A un an de la prochaine élection présidentielle, la guerre des nerfs est déclarée entre le pouvoir et l'opposition gabonaise, plus que jamais déterminée à en découdre avec le Parti démocratique gabonais (PDG) qui dirige le Gabon depuis 1968.
Contrairement au long règne d'Omar Bongo Ondimba qui a dirigé le Gabon jusqu'à sa mort, de 1967 à 2009, les démissions des cadres s'opèrent désormais à la défaveur du parti au pouvoir. Le PDG se vide peu à peu de ses grands cadres qui vont grossir les rangs de l'opposition radicale.
Le dernier à quitter le navire est René Ndemezo'o Obiang, un personnage clef du régime d'Omar Bongo Ondimba. Aussi surnommé Didier Okocha (nom d'un talentueux footballeur nigérian connu pourses dribles majestueux devant les buts adverses), René Ndemezo'o Obiang était le pivot central de la communication politique d'Omar Bongo qui lui avait promu aux fonctions de Porte- parole du gouvernement. Tendance trotskiste, M. Ndemezo'o Obiang est aussi un leader populiste qui rassemble un important électorat au nord du Gabon.
Au lendemain de sa démission, l'opposition multiplie les publications des listes dans les réseaux sociaux d'autres personnalités qui s'apprêtent à quitter le parti au pouvoir au profit de l'opposition. Sur cette liste figure en tête le Secrétaire général de ce parti, Faustin Boukoubi dont les relations sont assez orageuses avec les fidèles d'Ali Bongo Ondimba, l'actuel chef de l'Etat gabonais.
Le Secrétaire général du PDG n'a pas démenti ces rumeurs tout comme d'autres anciens barons du régime d'Omar Bongo mis à la touche par Ali Bongo Ondimba.
A sa prise de pouvoir en octobre 2009 après une élection présidentielle anticipée suite à la mort au pouvoir, le 8 juin d' Omar Bongo, Ali Bongo n'a pas souhaité s'accommoder des fidèles de son père. Sa soif de reformer le système et d'opérer la rupture lui a obligé de mettre à la touche plusieurs caciques. Ces derniers n'ont pas hésité de crier à la "chasse aux sorcières".
Toutes les personnalités mises à l'écart du pouvoir tentent naturellement leur va-tout pour garantir leur survie politique. Ils démissionnent à tour de rôle du parti pour rejoindre immédiatement l'opposition radicale.
Chaque démission est mise en scène et montée en épingle pour créer la psychose au sein du pouvoir. L'opposition a battu tambours et trompettes pour accueillir les démissionnaires comme Jean Ping (ancien président de la Commission de l'Union africaine, ancien chef de la diplomatie gabonaise et ancien ministre du pétrole), Didjob Divungi Di Ndinge (ancien Vice-président de la République) et Jacques Adiahenot (ancien Secrétaire général du PDG) .
Ces anciens hauts cadres du PDG ont rejoint d'autres, tels que Zacharie Myboto (ancien numéro 2 du PDG), Casimir Oyé Mba (ancien Premier ministre), Jean Eyeghe Ndong (dernier Premier ministre d' Omar Bongo), André Mba Obame (ancien tout puissant ministre de l' Intérieur)..
"La photo de groupe du Front uni de l'opposition ressemble exactement à un PDG bis", fait constater un observateur de la vie politique gabonaise.
"C'est un général sans troupe", avait ironisé le porte-parole de la présidence de la République, Alain Claude Bilie By Nze lors de la démission en février 2014 de Jean Ping. Il a également minimisé la démission de Jacques Adiahenot qui avait tenu le PDG en 1990 alors qu'il était aux abois suite à la restauration du multipartisme dans le pays.
"Merci pour ce départ", a exulté Bilie By Nze au lendemain de la démission de René Ndemezo'o Obiang.
Cette assurance dissimule assez mal le malaise que créent ces démissions en cascade. Le régime est certes stable mais le doute commence à gagner les rangs. La révolution du Burkina Faso en octobre dernier fait école. L'opposition gabonaise joue sur deux tableaux : une révolte populaire pour chasser la famille Bongo Ondimba au pouvoir depuis 1967 ou l'élection présidentielle de 2016.
Les violentes manifestations de rue à Libreville en décembre dernier ayant fait un mort et de nombreuses destructions résultent de l'option révolutionnaire de l'opposition. Celle-ci exige la démission du président Ali Bongo Ondimba accusé de ne pas être gabonais de souche mais plutôt un originaire du Biafra, ancienne région sécessionniste du Nigeria. L'article 11 de la constitution gabonaise interdit aux Gabonais ayant acquis la nationalité de briguer le fauteuil présidentiel.
La présidence de la République soutient qu'Ali Bongo Ondimba n' est pas un fils adoptif mais bien le fils biologique d'Omar Bongo Ondimba. Malgré ces affirmations, l'opposition a décidé de demander au parlement et au gouvernement de convoquer la Haute cour de justice pour juger le président Ali Bongo Ondimba pour haute trahison en raison de ses origines présumées.
A propos de 2016, l'opposition met la pression sur la transparence électorale. Une organisation non-gouvernementale (ONG) ayant ses faveurs a porté plainte mardi dernier à Paris en France contre la compagnie française Gemalto, ayant obtenu le marché de mise en place de la biométrie dans le processus électoral. Cette ONG milite pour une meilleure transparence électorale afin de garantir l'alternance en 2016 ; donc le départ d'Ali Bongo du pouvoir et la fin de l'hégémonie du PDG sur le Gabon. F