La récente grève à la Banque gabonaise de développement (BGD) amène à se pencher sur le cas de cet établissement bancaire. Les choses ne sont pas toujours ce qu’elle paraissent de prime abord.
Motivé par le remboursement intégral des sommes prélevées dans le cadre de la Caisse nationale d’assurance maladie et de garantie sociale (CNAMGS), l’application de la convention collective et la revendication relative au plan social, le mouvement d’humeur déclenché, entre le 12 et 15 janvier dernier, à la Banque gabonaise de développement (BGD) suscite encore des interrogations. Ces revendications nécessitaient-elles réellement une grève ? Le doute persiste. Concernant le premier point, il apparaît que, sur une idée de la direction générale, les délégués du personnel ont librement choisi un cabinet, qui a rendu ses conclusions sur le taux perçu CNAMGS. Or, au moment de déposer leur préavis, les principaux concernés n’ont nullement consulté lesdites conclusions. Selon une source proche du dossier, «le cabinet a déduit qu’il n’y avait aucune erreur. Et il ressort que les prélèvements sont en deçà de ce qui est officiellement admis. Si erreurs il y a, elles sont de petites marges, de l’ordre de 500 ou 1000 francs».
On note, au sujet de l’application de la convention collective, que depuis plusieurs mois déjà l’Association professionnelle des établissements de crédit (Apec), le patronat bancaire et le principal syndicat du secteur, sont en négociation à cet effet. «Ce qui était prévu, c’était que le 9 janvier dernier, les partenaires sociaux du secteur bancaire signent un accord intermédiaire sectoriel. Donc sur ce plan précis, il est étonnant qu’on dépose un préavis de grève sur un accord qui n’est pas encore signé, et qui devait l’être deux jours plus tard», commente un banquier.
Pour ce qui est de la question des effectifs qui figurait également parmi les motifs de la grève, il ressort des avis divers que la BGD en est sureffectif depuis pas mal d’années. Une situation qui s’est aggravée en 2010 et 2011, lorsque cette banque a absorbé le Fonds d’aide et de garantie (Faga) et le Fonds de développement et d’expansion (Fodex). Une quarantaine d’employés s’est donc ajoutée au personnel existant. En dépit de nombreux efforts de la direction générale, qui a ramené le personnel de 333 à 318 sur les trois dernières années, le sureffectif est toujours d’actualité. D’où les recommandations de la Commission bancaire d’Afrique centrale (Cobac), transmises le 29 décembre dernier. «Cette problématique a été comprise par l’ensemble du personnel. D’où des discussions ayant suggéré une baisse des salaires, entre autres, en lieu et place du licenciement. Malheureusement, cette proposition s’est heurtée au refus de certains, qui ne souhaitaient nullement que leurs salaires soient revus à la baisse», explique notre source, non sans préciser que ces discussions ont eu lieu à la Chambre de commerce de Libreville en présence de l’ensemble du personnel.
Quelles sont donc les motivations réelles ou les déterminismes profonds de ce mouvement d’humeur, se demande-t-on alors. Tout semble indiquer que la tête du directeur général soit mise à prix par quelques tireurs de ficelles mus par des atavismes ethniques et provinciaux. «Les grévistes parlent d’absence de dialogue ou du DG qui serait guindé, mais tous ceux qui sont francs en rient ici. De mes 15 ans de carrière à la BGD, je n’ai jamais vu un DG aussi accessible que M. Roger Owono Mba. Je n’en connais pas un qui a autant reçu les syndicalistes de la maison», soutient un employé de la banque.
Dans cet établissement qui dispose d’une infirmerie et où les techniciennes de surface sont des employées alors qu’ailleurs ces services sont externalisés, certaines incohérences subsistent. Plus curieux encore, il est avéré que certains directeurs ont des salaires bien plus élevés que celui du directeur général. A ce jour, la masse salariale s’élève annuellement à pas moins 6 milliards de francs. Or, avec une perte de 20 milliards de francs en 2010, la BGD peine à reprendre du poil de la bête. A cela s’ajoute certaines décisions mitigées comme la suppression des précomptes par l’Etat. Jusqu’à un passé récent, en effet, les crédits étaient accordés aux fonctionnaires et la solde se chargeait des prélèvements dans le cadre du remboursement. Ainsi, depuis juillet 2014, la BGD a accusé un manque à gagner de 380 millions par mois.
Qu’à cela ne tienne, l’équipe dirigeante entend poursuivre sa marche en avant. En 2010 la BGD a ainsi totalisé 33 milliards d’encours de crédits. Aujourd’hui, elle en est à 100. Et pour maintenir ce cap, elle entend maitriser les dépenses pour générer des bénéfices. Un challenge qui repose indubitablement sur la réduction des charges générales.