La réponse du Président de la République aux voeux présentés le 7 janvier 2015 par le Premier ministre, le Président du Sénat, le Président de l’Assemblée, le Président de la Cour constitutionnelle et le Premier Président de la Cour des comptes.
"Monsieur le Premier Ministre,
Madame le Président du Sénat,
Monsieur le Président de l’Assemblée,
Madame le Président de la Cour Constitutionnelle,
Monsieur le Premier Président de la Cour des Comptes,
Je voudrais remercier chacun de vous, pour vos vœux, et pour les mots aimables que vous avez eus pour moi, pour Madame Sylvia BONGO ONDIMBA, Première Dame, et pour tous les membres de ma famille.
Recevez en retour, pour vous-mêmes, pour vos familles et pour tous ceux qui vous sont chers, mes vœux de bonne santé, de paix et de prospérité pour cette nouvelle année.
Monsieur le Premier Ministre,
Dès votre prise de fonction, en janvier 2014, j’ai instruit votre Gouvernement d’accélérer la cadence des réformes afin de booster la croissance économique et de mieux lutter contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale auxquelles un nombre important de nos compatriotes sont de plus en plus exposés.
Les assises sociales qui s’en sont suivi, ont permis l’adoption d’un certain nombre de mesures sociales, visant à manifester la solidarité de la nation à l’écart des couches les plus fragiles de la population pour ce qui est de la santé, des aides sociales conditionnées et des allocations diverses, de même que des initiatives et projets visant à favoriser leur autonomisation par l’auto-emploi.
Ces efforts en faveur de nos compatriotes, principalement les jeunes et les femmes, doivent se poursuivre.
La conjoncture économique mondiale, marquée par les effets conjugués de la chute du prix du baril de pétrole et du taux de change CFA/ dollar, entraine une réduction conséquente de nos ressources. Nous devons, en toute lucidité, mesurer toutes les conséquences que cette situation va avoir sur notre économie et sur nos efforts d’investissement.
C’est pourquoi, Monsieur le Premier Ministre, je vous demande de tenir, dès la semaine prochaine, un séminaire gouvernemental consacré à la crise du pétrole, et aux ajustements que cela nécessite.
Vous devrez de même me proposer, dans les meilleurs délais, un réajustement de la Loi de Finances, afin de tenir de la nouvelle donne, de maintenir le cap des réformes structurelles de notre économie, de poursuivre l’investissement, tout en viellant à ne pas se détourner des objectifs que nous nous sommes fixés dans le cadre de la Stratégie Nationale d’Investissement Humain, mise en œuvre à travers le Pacte Social.
C’est une exigence pour votre Gouvernement qui doit, par conséquent, trouver des poches d’économies permettant de soutenir durablement notre politique sociale.
C’est le lieu de saluer ici, la bonne tenue des négociations collectives globales, ouvertes le 17 novembre dernier, et dont nous attendons le rapport final.
Ce dialogue social, que j’ai voulu le plus large possible, vise à améliorer d’une part, la performance de notre administration, grâce à une meilleure gestion de l’agent public, et à la revalorisation de sa rémunération et, d’autre part, à accroître l’attractivité et la compétitivité de notre économie.
C’est pourquoi, comme je l’ai dit le 31 décembre, lors de mon message de vœux à la Nation, je suis favorable à l’adoption d’une nouvelle grille de rémunération de l’agent public, dans la limite de nos capacités budgétaires.
L’adoption d’un nouveau cadre normatif du droit du travail devrait, de même, aider à rendre notre économie plus compétitive.
Madame le Président du Sénat,
Je saisis l’occasion que m’offre la présente cérémonie pour saluer le travail remarquable abattu par la législature qui s’achève sous votre présidence.
L’histoire retiendra en effet, Madame le Président, que c’est sous votre présidence que la loi relative à la décentralisation, tant attendue, a finalement été adoptée.
Cette loi est un outil indispensable, qui va permettre à nos collectivités locales de jouer pleinement leur rôle d’acteurs de développement dans l’intérêt de nos populations. Elle va de même mieux assoir la démocratie locale, grâce à une meilleure définition des rôles et missions de chaque acteur.
