Dans un entretien à paraitre ce 16 février 2015 dans l’hebdomadaire «L’Aube », l’ONG française Reporters sans frontières indique que la note du Gabon a baissé cette année et se prononce sur la récente mise en garde de la présidence envers les diffamateurs du chef de l’Etat. 2 des 3 questions posées par nos confrères.
Journal L’Aube : Le Gabon, avec le piratage des journaux La Loupe et L’Aube, le harcèlement des journalistes Jonas Moulenda et Désiré Ename,…passe du 98ème rang en 2014 à 95ème rang mondial en 2015 en gagnant 3 points. En français facile, que peut-on retenir ?
RSF : Rapidement, je tiens juste à préciser que la note chiffrée du Gabon a, en réalité, baissé cette année. Ce gain de 3 places est un effet mécanique du classement qui reflète le fait que d’autres pays ont plus baissé que le Gabon, ce qui est logique puisque RSF note une détérioration de la liberté de la presse sur les 5 continents.
En ce qui concerne le Gabon, il y a eu les faits que vous mentionnez et qui sont très inquiétants pour la liberté de la presse et la sécurité des journalistes dans le pays. Par ailleurs cette année marque aussi des attentes déçues en ce qui concerne les évolutions législatives dans le domaine de la presse. En effet, en 2013, Reporters sans frontières avait été consulté par le porte-parole de la présidence, Alain Claude Bilie By Nze qui avait sollicité nos remarques sur un nouveau projet de code de la communication. Nous avions jugé que ce texte était à abolir et à reprendre entièrement, notamment à l’issue de consultations avec les parties prenantes. Donc on attendait des évolutions pour 2014, mais il semble que les choses n’aient pas avancé. Les Etats généraux se sont tenus mais le rapport ne semble pas avoir été distribué, donc il est difficile de savoir quelles mesures concrètes ont été adoptées. Donc un espoir déçu de réforme législative et une pression qui continue de peser sur les journalistes et les journaux qui déplaisent au pouvoir.
Le chef de l’Etat gabonais, Ali Bongo Ondimba menace de poursuivre en justice tous ceux qui le dénigrent et l’insultent par voie de presse, a annoncé vendredi son porte-parole, Alain Claude Bilie By Nze lors d’une conférence de presse hebdomadaire…Cléa Kahn-Sriber, vous n’êtes pas obligée de commenter cette sortie.
RSF : Il existe à mon avis d’autres solutions moins drastiques avant d’arriver aux poursuites en justice, le CNC a un rôle à jouer. La personne lésée peut aussi user de son droit de réponse.
Maintenant, l’insulte par voie de presse est un délit tout à fait susceptible d’être poursuivi en justice. Reste à voir ce qu’on entend par « insulte ». Par exemple questionner la nationalité de quelqu’un, est-ce l’insulter? Il faut aussi considérer les peines assorties aux éventuelles poursuites judiciaires. Pour Reporters sans frontières, les peines doivent être proportionnées et il ne devrait jamais y avoir de peines privatives de liberté pour des délits commis par voie de presse. Dans tous les cas, Reporters sans frontières reste très vigilant par rapport à la situation du Gabon.