, prendre une telle décision avant la fin de l’année budgétaire est au mieux une conséquence de la mauvaise gestion de cette prime trimestrielle, au pire la preuve que le gouvernement Ona Ondo n’a pas su en maîtriser les mécanismes. «Cette décision, est la preuve d’un pilotage à vue», estime un fonctionnaire, membre dirigeant de l’un des syndicats du ministère des Travaux Publics.
Après le conseil des ministres du 12 août dernier qui n’a nulle part délibéré sur l’abolition de la PIP, et après le discours à la Nation d’Ali Bongo à l’occasion du 17-Août, au cours duquel le chef de l’Etat n’en a pas fait état non plus, on se demande, dans l’opinion, pourquoi c’est un communiqué du Premier ministre qui annonce la suppression de la PIP. Comme si ce communiqué avait été signé en catimini par le chef du gouvernement.
Si les syndicats de l’administration publique n’ont pas encore réagi à cette décision du Premier ministre, il reste qu’on ne sait pas si cette annonce avait été faite par Daniel Ona Ondo aux responsables des organisations professionnelles membres de la Dure (Dynamique unitaire responsable) lors de l’entretien que les deux parties ont eue début-août. On ne sait non plus si le chef du gouvernement en a informé les organisations syndicales de la sphère publique, mais de nombreux agents publics ont le sentiment que le Premier ministre a pris une décision sans avoir pris en compte l’ensemble des questions relatives à cette prime. Et il se retrouve seul face à cette décision, le chef de l’Etat n’ayant pris sur lui, le 17 août, de ne parler que de la mise en place, le 24 juillet dernier, du nouveau système de rémunérations.
La question que se posent certains fonctionnaires est celle liée au retour des fonds communs dans les régies financières et apparentées, et à la résurgence des primes que certains ministères (Forêt, Commerce, Agriculture, Marine Marchande,…) percevaient. En clair, demandent-ils, «est-ce qu’on repart comme en l’an 40 ?» Quelques petites primes à certaines administrations, et les fonds communs aux ministères financiers ?