Le scénario aura connu bien de rebondissements le dimanche 26 janvier 2014 à l’hôtel de Libreville où l’on élisait le maire de la plus grande municipalité du pays. Pourparlers et controverse entre les candidats de tous les bords en lice pour cette élection, démission du président de séance et retrait de la liste des indépendants conduite par l’ancien Premier ministre Jean Eyéghé Ndong, auront rythmé la journée. Finalement Rose Christiane Ossouka Raponda été proclamée élue avec 103 voix, la totalité des suffrages exprimés.
Convoqué pour dix heures locales par le ministère de l’Intérieur, le corps électoral était à l’heure à l’hôtel de ville de Libreville. En présence du gouverneur de la province de l’Estuaire, Jacques Denis Tsanga, supervisant les opérations, le bureau de ce scrutin a été mis sur pied conformément à l’esprit de la loi. Le plus vieux et le plus jeune des conseillers élus devant y figurer, cela a été fait.
Mais, le processus de l’élection à peine entamé, de «nombreuses irrégularités» vont être relevées par la liste des indépendants qui avait pour candidat Jean Eyéghé Ndong. Celui-ci aura même un échange courtois, sur les dispositions de la loi, avec le président du Centre des libéraux réformateurs (CLR), Jean-Boniface Assélé, pendant la suspension de séance.
«Mesdames, Messieurs, chers compatriotes, j’ai l’honneur de vous informer que ce jour, j’ai refusé avec tous les conseillers qui me soutiennent de prendre part au vote portant élection du maire de Libreville», a dit Jean Eyéghé Ndong avant d’ajouter, lors de la conférence de presse tenue après avoir quitté l’hôtel de ville avec les 46 autres conseillers de la liste «Libreville pour tous», que, «le vote devait se dérouler conformément aux règlements et lois en vigueur».
«Nous avons fait observer à monsieur le gouverneur de l’Estuaire, puis au président de séance désigné un certain nombre d’anomalies qui nous paraissaient être en violation des dispositions légales en vigueur. Il y avait notamment la présentation d’un nombre important de procurations par les élus PDG. Sur cet aspect, il est à relever que l’un des élus PDG du deuxième arrondissement de Libreville déclaré absent et pour lequel on avait présenté une procuration s’est retrouvé dans la salle… Je vais ajouter qu’au deuxième arrondissement, il y a six conseillers élus PDG.», a expliqué Jean Eyéghé Ndong s’étonnant de ce que «comme par hasard, les six étaient absents et ils ont donné des procurations»
«Où sont-ils partis alors qu’on les a vu hier soir. Ont-ils voyagé ? Sont-ils tombés malades ? Ce qui n’est pas souhaitable !», a fait noter le candidat des listes «Libreville pour tous» qui a égrené des griefs n’ayant pas favorisés la participation de son camp à cette élection. «Nous avons surtout constaté le non-respect de la loi n°7/96 du 12 mars 1996 portant dispositions communes à toutes les élections politiques modifiée par la loi n°7- 2013 du 22 juillet 2013 qui en son article trois dispose : «l’élection des membres des conseils municipaux et départementaux sont des élections politiques». De ce fait, le scrutin relatif à l’élection des membres du conseil municipal de Libreville devrait se faire conformément aux dispositions de la loi suscitée», a-t-il expliqué.
«L’article 79 de la même loi précise : «le vote a lieu sous deux enveloppes non transparentes. Une de couleur blanche portant la mention «vote» et de format réduit sert au choix de l’électeur, l’autre de couleur noire portant la mention «poubelle» et de grand format est destinée aux autres bulletins. Le jour du vote, le lot de deux enveloppes portant les mentions «vote» et «poubelle» est mis à la disposition des électeurs dans la salle du scrutin», a rappelé Jean-Eyéghé Ndong avant d’indiquer que «l’importance que nous accordons aux dispositions relatives aux enveloppes accolées participe de toutes les avancées acquises pour le renforcement de la transparence électorale, du principe de secret et de la confidentialité du vote. En d’autres termes, nous refusons que le vote de l’électeur gabonais puisse être contrôlé à postériori. Ce qui, ouvre largement la voie aux intimidations, au conditionnement du choix et à l’achat de conscience. Toute chose contraire à la loi, à la morale politique, aux principes démocratiques et à l’Etat de droit»
Tous ces éléments n’ayant pas été observés ou appliqués, le président de séance, doyen d’âge, Marc-Fidele Obiang, 70 ans, a présenté sa démission, ne souhaitant pas «cautionner cette mascarade» et voulant être «en phase avec sa conscience», selon son propos.
Ainsi, sans le candidat de la liste «Libreville pour tous» et ses quarante-sept conseillers, le vote s’est poursuivi et c’est au final la candidate du PDG, soutenue par le CLR qui a été élue à 100%, soit 103 voix exprimées. Entre temps, lors de la conférence de presse donnée par la suite, Jean-Eyéghé Ndong a annoncé qu’il va saisir la Cour constitutionnelle pour dénoncer les irrégularités enregistrées pendant ce vote.
Au sortir de cette élection qui a porté, sans grande surprise, Rose Christiane Ossouka Raponda à la tête de la mairie de Libreville, celle qui devient la première femme à diriger cette commune a déclaré : «nous sommes ravis du fait que la vision qui est décrite par son excellence Ali Bongo Ondimba, notre président de la République de faire de Libreville le carrefour de l’Afrique, de faire de Libreville le siège de l’émergence, de faire de Libreville la ville vitrine de ce pays en plein transformation. Nous sommes d’autant plus ravis que nous les partis de la Majorité pour l’émergence allons mettre en relief, matérialiser et concrétiser cette vision du président de la République. Nous avons un programme bien défini que nous avions regardé ensemble. Un programme qui comporte un plan de développement communal de la ville de Libreville. Et dans ce plan nous avons 23 programmes et 93 actions qui seront menées. Pour dérouler ces différentes phases, il faudrait que nous marquions des actions fortes en 100 jours. Des actions fortes qui vont faire en sorte que le regard des Librevillois aujourd’hui, vis-à-vis des élus locaux, soit aussi différent. Il faut changer le vivre de ces Librevilois.»
Au final le conseil municipal de Libreville est constitué ainsi que suit :