En guise d’accueil, le nouveau directeur général de Gabon Télévision doit faire face à une grève initiée par le Syndicat national des professionnels de l’audiovisuel public (Synapap).
Après la grève de décembre 2014 pour non-paiement de la Prime d’incitation à la performance (PIP), qui s’était plus ou moins vite réglée, les agents de Gabon Télévision et de Radio Gabon ont lancé un nouveau mouvement d’humeur. Au terme d’une assemblée générale organisée, le 9 janvier courant, à la «Maison Georges Rawiri», siège des deux médias publics, le Syndicat national des professionnels de l’audiovisuel public (Synapap) a décidé d’une nouvelle grève qui, cette fois, vise «le paiement intégral de la prime de rendement des agents».
La RTG, une mine d’or
Selon Aminata Brigitte Ondo, «cette prime pour laquelle les agents de la RTG se sont battus pendant des années n’a pas été payée depuis 3 trimestres»». «On ne perçoit pas notre prime de rendement sous prétexte que nous avons déjà la PIP», confie-t-elle. Pourtant, si une note circulaire du secrétaire général du gouvernement indiquait que la PIP ne supprimait pas certaines primes, pour le leader syndical, qui a regretté de ne percevoir ni prime de risque ni prime vestimentaire, «la prime de rendement est une prime générée par la publicité, qui n’a rien à voir avec la PIP qui, elle, est attribuée par le Trésor public». A en croire ses dires, «la RTG est une mine d’or, dont un audit de 2005 a révélé que plusieurs millions de francs CFA provenaient des annonceurs, chaque mois». Où va cet argent ? «Dans les poches de David Ella Mintsa qui n’a, du reste, nullement été inquiété en quittant la maison», répond la syndicaliste désabusée, avant de regretter : «Il semble même que le nouveau DG, Imunga Ivanga, soit solidaire de ces agissements de l’antiquité, lui qui a tenté d’intimider les agents lors du lancement de la grève». Dès lors, elle estime que les raisons évoquées par la direction générale «cachent en réalité la volonté de l’ancien DG et l’actuel, ainsi que certains responsables de s’enrichir sur le dos agents».
Bizutage ou pratique syndicale ?
Si les problèmes posés remontent à David Ella Mintsa, le prédécesseur d’Imunga Ivanga, celui devrait normalement bénéficier de l’état de grâce, surtout qu’il n’a été installé que le 5 janvier dernier. Le Synapap qui entendait déclencher une grève, dès le terme de son installation, a pourtant été reçu par le nouvel Administrateur directeur général. Il s’est vu infliger un «ultimatum» de trois jours pour régler la question financière dont tout le monde connait pourtant la longue chaine de décision. Il a été, en tout cas, convenu de la mise en place d’une commission devant examiner tous les aspects liés à cette question.
«L’ADG, en association avec le DG de Radio Gabon, Mme Florence Mbani, ont pris les dispositions pour la composition des responsables du patronat devant participer à cette rencontre. Le ministère de la Communication en a fait de même. La date de début des travaux a été fixé au lundi 12 janvier et communiqué au Synapap, qui en dépit de cela a maintenu son mot d’ordre de grève en précisant qu’il serait levé le lundi 12. Cela correspond à affirmer une certaine emprise sur la télévision et la radio, et donc à vouloir montrer au nouveau patron qu’il y a un autre patron ici qui fait la pluie et le beau temps», explique un journaliste de Gabon Télévision. Joint au téléphone, Imunga Ivanga, stoïque, s’étonne de la méthode syndicale peu idoine : «L’usage veut qu’avant une grève il y ait une médiation entre les deux parties, et si il n’y a pas d’entente, cela conduit à un préavis de grève qui, s’il n’aboutit pas à une solution, déclenche la grève en définitive.» Il n’y a donc pas eu de médiation alors que le nouvel ADG qui s’imprègne encore des Dossiers, a besoin d’un peu de temps pour les assimiler.
De fait, le nouveau directeur général, pour tenter de rétablir l’ordre et protéger les infrastructures et les biens publics de Gabon Télévision, tout en veillant au respect du refus de manifester pour d’autres agents ayant assuré le remplacement des grévistes, a fait intervenir les agents des forces de l’ordre. «C’est du jamais vu !», s’est écrié la présidente du Synapap, invoquant «la Constitution (qui) confère le droit de grève à tout citoyen gabonais mécontent d’une situation». Les syndiqués qui regrettent d’avoir été «remplacés» par «certains agents à la solde des dirigeants», alors qu’un autre journaliste explique : «Le droit de faire grève n’est pas supérieur au droit de travailler en toute liberté. Si un membre du Synapap décide de travailler en dépit du mot d’ordre de grève de son syndicat, il en a le droit, tout comme celui d’un autre syndicat ou d’un non syndiqué. Or certains agents ont été menacés, l’un d’entre eux, le réalisateur Emmanuel Bekui, a été molesté et l’accès au studio des actualités télévisés a été bloqué par le Synapap.» La grève devait être levée ce lundi 12 janvier, alors que certains syndiqués martèlent qu’il ne relâcheront la pression jusqu’à la satisfaction totale de leurs revendications.