Cinquante-cinq ans après l’accession à l’indépendance, y a-t-il des raisons de se réjouir ? Pour bon nombre de personnes, on peut répondre par la négative.
Le Gabon a célébré le 55e anniversaire de son indépendance dans la sobriété. Seules les principales artères de la capitale ont bénéficié d’un pavoisement susceptible de dissimuler le malaise qui accable le pays. Quelle appréciation faites-vous du Gabon, après plus de cinquante années de souveraineté ? C’est la question que le reporter de Gabonreview a posé à certaines personnes à l’issue de la parade militaire organisée le 17 août courant.
Pour le président du Mouvement d’émancipation socialiste du peuple (MESP), Jean-Victor Mouang Mbading, l’indépendance ne devrait pas seulement être un mot, comme il semble l’être pour certains dirigeants africains en général et gabonais en particulier. Elle doit avoir un contenu, politique, économique, social et culturel. «Nous avons toujours observé l’attentisme devant l’étranger. Ce qui fait que le Gabon a perdu ses moyens économiques par la voie de privatisation. Nous avons tenté sous Omar Bongo de corriger le tir en nationalisant les entreprises, mais sous la houlette des puissances étrangères et l’immobilisme du pouvoir devant l’étranger on nous a enlevé toutes nos entreprises», a-t-il déploré, qualifiant le Gabon de «néo-colonie». «La différence entre la colonie et la néo-colonie est que la deuxième dépend de plusieurs puissances à la fois. Et c’est le cas du Gabon qui est un multiple esclave».
«Cette évaluation n’est pas très positive, parce que dans les faits, il n’y a pas d’indépendance. Tout ce qui a été dit sur ces 50 années d’indépendance n’est que mensonge. Il n’y a véritablement eu aucune indépendance. Il y a eu une parodie d’indépendance, alors qu’une véritable indépendance aurait impliqué un retour à ce qu’il y avait avant le colonialisme», a affirmé Igor Nzé, administrateur municipal. «Nous ne sommes indépendants que sur le papier. Nous n’avons pas eu le choix de nos visions, de nos politiques», a poursuivi Judes Nganga, pompiste.
Cependant, Elisabeth Moussavou, enseignante de lycée, pense que l’anniversaire doit être commémoré malgré tout, ne serait-ce que pour «rendre compte de cette histoire et l’expliquer à la jeune génération». Cette jeunesse en grande partie désœuvrée qui est à la fois «sacrée» et «sacrifiée» sur l’autel des appétits et intérêts égoïstes de certains responsables.