Il y a plus d’une semaine, le conseiller en communication du président de la République, Michel Ogandaga, écrivait sur sa page du réseau social Facebook un post qui a ébranlé l’univers de la toile gabonaise, où nombreux ont dénoncé des relents de «tribalisme et de xénophobie». Petit aperçu de ce qu’aura crée ce petit «mot de trop».
Au départ anodin, le post de M. Ogandaga qui aurait pu passer inaperçu comme bien d’autres qui alimentent le débat, juste le temps de faire réagir les internautes, sur Facebook ou Twitter, sur tel ou tel autre problème ou phénomène dans le pays, a ,semble-t-il, été plus pointu et piquant que prévu.
Comme à son habitude, le verbe acerbe dans un univers qui ne lui fait pas souvent de cadeau, Michel Ogandaga, activiste Gabonais des plus connus sur les réseaux sociaux gabonais, a posté ce jour-là un avis à propos de l’élection du candidat indépendant Alfred Memine Me Zué, au Conseil départemental du Ntem, au détriment du Parti démocratique gabonais (PDG, au pouvoir) qui avait pourtant la majorité des conseillers à l’issue du scrutin du 14 décembre dernier. Le Conseiller en communication du président de la République disait en substance : «Je suis un homme en colère, écœuré par ce qui se trame actuellement au sein du PDG du Woleu-Ntem.
Même si la traîtrise de nombreux militants PDG du Woleu-Ntem ne surprend personne, cette province a toujours été le bastion du judaïsme, antichambre du salafisme». On comprendra que le judaïsme ici en question renvoyait à Juda Iscariote, le fameux traitre de Jésus Christ. Et Michel Ogandaga d’ajouter à cette première manche : «pour mettre un terme à cette immense saloperie, le grand ménage doit être fait maintenant dans le PDG.
Je demande donc des sanctions ferme et immédiat contre ces ordures : – exclusion illico presto du Parti Démocratique Gabonais, limogeage manu militari de toute fonction officielle, suspension à vie de tout revenu, salaire, pension, retraite, etc. Cette seconde traîtrise est intolérable et inacceptable».
Si on fait l’économie de l’intégralité desdits propos, au demeurant très violents, il est à noter que ces phrases sont taxées, par bien d’observateurs, du fait notamment des termes employés, d’hors de propos dans un pays qui «se bat pour construire l’unité nationale».
Sans peut-être faire référence au texte de M. Ogandaga, le post, sur sa page Facebook, de l’humoriste gabonaise Gisèle Ndong Biyoghé, pourrait résumer la pensée de tous ceux qui se sont levés pour fustiger les mots d’un conseiller du président la République qui prône, lui-même, la lutte contre le tribalisme, le racisme, la xénophobie et autres mots qui occasionnent haine et rancœurs dans la nation.
«Que ceux qui en ont assez de la haine ethnique se manifestent ! Non à ce poison violent, à ce serpent venimeux, à cette arme de destruction massive qui frappe sans discernement. Non aux apôtres de la haine, aux chantres de la race supérieure, aux partisans du chaos !», écrivait l’humoriste sur sa page Facebook.
Si le conseiller a retiré le texte querellé de son mur Facebook, il est cependant clair que ces quelques mots ont eu le temps de faire des dégâts au sein de la société. «On ne peut pas être proche du président de la République et se permettre de telles erreurs. Le président doit montrer qu’il souhaite vraiment la paix dans son pays en sanctionnant l’auteur de ce dérapage», a lancé un journaliste officiant dans un hebdomadaire de la place.
De nombreux échanges on été notés, ça et là, faisant référence à l’histoire pour fustiger ce «mot de trop». «On dirait que cet homme ne sait pas que ce sont de petites phrases comme celles-là qui ont occasionné des problèmes énormes dans un pays comme le Rwanda. Cet homme mérite de demander des excuses publiques à la communauté Fang dont il qualifie les membres de salafistes et de judaïstes», a lancé un badaud devant un kiosque à journaux où était bruyamment commenté le titre tendancieux et ironique du journal L’Aube qui a titré, le 27 janvier 2014, à la une de son numéro 11, «Tuez-les tous» avec une pléiade de photos de personnalités publiques d’ethnie Fang.
L’objectif du journal était, sans aucun doute, de dénoncer les propos d’Ogandaga qui ont ébranlé bien de personnes. Grossissant certes le trait et poussant la logique un peu trop loin, l’hebdomadaire qui s’est en effet offusqué de la «prose de ce compatriote qui voue aux gémonies une partie de la nation gabonaise» se demande : «Faut-il alors s’étonner de l’implosion imminente du pays ?
Si le conseiller d’un chef de l’Etat traduit fidèlement la pensée de son chef, le doute n’est plus permis : nous sommes sur les traces de la Côte d’Ivoire, de la Centrafrique… il manque simplement l’allumette pour que le brasier s’enflamme.» Excessif et à l’antipode de la réalité gabonaise, heureusement.
L’hebdomadaire La Griffe est venu en rajouter, en tentant de démontrer que le post de Michel Ogandaga sur Facebook avait été trituré. Ce que balaient d’un revers de la main tous les usagers de Facebook qui ne demandent qu’à ce que le journal vienne démontrer, sur le célèbre réseau social, comment il est possible de manipuler un post dont on n’est pas l’auteur.
Ce qui est impossible, à moins de détenir les mots de passe du détenteur du compte. Mais, Michel Ogandaga est précédé d’une réputation d’ «injurieur» public un brin extrémiste. La liste de ses victimes est longue. Les archives de son blog sur Médiapart en témoigneront.
En attendant que l’intéressé justifie son acte et ce qui l’a amené à se laisser ainsi déborder, il reste que les commentaires vont bon train face à ce laisser-aller et à l’excès de zèle qui caractérisent certaines personnalités de l’entourage du chef de l’Etat, entravant par là les efforts fournis par le président Ali Bongo pour entretenir la paix, la sérénité et la cohésion au sein de la nation gabonaise.