La sentence est tombée dans la matinée du dimanche 9 février 2014, au terme de la dernière séance consacrée au traitement des contentieux électoraux de décembre dernier. Le journaliste Jonas Moulenda d’Echos du Nord a été condamné à 6 ans d’inéligibilité par la Cour constitutionnelle.
Pour le journaliste Jonas Moulenda, la messe est dite. Du moins pour ce qui relève de sa participation à l’élection présidentielle de 2016 qui verra la reconduite ou non du « candidat naturel » du Parti démocratique gabonais (PDG), Ali Bongo, à la tête de l’Etat. Le journaliste, reconnu pour sa prose dans le domaine des Faits divers dont il a fait, au fil du temps, sa véritable marque de fabrique, ne bénéficiera ni de son droit de vote, ni du droit de se porter candidat. Ce, jusqu’en 2020. Une décision, mieux une sentence qui est tombé tel un couperet dans la journée du dimanche 9 février 2014, et relayée par la chaîne de télévision publique Gabon Télévision.
Le péché commis par le journaliste : avoir adressé un courrier à l’endroit de la Cour constitutionnelle, notamment au président de la haute juridiction, Marie-Madeleine Mborantsuo. Une lettre conduite sous forme d’interpellation par la voie du journal Echos du Nord, au sein d’une rubrique hebdomadaire à travers laquelle le journaliste incriminé s’adresse régulièrement à certaines personnalités gabonaises dont le chef de l’Etat, le Premier ministre, les membres du gouvernement et les responsables d’institutions.
Ainsi, après de nombreuses personnalités à l’instar de l’ancien ministre de l’éducation nationale, dans le numéro 214 du lundi 6 janvier 2014, Jonas Moulenda s’est adressé à Mme Mborantsuo. Un outrage à la Cour, a estimé la personnalité visée. Conséquence : 6 années d’inéligibilité pour le journaliste. Une décision somme toute irrévocable qui, de mémoire de Gabonais, n’avait vraisemblablement pas encore frappé une personnalité connue ou un autre journaliste dans le pays. Toute chose qui pose question sur la nécessité d’une telle décision, d’autant plus que le journaliste et son média ne sont pas à leur première publication dans le genre.
Des mots plus durs, des interpellations plus fermes ont pourtant été adressés au Président de la République en 2013, ainsi qu’à un certain nombre de ministres. Il semble désormais que «recommander» à la Cour constitutionnelle «un esprit d’équité» dans l’exercice de son jugement relève désormais de l’outrage, mieux du péché extrême. Par ailleurs, Jonas Moulenda qui a dit prendre acte de la sentence, devrait faire appel dans les prochains jours après une concertation avec son avocat, même si l’aboutissement d’un tel projet demeure incertain, les décisions rendues par la haute juridiction étant irrévocables. Qu’à cela ne tienne, l’affaire à de quoi susciter une nouvelle fois quelques doutes au sujet de la liberté des hommes des médias.