Doyen des conseillers municipaux présents le 26 janvier 2014 à l’hôtel de ville de Libreville où l’on votait le maire de la capitale, Marc Fidèle Obiang, premier président de séance qui a fini par démissionner, pour ne pas, selon lui, «cautionner une telle mascarade», aura tout de même marqué les esprits. Flashback sur sa démarche et sa déclaration.
Le dimanche 26 janvier 2014, lors de l’élection du nouveau maire de la commune de Libreville, qui a abouti au choix de Rose Christiane Ossouka à ce poste, des «irrégularités» constatées par le camp des conseillers indépendants de la liste «Libreville pour tous» de l’ancien Premier ministre Jean Eyéghé Ndong, ont été dénoncées aussi bien par les concernés que par le doyen d’âge et président de séance, Marc Fidèle Obiang, qui a fini par démissionner pour ne pas «cautionner une telle mascarade», selon sa propre expression.
Juste après ce désistement, le septuagénaire a choisi de «dire sa part de vérité» quant à ce qui s’est passé dans la salle d’audience de la mairie de Libreville que tous les conseillers indépendants avaient quitté du fait de n’avoir pas pu se faire entendre sur les entorses à loi notées. C’est dans ce contexte que Marc Fidèle Obiang, a déclaré devant la presse :
Voici en intégralité la déclaration faite par le doyen Marc Fidèle Obiang devant la presse : «Mesdames et messieurs les journalistes, il est de mon honneur et de ma responsabilité de porter à travers vous, les raisons qui m’ont amené à me dessaisir du rôle de président de séance de l’élection du maire central de la commune de Libreville et de ses adjoints. Ce rôle m’a été dévolu en vertu de mon âge. En effet, dès l’ouverture de la séance, un profond désaccord est apparu entre les différents groupes en présence. Ce désaccord était d’ordre juridique et concernait les modalités du scrutin, en l’occurrence les enveloppes accolées. Pendant le premier tour des élections locales, les électeurs ont voté sur la base de ces enveloppes accolées, dont un côté était de couleur blanche destiné à recevoir le vote de l’électeur et l’autre côté de cette enveloppe de couleur noire dite poubelle destinée à recevoir les bulletins non choisis. Cette disposition a été introduite dans la loi électorale pour garantir confidentialité du vote et éviter les pratiques de fraude, de corruption qui ont toujours émaillé le déroulement des élections dans notre pays. Or quelle n’a pas été ma surprise et celle de nombreux conseillers municipaux de se retrouver devant une seule enveloppe. Ce qui ramène devant des pratiques anciennes. Compte tenu de la partialité manifeste du gouverneur de l’Estuaire et du refus des conseillers municipaux du côté du pouvoir d’appliquer la loi, en l’occurrence, j’ai décidé à mon âme et conscience de ne pas cautionner une telle mascarade».
Telle a été l’intégralité de la déclaration de Marc Fidèle Obiang, un homme qui, par son âge, n’avait visiblement rien à perdre, sauf peut-être ses principes, sa bonne moralité et son sens du civisme. Son geste, à n’en point douter, sera oublié de tous, mais il a marqué ce dimanche 26 janvier 2014, l’esprit de tous ceux qui pensent que les lois ne sont pas faites pour être violées lorsqu’elles mettent en péril les intérêts du plus fort. Les Républiques tropicales ne deviendront de vraies démocraties que lorsqu’on arrêtera de customiser, d’arranger à la fantaisie des gouvernants les lois qu’eux-mêmes mettent en place.
Parce que, sur ce coup, il défendait les mêmes revendications que Jean Eyéghé Ndong sans pour autant appartenir aux listes «Libreville pour tous», Marc Fidèle Obiang, qui s’est lavé les mains, a été ici le Ponce Pilate de l’ancien Premier ministre d’Omar Bongo. Il a en effet décliné toute responsabilité de ce qui allait se passer. Il s’est exonéré de l’élection au forcing du nouveau maire de Libreville. Son geste rappelle que refusant de ratifier la condamnation à mort de Jésus Christ alors que sa femme, à la suite d’un rêve, lui avait conseillé de ne pas s’associer au meurtre d’un juste, Ponce Pilate, préfet selon la Bible de la province romaine de Judée au moment de la crucifixion de Jésus, se lava les mains devant la foule et déclara : «Je suis innocent du sang de ce juste, vous, vous y aviserez». Ce n’est, sans aucun doute, pas la même chose, mais le vieux Marc Fidèle Obiang a au moins la conscience tranquille.