Non pas que nous ayons fondamentalement été surpris par l’annonce jeudi dernier de la démission au sein du Parti démocratique gabonais (PDG), de l’ancien Premier ministre gabonais Raymond Ndong- Sima, puisque cela se susurrait depuis quelques temps avec insistance, y compris sur la place publique à Libreville surtout où vit l’essentiel de la classe politique du pays, mais reconnaissons que ce départ a une signification profonde qui contraste peut- être avec beaucoup d’autres.
Et le deuxième Premier ministre d’Ali Bongo Ondimba, un homme du reste copté par les notables de sa province du Woleu- Ntem dans le nord du Gabon et ne figurant pas sur la tablette des militants de la première heure, s’en est allé ! Raymond Ndong Sima dont le siège de député du canton Kyé est de facto remis en jeu comme l’exige la loi électorale, n’est pas à proprement parler un homme politique puisque tout le monde sait au pays qu’il a fait ses armes en tant qu’enseignant d’économétrie, technocrate et homme d’affaires, des stades de sa vie dans lesquels il s’est fort bien illustré. Ce qui ne devrait pas à priori lui créer de soucis, s’il s’agit simplement de revenir à ses anciennes amours.
Mais, là où le bât peut blesser, c’est qu’il choisisse de se muer en opposant comme l’ont fait la plupart de ses frères qui ont claqué la porte du parti au pouvoir pour des raisons s plus ou moins similaires, à savoir le manque d’impartialité dans la partage du gâteau laissé par feu Omar Bongo Ondimba. Non, faut- il reconnaître, Ndong Sima a d’ailleurs recensé les raisons qui l’ont poussé à se désolidariser d’Ali Bongo Ondimba dans son oeuvre « Quel renouveau pour le Gabon ? », un brûlot dans lequel il ne va pas avec le dos de la cuillère quand il s’agit de passer en revue les faiblesses du système Ali, partant de celle qui fait état de l’absence de marge de manœuvre du chef du gouvernement du moins, tant qu’il en assumait les fonctions. Et en parlant d’avenir, l’on peut lui reconnaître comme le sphinx sa grande capacité à renaître de ses cendres tant tous ses compatriotes l’ont vu quitter la craie à l’Université Omar Bongo de Libreville pour occuper plusieurs fonctions importantes dont il est parti avec des fortunes diverses pour se reconvertir en homme d’affaires prospère.
Est- il prêt à tout recommencer, même s’il est vrai qu’il en a suffisamment mis de côté, quand on sait la dégringolade qui guette la plupart des anciens barons du parti démocratique gabonais dès qu’il choisissent de quitter leurs camarades et la formation politique née au bord du fleuve Bouenguidi à Koulamoutou, dégringolade causée par des facteurs, on le comprend aisément, exogènes. Il ne serait pas facile pour qui le connait de briguer un quelconque poste politique, y compris dans les instances dirigeantes de l’opposition, car l’homme ne draine pas, au contraire de bien d’autres, des foules et ne semble pas communiquer avec dextérité et abondamment quitte à mentir, or cet art fait partie de l’essentiel en politique sous les tropiques.
Le départ de Raymond Ndong Sima ne va pas forcément avoir un réel impact sur la vie du PDG qu’il ne menace pas de fragiliser, son poids politique étant discutable, puisque ne jouissant pas surtout à l’heure qu’il est d’une grande côte de popularité dans sa province d’origine. Pour ne nous arrêter qu’à cet exemple où par expérience l’on sait que beaucoup de ses frères d’Oyem demandaient d’ailleurs avec beaucoup d’insistance son limogeage du poste de Premier ministre. Par contre, il pourrait se reconvertir à nouveau en homme d’affaires, mais aura-t-il le même entrain que par le passé s’interrogent les observateurs qui s’appuient sur l’argument selon lequel quand quelqu’un a goûté à la politique sous nos cieux, il a du mal à s’en défaire. L’opposant gabonais Jules- Aristide Bourdès Ogoulinguendé, ne l’avait- il pas qualifié de drogue ? Mais si Ndong Sima va « naïvement » à l’Union nationale, est-il sûr qu’avec les problèmes qui se posent déjà à l’ancien président de la Commission de l’Union africaine, Jean Ping, sa voix comptera pour quelque chose ? Nul n’étant infaillible, l’ancien Premier ministre obéira-t- il à sa propre conscience ou penchera-t-il pour des idéaux importés provenant par exemple de ses proches ou de toute personne pouvant exercer sur lui une quelconque influence idéelle bien que de par sa formation en arts martiaux, il en soit arrivé à une parfaite maîtrise de soi ?