Abidjan, Continent le plus exposé aux conséquences du changement climatique, l'Afrique possède pourtant un immense potentiel en matière d'énergies renouvelables, qui peut lui éviter de répéter les erreurs des pays développés en devenant un modèle de croissance verte.
"Nous avons une opportunité extraordinaire de voir un continent qui croît vite, croître de manière verte", s'enthousiasme Makthar Diop, vice-président de la Banque mondiale pour l'Afrique, interrogé par l'AFP.
"L"Afrique peut devenir un modèle à suivre", confirme Kurt Lonsway, directeur du département Environnement à la Banque africaine de développement (BAD), qui assure que le continent peut se développer "sans reproduire les conséquences négatives qu'ont connues les pays industrialisés".
Pour devenir un modèle, les pays africains ont cependant besoin de 45 milliards d'euros par an pour s'adapter au changement climatique, selon les Nations unies - une facture salée pour un continent qui ne contribue qu'à 4% des émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial.
Après quatre années de gestation, le Fonds vert pour le climat, promis par les pays industrialisés pour aider les pays pauvres, a reçu des moyens certes significatifs, mais encore insuffisants: 21 pays se sont pour le moment
engagés à verser près de 10 milliards de dollars.
"L'essentiel des financements pour lutter contre le changement climatique
vient encore des pays développés", déplore l'ex-ministre des Finances sud-africain Trevor Manuel, aujourd'hui co-président de l'organisation internationale Global Ocean Commission, qui lutte contre la dégradation des océans.
Mais pour Donald Kaberuka, le président sortant de la BAD, il est possible de trouver d'autres moyens de financement", en multipliant les "taxes carbone" ou les "taxes sur la marine marchande".
Face à la crise énergétique, qui coûte chaque année "2% de PIB" au continent selon M. Kaberuka, les pays pauvres ont aujourd'hui les moyens de lutter en proposant eux-mêmes des solutions durables.
Car "les énergies renouvelables ne sont plus aussi chères que par le passé", souligne Makhtar Diop, qui souhaite convaincre les investisseurs privés de soutenir des projets de plus grande envergure en Afrique.
- Pas un 'problème de riches' -
Des exemples à suivre existent sur le continent.
Le Cap Vert produit déjà 20% de son électricité grâce à l'éolien et espère atteindre 50% avant 2020, tandis que les Comores projettent d'alimenter tout le pays grâce à la géothermie. En Ethiopie, le gigantesque barrage de la Renaissance, financé par l'Etat, doit voir le jour en 2017 sur les eaux du Nil et apporter 6.000 mégawatts de courant pour toute la région.
Souvent présentée comme un problème de riches, la protection de l'environnement commence désormais à apparaître à l'agenda des gouvernements africains.
"Demandez aux Tchadiens qui ont vu leur lac pratiquement disparaître, s'ils ne se sentent pas concernés!", s'exclame Donald Kaberuka. "On peut concilier développement et protection de l'environnement, et d'ailleurs l'Afriqu commence à le faire!", renchérit Makthar Diop.
Plusieurs sommets sous-régionaux, à Djibouti et au Congo, ont été organisés cette année sur l'adaptation au changement climatique, preuve de la mobilisation de l'Afrique pour arriver au sommet sur le climat à Paris, prévu en décembre, avec une position commune.
Pour Trevor Manuel, il ne faudra plus seulement se contenter de "discuter", mais arriver "enfin à un accord contraignant".
Le but de la conférence sur le climat à Paris, organisée par l'ONU, est de parvenir à un accord pour limiter à 2 degrés le réchauffement climatique d'ici la fin de ce siècle par rapport à l'ère pré-industrielle.
Il y a urgence: les scientifiques estiment que les températures vont augmenter d'au moins 2 degrés en moyenne d'ici à la fin du siècle, exposant directement des millions d'Africains aux risques de submersion marine ou de sécheresses à répétition.