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Littérature : Mouguiama-Daouda dézingue la méthode Péan
Publié le vendredi 10 juillet 2015   |  Gabon Review


Patrick
© Autre presse
Patrick Mouguiama-Daouda


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Dans son ouvrage «Un silure dans la nasse. Approximation, manipulation et posture coloniale dans les Nouvelles affaires africaines de Pierre Péan», le conseiller d’Ali Bongo essaie de détruire le cheminement du journaliste-écrivain français.

La poussière s’étant quelque peu dissipée, le ton des attaques et le principal sujet de débat s’étant visiblement assoupi, les plumes s’affairent et des collaborateurs du président de la République, parmi lesquels Patrick Mouguiama-Daouda, peuvent se permettre de sortir du bois. Objectif : livrer leur appréciation après le tumulte des jours de marché. Parce que «le temps de l’actualité n’est pas le temps de la science», diront certains. Et la science, le conseiller spécial d’Ali Bongo l’a clairement revendiquée, le 8 juillet courant, lors de la présentation de son ouvrage intitulé «Un silure dans la nasse. Approximation, manipulation et posture coloniale dans les Nouvelles affaires africaines de Pierre Péan», publié en juin 2015 aux Editions du silence. Un livre à charge contre les méthodes d’«enquête» et les «révélations» contenues dans l’avant-dernier ouvrage du journaliste-écrivain français.

Pierre Péan, le silure ?

Sur 200 pages d’un livre considéré comme «une commande» de la présidence de la République, lassée par les attaques, alors que l’auteur s’en défend vivement, au point d’en perdre son calme, Patrick Mouguiama-Daouda dépeint Pierre Péan comme «un péripatéticien de la plume et un faux-monnayeur, qui semble n’avoir de comptes à rendre à personne».

Préfacé par Mactar Sylla, un autre proche collaborateur du président de la République, le livre, dès son premier chapitre intitulé «Pierre Péan, ses livres et le Gabon», refait, d’une certaine manière, la biographie du journaliste-écrivain français, passe en revue ses différentes activités professionnelles, ébauche son cursus scolaire, présente les personnes dont il est réputé proche et qui l’ont accompagné tout au long de son parcours, son implication souvent officieuse et calculée dans la vie publique gabonaise. Des «révélations» importantes qui permettront de comprendre «les relations ambiguës de Pierre Péan avec le pouvoir politique», et de cerner «les vraies raisons des affabulations du personnage qui se définit comme un journaliste d’initiative». Or, selon Mouguiama-Daouda, un brin triomphal, «il a été saisi grâce à une ligne de fond et une nasse».

Mouguiama-Daouda, la nasse ?

Pour tenter de briser le silence dont il accuse les intellectuels gabonais face aux questions sociales et se faire sa propre opinion, «Un silure dans la nasse. Approximation, manipulation et posture coloniale dans les Nouvelles affaires africaines de Pierre Péan» se veut «une analyse scientifique», qui entend «mettre à nu toutes les faiblesses de l’ouvrage de Pierre Péan, en suivant une méthode scientifique et en prenant le lecteur par la main pour le guider dans son œuvre afin de mieux comprendre sa démarche et ses desseins inavoués». «Je suis un universitaire qui doit dénoncer une méthode aboutissant à des livres mal écrits mais bien vendus : c’est l’exigence d’orthodoxie méthodologique et de rigueur épistémologique», a déclaré le conseiller spécial d’Ali Bongo, tentant de justifier sa prise de position.

Parmi les reproches faits à «la méthode Péan», Mouguiama-Daouda note les approximations, inexactitudes, la subjectivité, les témoignages douteux, qui mettent assez rapidement à l’épreuve le «journalisme d’initiative ou journalisme d’enquête» dont se réclame l’écrivain français, au détriment du «journalisme d’investigation». S’interrogeant sur le véritable positionnement de Péan, que d’aucuns pourraient classer parmi les écrivains, les essayistes libres ou les essayistes scientifiques, il estime que l’auteur des «Nouvelles affaires africaines», «se situe dans un entre-deux, à la frontière de différentes professions, pour justement se mettre à l’abri des exigences et du jugement de chacune d’entre elles. Ce positionnement contient en lui les germes de la manipulation. Insaisissable, le silure peut ainsi nager dans toutes les eaux, avec une préférence pour celles qui sont troubles».

Critiques

Si le livre de Patrick Mouguiama-Daouda peut se lire d’une traite, en raison d’un style fin, d’une compréhension facile, le ton et le sujet abordé ne peuvent pourtant échapper à l’œil des lecteurs avisés : la «réponse» du conseiller spécial d’Ali Bongo au journaliste-écrivain français est peu éloignée de celle dite «épidermique» reprochée à «Nouvelles affaires africaines. De même, si dans sa postface l’ouvrage aborde, avec un courage peu commun, la question de l’immigration, en décidant à sa façon de jeter un pavé dans la marre, il n’en reste pas moins abstrait. Des noms de personnalités sont cités et quelques évènements marquants de l’histoire du Gabon sont rappelés, sans véritablement mettre l’accent sur l’une des principales questions évoquées par Péan : la supposée adoption d’Ali Bongo par Omar Bongo Ondimba, celles d’autres individus cités par le français et la véracité ou non d’autres faits, notamment les assassinats de certaines personnalités supposées gênantes. L’auteur se contente de rapporter des rumeurs qu’il fustige, non sans mettre en garde l’opinion sur la dangerosité des notions telles que «Gabonais de souche», «Gabonais d’origine étrangère» ou «faux Gabonais». Bonne lecture !

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