L’«affaire Travcon AG», du nom de la société suisse spécialisée dans la mise à disposition d’avions pour VIP refait une nouvelle fois surface. Si, une fois de plus, elle révèle un mélange des genres, le principal responsable est, cette fois-ci, désigné : Pascaline Mferri Bongo, ancienne toute-puissante directrice de cabinet du président de la République.
L’«affaire Travcon AG», du nom de la société suisse spécialisée dans la mise à disposition d’avions pour VIP refait une nouvelle fois surface. Si, une fois de plus, elle révèle un mélange des genres, le principal responsable est, cette fois-ci, désigné : Pascaline Mferri Bongo, ancienne toute-puissante directrice de cabinet du président de la République.
De Jean Ping à Jermaine Jackson, en passant par des amis de la famille, à l’instar de l’avocat parisien François Meyer, plusieurs personnalités ont nommément été citées comme faisant partie des nombreux passagers ayant bénéficié des largesses de la présidence de la République entre 2008 et 2010. Des personnalités qui, pour des raisons aussi bien professionnelles que privées, ont eu recours aux services de la société suisse Travcon AG, sans se soucier le moins du monde du coût de leurs voyages à travers le monde. Pourquoi se seraient-elles fait du souci ? La présidence de la République était chargée de régler les différentes ardoises, dont le cumul a vite atteint environ 4,72 milliards de francs CFA. Une somme que la société spécialisée dans la mise à disposition d’avions pour VIP réclame à l’Etat gabonais depuis le 25 février dernier, date de l’arraisonnage à l’aéroport d’Orly (France) d’un Boeing 777 appartenant au Gabon.
Dès les premiers jours de l’ouverture de ce dossier qui confirme encore un peu plus une tendance à entretenir la confusion entre affaires publiques et affaires privées, les plus hautes autorités avaient crié à la violation de conventions avec la France, la présidence de la République n’avait pas souhaité apparaître comme le débiteur de cette nouvelle créance.
«Le président de la République ne souhaite pas s’acquitter de la somme due parce que l’utilisation de l’avion ne lui incombe pas uniquement : des membres de sa famille en faisaient fréquemment usage pour leurs différents déplacements avant son arrivée au pouvoir», a en effet confié à Gabonreview, mi-mars 2015, une source de la présidence gabonaise. Loin de toute idée de continuité de l’Etat ou du service public, il fallait alors désigner un coupable. Chose faite depuis quelques temps, a rapporté Le Monde Afrique du 31 mars 2015, désignant Pascaline Mferri Bongo à qui la note de Travcon AG a été adressée. Toute-puissante directrice de cabinet du président de la République sous Omar Bongo Ondimba et ordonnatrice du budget de la présidence de la République, elle est désormais l’objet de toutes les attentions. Une situation pour le moins gênante, qui n’est pas sans rappeler l’affaire Blue Mendel, dans laquelle elle est nommément citée, en tant que débitrice, bien qu’elle le nie fermement.
Selon Le Monde Afrique, qui dit être entré en possession des documents détaillant les nombreuses virées effectuées au frais du contribuable gabonais, une grande partie des voyages organisés pour Pascaline Mferri par Travcon AG ne revêtait aucun caractère officiel ou diplomatique. «Le 10 août 2008, par exemple, une confirmation de commande décrit une longue escapade en groupe et par étapes. Le Gulfstream G555 décolle de Los Angeles, fait escale à Orlando puis sur la côte d’Azur, à Nice, d’où il repart pour Libreville et Paris avant de ramener ses passagers à Los Angeles», rapporte-t-il, avant d’indiquer que le coût du trajet était de 632 930 dollars, soit près de 584 300 euros (environ 390 millions de francs). Entre des locations de jet Gulfstream ou Falcon, la privatisation d’Airbus A 319 ou de Boeing 757 et la réservation de tickets commerciaux sur les grandes lignes, elle n’aurait lésiné sur rien. Tant et si bien que «le 3 décembre 2008, (elle) utilise un autre Gulfstream, G 550 cette fois, pour un périple aérien avec un autre groupe de Libreville à Washington, puis Accomack (en Virginie), avant de passer par Orlando, Miami, Francfort et Paris. De retour à Libreville, la facture s’élève cette fois à 518 750 dollars (478 900 euros soit environ 320 millions de francs)». Dans le même ordre d’idées, la source rapporte que «Jean Ping, ancien ministre des affaires étrangères d’Omar Bongo et ancien compagnon de Pascaline Bongo, a (lui aussi) bénéficié d’un voyage entre Addis-Abeba et Le Bourget (près de Paris) en Falcon 2000 LX. La facture datée du 10 novembre 2008 affiche un montant de 142 570 dollars (131 600 euros soit environ 88 millions de francs)». Jean Ping était-il alors en mission officielle ? Agissait-il pour le compte du Gabon ou de l’Union africaine ?
Qu’à cela ne tienne, révèlent les documents de Travcon AG, «le 16 avril 2009, un A 319 transporte les enfants Bongo-Ping et leurs amis. En tout, les quinze passagers font un simple aller-retour entre Los Angeles et Las Vegas, facturé 60 630 dollars (près de 55 900 euros environ 37 millions de francs). Ce ballet aérien connaît un dernier entrechat le 15 septembre 2009 pour un Paris – Los Angeles – Libreville à 394 710 dollars (près de 364 300 euros environ 243 millions)». L’affaire, qui sera une nouvelle fois jugée au tribunal d’Ivry au début du mois d’avril courant, promet d’être riche en rebondissements, alors qu’une correspondance datée du 31 juillet 2013, attribuée à Me François Meyer, avocat de Pascaline Mferri Bongo et passager occasionnel des vols, et dont le numéro de téléphone est clairement mentionné dans l’une des factures de la société suisse, a confirmé que «le gouvernement gabonais doit encore à Travcon AG la somme de 8 356 097 dollars américains» (environ 5,10 milliards de francs CFA).