La famille de l’étudiant décédé le 20 décembre dernier durant les émeutes consécutives au meeting de l’opposition qui avait été autorisé puis interdit par le ministre de l’Intérieur a décidé d’attaquer la chaine de commandement devant les tribunaux. L’information a été rendue publique le 23 janvier dernier par l’avocat de la famille, Paulette Oyane Ondo.
Alors que la dépouille de Bruno Mboulou Beka, un étudiant tué dans des circonstances non encore élucidées, le 20 décembre dernier, au cours d’un meeting de l’opposition autorisé puis interdit par le ministre de l’intérieur, n’a toujours pas été inhumé les contradictions s’aiguisent, le gouvernement cherche à se dédouaner de ce crime alors que la famille aspire à connaître toute la vérité..
Au cours d’une conférence de presse tenu le 23 janvier dernier, l’avocat de la famille a expliqué que ses clients ont décidé de porter plainte contre les pouvoirs publics afin de faire toute la lumière sur les circonstances de ce décès. «On a porté plainte sur la base des instruments internationaux des droits de l’homme qui disposent qu’en cas d’assassinat, les ayants droit ont droit à la vérité», a déclaré Paulette Oyane Ondo, s’exprimant au domicile familial du disparu en présence des parents de ce dernier. «On attend qu’on nous dise qui a donné les ordres, qui a tiré bref, on veut connaître toute la chaîne qui a abouti à l’assassinat de Mboulou Beka», a-t-elle dit, précisant que la plainte a été déposée au cabinet du premier juge d’instruction. Les ayants droit de Mboulou Beka sont officiellement partie civile.
En réalité, cette plainte vise le président de la République, les ministres de la Défense et de l’Intérieur, les commandants en chef de la gendarmerie et de la police ainsi que le procureur de la République. Et pour cause : prenant appui sur les nombreux traités et accords internationaux relatifs aux droits de l’homme et à la liberté d’expression ratifiés par le Gabon, l’avocat de la famille a expliqué que le mécanisme qui a abouti à la mort de Bruno Mboulou Béka relève de la dissuasion. «L’exécution sommaire de Mboulou participe de la mécanique de dissuasion du despotisme qui gouverne le Gabon. Il est utile pour tout despotisme de répandre la peur dans les cœurs des peuples, pour mieux les soumettre. Sans cette peur, le totalitarisme disparaît. Il fallait donc tuer Mboulou Beka pour faire reculer la masse de compatriotes muselés et désireux depuis longtemps d’exprimer publiquement leur indignation contre l’imposture, le parjure, le faux et l’usage de faux et le mensonge qui sont la marque de fabrique du pouvoir politique gabonais : Mboulou Beka est donc mort pour l’exemple», a précisé Paulette Oyane Ondo, ajoutant : «La famille Mboulou Beka et les milliers de témoins présents savent que l’Etat a abattu Mboule Beka. Elle ne reconnaît donc pas qui ce soit d’autre comme assassin (…) Elle sait que c’est un agent cagoulé de la brigade anti-criminalité (BAC), qui a exécuté Mboulou Beka». «Mboulou Beka est donc tombé sur le champ d’honneur au nom de la liberté et la dignité humaine. Mboulou Beka est mort pour des principes. Il rejoint ainsi les innombrables martyrs gabonais, ces braves femmes et hommes brutalisés, humiliés, tourmentés, appauvris, rendus malades ou éliminés, alors qu’ils voulaient simplement prendre part à la vie publique de leur pays», a-t-elle poursuivi. «Mboulou Beka était un combattant de la liberté, il a voulu ce jour-là, le 20 décembre 2014, démontré son implication personnelle à l’aspiration de l’immense majorité des Gabonais et Gabonaises au changement», a-t-elle encore dit.