L’image n’a pas échappé à grand-monde. Diffusée en direct sur les médias français, François Hollande et ses invités parmi lesquels Ali Bongo, seul chef d’Etat africain visible aux premières loges, sont plutôt d’humeur rieuse et s’adonnent à des blagues, comme pour détendre l’atmosphère, alors que l’un et l’autre sont l’objet d’une sorte de bashing (ou critique véhémente) dans leurs pays respectifs. Seulement, le sujet qui semble susciter moquerie et ambiance bon enfant entre ces dirigeants et les responsables de la société Dassault Aviation et du groupe Airbus fait moyennement rire les Gabonais. Et pour cause, prétendent les plus pessimistes, «le pays est au bord de la crise budgétaire bien que le pouvoir en place s’échine à attester du contraire».
Alors que la presse malienne a annoncé, le 15 juin courant, la signature d’un contrat entre son ministère de la Défense et l’entreprise Embraer Defence & Security, pour l’acquisition de six avions d’entraînement avancé et d’attaque légère A-29 Super Tucano, Ali Bongo et François Hollande s’amusaient sur un hypothétique achat par l’Etat gabonais d’un Rafale à un prix plus ou moins abordable. «Comme prévu, ils vont te faire un prix», a lancé le président français, dont l’humour est bien connu, à l’endroit de son homologue gabonais, avant de partir dans un éclat de rire lors de la démonstration aérienne inaugurale du Salon du Bourget, comme un message subtil envoyé à Eric Trappier et Serge Dassault, assis près d’eux. Si le ton était à la plaisanterie, sans que la blague de François Hollande n’ait réellement été prise au sérieux par les responsables de l’avionneur, au Gabon, le sujet a fait frémir certains. D’autant qu’avec l’affaire liée à la récente acquisition du biréacteur G650 N637GA (6137), les pouvoirs publics sont de plus en plus perçues comme de gros dépensiers.
Après les Gulfstream G2 TR-KHB (127), G3 TR-KHC (326) et G4 TR-KSP (1327), les populations se demandent désormais à quoi servirait un avion Rafale au Gabon. Quelle serait sa véritable utilité pour la flotte militaire gabonaise, alors que le pays est incapable de faire revivre sa compagnie aérienne civile ? Autant de questions et d’inquiétudes qui renvoient aux prix des appareils que le VRP français a donnés à voir à ses invités. Avec des coups de production évalués à 73 millions d’euros (environ 49 milliards de francs) pour le Rafale B, 68 millions (environ 45 milliards de francs) pour le Rafale C et 78 millions (environ 52 milliards) pour le Rafale M, le Gabon est-il en mesure de faire l’acquisition d’un seul de ces avions, compte tenu du contexte de crise actuelle ? Dassault Aviation, fera sans nul doute «un prix»….