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Raymond Ndong Sima : «Il y a un temps pour chaque chose sous les cieux»
Publié le vendredi 6 mars 2015   |  Gabon Review


Raymond
© Autre presse
Raymond Ndong SIMA, premier ministre


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Serein, réservé et lucide, Raymond Ndong Sima, l’ex-Premier ministre qui vient de commettre un livre, répond aux questions de Gabonreview sur son hypothétique candidature à la présidentielle 2016, son attachement au PDG, Maixent Acrombessi, le système électoral et, naturellement, son ouvrage titré «Quel renouveau pour le Gabon ?»

Gabonreview : Résumant votre livre, un éditeur dit qu’il s’agit d’un document politique pour lancer votre campagne contre le pouvoir incarné par Ali Bongo dans le cadre de la présidentielle 2016. Etes-vous dans une logique de candidature à la présidence de la République ?

Raymond Ndong Sima : Il y a, dit-on dans le Livre de l’Ecclésiaste, un temps pour tout, un temps pour chaque chose sous les cieux. Pour l’instant, je crois que nous en sommes à un effort de compréhension de ce qui nous arrive. Il y a trois mois, j’ai tiré la sonnette d’alarme sur mon blog avec un texte que j’ai intitulé : « Péril en la demeure ». Peut-être étais-je en avance sur les évènements mais je crois que personne ne conteste aujourd’hui la gravité de la situation. Y avons nous apporté la réponse appropriée, je ne crois pas. Il me semble que la situation est plus grave qu’on ne l’admet. Ce livre se veut une contribution au débat qui doit préparer les élections de 2016.

Vous dressez un tableau sombre de la gouvernance d’Ali Bongo qui démontre que vous n’étiez qu’un Premier ministre figuratif. Pourquoi n’avez-vous pas claqué la porte ?

On ne se rend pas compte de la vacuité d’une fonction le jour où on y accède. C’est une succession d’évènements qui se produisent et qui vous ouvrent progressivement les yeux. Vous percevez d’abord des signaux qui se mettent à clignoter avant de devenir des feux continus. C’est véritablement le dossier Sovog en juin 2013 qui m’a ouvert les yeux tant il était gros. Il m’a conduit à réinterpréter rétrospectivement les attitudes, comportements et décisions des mois qui l’ont précédé.

Cependant, confronté à la contestation syndicale, ma démission à ce moment aurait ressemblé à une fuite devant la difficulté qui aurait été exploitée contre moi. De plus, je tenais à voir aboutir l’épineux dossier des rappels. Si je l’avais lâché à ce moment, il aurait probablement été abandonné. Chacun peut d’ailleurs constater que ceux qui n’ont pas été payés en décembre 2013, attendent toujours leur tour.

C’est pourquoi aussi je n’ai pas donné suite à l’invitation très courtoise que m’a adressée le porte-parole du Président dans ce sens.

Avez-vous, tel que le prétend la rumeur, été heurté dans votre action par l’immixtion de Maixent Accrombessi ? Est-il le vrai président de la République que prétend la rumeur ?

Je vous renvoie à mon livre. Je n’y ai pas pratiqué la langue de bois. Il n’y a pas de vrai président et de faux président. Il y a un président investi en exercice. C’est lui qui donne à ses collaborateurs le pouvoir de faire ce qu’ils font. Ils agissent donc en son nom. Au demeurant, la Constitution ne reconnaît pas les collaborateurs du président en poste à la présidence. Elle connaît le président, le gouvernement, le Premier ministre et les autres institutions.

Après votre sortie du gouvernement et le tableau que vous brossez aujourd’hui, pourquoi restez-vous au PDG même si vous en avez démissionné de la hiérarchie ? Cette formation politique a-t-elle un avenir sans Ali Bongo au pouvoir ?

J’y réfléchis. Quant à l’avenir du PDG post Ali Bongo Ondimba, je ne suis pas devin.

Croyez-vous, en l’état actuel du système électoral gabonais, avec les acteurs partisans qui l’animent, que l’alternance est possible par les urnes ?

Oui, je crois que l’alternance est possible par les urnes. C’est même la seule alternance raisonnable que tous les démocrates doivent encourager. Ce n’est pas le système électoral qui pose problème, ce sont ses modalités de mise en œuvre. C’est à ces modalités qu’il faut s’attaquer pour rendre le prochain scrutin équitable. Par exemple, puisque le ministère de l’Intérieur a collecté les informations biométriques sur tous les électeurs, tous ceux-ci devraient se voir délivrer une carte nationale d’identité dès cette année 2015 pour que tous les électeurs puissent se prévaloir d’une même identification le jour du scrutin. En second lieu et pour éviter que des fraudes ne s’opèrent à partir des cartes d’électeurs non distribuées, tous les électeurs devraient être authentifiés dans chaque centre de vote de sorte que les absents ne votent pas, malgré eux-mêmes, au profit du candidat le mieux représenté dans leurs bureaux de vote. Sur cette base, les parties en compétition pourraient valablement sécuriser les votes des uns et des autres. Je voudrais d’ailleurs rappeler que j’avais présidé la commission sur les modalités de mise en œuvre de la biométrie dans le processus électoral en 2013 dont les conclusions avaient favorisé des élections locales apaisées. Le débat sur l’authentification à cette occasion avait été intense et s’était conclu par un large consensus autour d’une formule d’authentification localisée.

Pour revenir à votre livre, pouvez-vous livrer aux lecteurs qui l’attendent, un bref résumé de son contenu ?

Je crois que chaque lecteur devrait se faire sa propre opinion. Moi j’ai écrit, aux lecteurs de se faire leur synthèse. Ce que je peux dire c’est que ce livre commence par un rappel du contexte historique de 2009, caractérisé par la mort d’un homme, Omar Bongo Ondimba, qui avait dirigé le Gabon pendant plus de 40 ans. Il revient sur les stratégies des uns et des autres à cette occasion et leurs conséquences ultérieures. Il décrit ensuite les ambiguïtés de mon entrée au gouvernement et de mon arrivée à la Primature. Il présente alors tour à tour les dérives de la gestion courante de l’Etat ; la contestation sociale croissante ; les dysfonctionnements de l’Administration et plus largement de l’Etat ; le décrochage par rapport à la Constitution. Il se termine par un constat sur le virage manqué de 2009 et suggère des pistes en vue de sortir de l’impasse actuelle et pour reprendre le chemin de la construction d’un pays prospère. J’espère que chacun lira ce livre avant de se faire une opinion.

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