Nombreux étaient les Gabonais devant leur poste téléviseur ou transistor pour profiter, en même temps que les invités privilégiés du palais de marbre, de l’allocution du numéro un Gabonais, annoncée comme étant la présentation de «la stratégie de lutte contre la pauvreté au Gabon». Petite collection de réactions après l’adresse d’Ali Bongo Ondimba au nouveau gouvernement.
Aucun Gabonais n’a souhaité rater le «coup de gueule» du chef de l’État sur la pauvreté car, elle concerne les 70% de sa population. Ainsi, ils étaient nombreux à accorder un intérêt particulier à sa première sortie médiatique de l’année 2014, depuis le palais du Bord de mer. Après l’écoute, les rôles se sont inversés et le discours à fait place aux commentaires des populations.
«On n’a toujours dit que le Gabonais était pessimiste ou négationniste, que nous stigmatisons systématiquement l’action publique. Hier le président Ali Bongo Ondimba a raté l’occasion d’avoir raison sur notre état ou mentalité qu’il fustige. J’ai été déçu par son intervention. J’attendais mieux de lui, il aurait dû laisser son maestro Alain-Claude Billie By Nzé, nous lire ce discours sans consistance», a lancé Hugues Rufin M., un étudiant.
«Vous vous rendez compte que l’annonce qui passait en boucle à Radio Gabon et qui nous tenait en haleine faisait état de la livraison de la stratégie de lutte contre la pauvreté par le président Ali Bongo Ondimba. À notre grande surprise, il n’a nullement été question de stratégie mais, d’un compte-rendu, en moins que je ne sache plus faire la différence ou reconnaître une stratégie», a relevé J.M.S qui n’a pas souhaité donner plus que les initiaux de son patronyme. «Le speech n’a comporté aucune mesure forte, juste un ensemble d’indications. Ca nous rappelle son discours devant le parlement réuni en congrès : beaucoup de belle tchatche et rien d’important pour changer les choses», a relevé un jeune «hacktiviste» sur la page Facebook Infos des Akébé.
La volonté exprimée par le président Ali Bongo Ondimba de prendre par les cornes avec le gouvernement, les taureaux de la pauvreté, du délitement social et de la précarité afin que la condition du Gabonais reflète les taux de croissance de 5 à 6% enregistrés par le Gabon depuis ces quatre dernières années, ne semble pas convaincre grand monde.
«C’est une chose de relever ce qui ne va pas et de le souligner. C’en est une autre d’élaborer des stratégies pour résoudre ce qui ne va pas. Le président Ali Bongo Ondimba a peut-être appris beaucoup de la situation qui accable son peuple, mais nous population, nous n’avons rien appris de nouveau que nous ne sachions déjà de notre condition sociale. Hormis les chiffres produits par les cabinets sollicités et rendus public par Ali Bongo Ondimba dans son discours, aucun vrai Gabonais n’ignore qu’il est pauvre, que son fils l’est et que son petit-fils le sera, si les décideurs ne se lèvent pas pour arrêter cette hémorragie», a regretté Justin M., un cadre de l’administration.
«Moi, je n’ai pas grande chose à dire, si ce n’est que, c’est une bonne chose que le président fustige et dénonce cet état de fait que subit sa population. Celle-là même qui l’a porté à la tête du pays le 30 aout 2009. Maintenant il lui revient de faire de son mieux pour renverser cette tendance. Je reste toute de même dubitative car ce n’est pas la première fois qu’Ali se fâche», pense une commerçante du marché de Louis se présentant comme Maman Jeanne.
Empruntant l’expression du président Ali Bongo à l’endroit du gouvernement Ona Ondo, selon laquelle, il n’aura pas d’«état de grâce», un jeune chômeur rentré d’Allemagne depuis trois ans déjà n’a pas manqué de relever qu’il n’accorde pas du crédit au discours et à son auteur, car selon lui, de tous les chantiers engagés et vantés depuis l’arrivée d’Ali Bongo Ondimba aucun n’a été inauguré à ce jour. «C’est quand même incroyable de voir les Gabonais et Gabonaises qui croient encore aux promesses d’Ali. Il a dit que depuis 2009, le Gabon est un vaste chantier pour construire le Gabon émergent qu’il nous a promis. Ce vaste chantier-là se termine quand ? Les premières inaugurations sont pour quand ? Devrons-nous toujours conjuguer le verbe de l’avenir qui n’augure aucune confiance ? De toute façon les discours n’engagent que ceux qui y croient. Pour ma part, Ali Bongo n’aura aucune grâce en 2016». Très peu de personnes interrogées ont montré de l’acquiescement à ce qui a été dit, nombreux s’étonnant même de la pertinence de cette sortie du président.