Professionnel uniquement de nom, selon l’avis de plusieurs observateurs, le championnat national de football vivrait ces dernières heures avec la fin annoncée de la subvention étatique. Passage en revue d’une compétition condamnée dès son lancement.
Censé apporter du divertissement lors de sa diffusion, ou alors procurer du plaisir dans les stades, le championnat national de football peine à trouver ses marques. Et pour cause : chaque week-end, depuis son lancement en mars dernier, le National-Foot réunit à peine une centaine de personnes dans les gradins et fait pâle figure face au spectacle proposé par les championnats étrangers. Une situation que nombre d’observateurs impute à la mauvaise image du championnat, depuis sa «professionnalisation» au lendemain de la Coupe d’Afrique des nations (Can) 2012.
«Une belle farce», assurent les détracteurs de la compétition. Depuis 2012, le National-Foot souffre en effet de plusieurs maux avec en première ligne les difficultés structurelles, mais aussi l’amateurisme et l’éternel problème de détournements de fonds. Résultat des courses : la compétition est régulièrement interrompue depuis trois ans avec, en point d’orgue cette année, un début de saison 2014-2015 en mars dernier au lieu d’octobre 2014. Un contretemps dû au retard de la subvention versée aux clubs par l’Etat.
Concrètement les 422 millions de francs par mois à raison de 30,2 millions pour chacun des 14 clubs de première division ont tardé à venir. Or, cette manne permet aux équipes de s’acquitter de leurs obligations, notamment les déplacements, l’hébergement, la restauration et la paie des membres de l’encadrement technique et des joueurs, qui perçoivent chacun un salaire mensuel de 400 000 francs. Si l’on comprend mieux l’ampleur de la situation, et le caractère crucial de cette aide de l’Etat, qu’adviendra-t-il alors lorsque celui-ci fermera le robinet en 2017 ? Le processus de professionnalisation du championnat national de football prévoyant un sevrage de subvention à cet horizon, chacun des clubs doit, d’ores et déjà, y réfléchir. S’achemine-t-on purement et simplement vers la mort de la compétition en 2017 ? Pour les plus pessimistes, cette sombre perspective s’avère réaliste.
Charrue avant les bœufs
De nombreux observateurs estiment, en effet, que la charrue a été mise avant les bœufs et que ce championnat n’a de professionnel que l’intitulé. «La professionnalisation utopique du championnat répond à une logique financière permettant à certains membres de la galaxie présidentielle de s’enrichir en toute impunité (…) Le National-Foot a été le parfait alibi pour certains présidents de clubs véreux, qui s’illustrent par des détournements de fonds massifs», déplore une source proche du dossier, ajoutant que cette situation est facilitée par l’absence de traçabilité des subventions. Car, pour percevoir leurs subventions, les clubs doivent simplement s’acquitter de contreparties moindres comme disposer d’un terrain d’entraînement, d’équipes dans toutes les catégories (minimes, cadets, juniors et en deuxième division), d’une administration, d’un département comptable et d’un département de communication et marketing. A cette réalité s’ajoute la cacophonie au sein du triumvirat qui compose la cellule foot de la présidence de la République, à l’origine du lancement du championnat, chacun de ses membres étant à la tête d’un club. On note ainsi qu’Hervé Patrick Opiangah est le président du CF Mounana, Frédéric Gassita, celui du FC Akanda alors que Cédric Mpouho dirige l’AJA FC, qui a manqué l’accession en première division l’an dernier.
Au plan sportif, cette professionnalisation du football national n’a pas eu les effets escomptés. On remarque qu’aucun club national n’est présent en phase de poules des compétitions interclubs de la Confédération africaine de football (Caf) depuis 2005. Dans le même ordre d’idées, le quota de joueurs évoluant au pays et figurant en sélection nationale est quasi-insignifiant. Une remise en question de toutes les parties s’impose donc pour redéfinir les contours du championnat national de football. Car, l’on voit mal les clubs, à l’exception d’un ou deux, survivre à l’après-subvention, leur principal source de revenus à 99,99%, vu que les autres moyens de financement, notamment la vente de billets et les droits télé, sont insignifiants pour ne pas dire inexistants. Au regard de ce qui précède, il est indéniable que l’échéance 2017 sonne comme la mort pure et simple du football local, à moins d’un miracle. L’espoir fait vivre…