La décentralisation, comme vous le savez, est un des axes majeurs du Plan Stratégique Gabon Emergent. Elle combine des exigences de développement urbain tout autant que la nécessité d’un meilleur aménagement du territoire, pour la prise en compte des populations vivant en zone rurale.
Le gouvernement devra donc s’atteler à prendre les textes d’application pour que la nouvelle loi produise tous ses effets.
Mais, Madame le Président du Senat, l’Histoire retiendra surtout le rôle joué par le Sénat, à travers son président, au moment de la transition politique consécutive au décès du Président Omar BONGO ONDIMBA, en juin 2009. Cette transition réussie, qui a été salué par la Communauté Internationale dans son ensemble, a démontré la solidité de nos Institutions, la stabilité de notre démocratie et la maturité de notre peuple. Cette transition réussie, l’Histoire retiendra aussi qu’elle fut présidée par une Dame de grande qualité, la première femme président du Sénat.
Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale,
Bon nombre de nos compatriotes, nous le savons tous, éprouvent d’énormes difficultés à accéder aux services de l’eau et de l’électricité. Cette situation, par ses excès, est devenue inacceptable. C’est pourquoi, j’ai demandé au gouvernement et à la SEEG de s’employer davantage à améliorer les conditions d’accès à ces réseaux.
Cet engagement se traduit par un protocole d’accord, dont le but est de permettre aux compatriotes, sans ressources ou à faibles revenus, de bénéficier à partir de 2015 :
D’un branchement social avec un abattement de 25% sur les coûts en vigueur ;
D’un échelonnement de paiement en 12 mensualités sans majoration d’intérêts ;
De la suppression du paiement de l’avance sur la consommation.
Ces mesures, ainsi que je l’ai annoncé dans mon message à la Nation du 31 décembre dernier, viennent en complément de tout le dispositif déjà mis en œuvre depuis les dernières Assises sociales tenues au mois d’avril 2014 à Libreville.
En ce qui concerne le logement, le gouvernement devra poursuivre les efforts déjà engagés, afin de permettre à nos compatriotes dans le besoin, de bénéficier d’un logement ou de disposer d’un terrain viabilisé.
Les programmes initiés depuis quatre ans dans ce domaine se concrétisent progressivement, malgré les dysfonctionnements que l’on peut encore observer.
A propos de nos universités, et tout particulièrement l’UOB, je déplore profondément que ce haut lieu, conçu pour être le lieu par essence de l’élaboration et de la transmission des savoirs, s’inscrive depuis plus de vingt ans maintenant, dans une forme de crise que certains voudraient endémique.
Ceci doit cesser. De même que doivent cesser les violences aux personnes, principalement aux enseignants et aux personnels d’encadrement, tout comme la destruction des biens publics et privés sur les campus universitaires.
Il est vrai que de nombreux problèmes demeurent sur les conditions de vie et de travail aussi bien des enseignants que des étudiants.
Mais le cycle de violence observé sur les campus est un facteur aggravant de ces problèmes, dans la mesure où la sérénité nécessaire à la résolution durable des problèmes manque cruellement.
Le gouvernement du Professeur Daniel ONA ONDO devra s’atteler, en lien avec les partenaires appropriés, à apporter des solutions définitives aux problèmes qui minent depuis des décennies ce secteur, ô combien essentiel pour l’avenir de notre pays.
Quant à la diversification de notre économie, il convient de noter qu’elle se réalise progressivement et repose désormais sur des fondements solides. Lesquels qui ont permis de densifier notre croissance, grâce notamment à la valorisation des secteurs minier et forestier. Cet effort devra s’accentuer et s’étendre à d’autres ressources.
C’est dans ce cadre que j’ai lancé, le 22 décembre dernier, le programme GRAINE. Il s’agit, comme vous le savez déjà, de tirer le meilleur avantage possible toutes nos potentialités dans le secteur de l’agriculture.
Ce secteur, mieux valorisé, devraient nous aider à assurer notre sécurité alimentaire, à offrir de l’emploi et des revenus à ceux qui voudront se lancer dans le travail de la terre, notre seule vrai richesse. C’est en effet près de 20.000 emplois que le programme GRAINE va générer.
Ce programme contribuera en outre à un meilleur aménagement du territoire, avec la construction de près de 3000 km de routes non bitumées, et à l’amélioration des conditions de vie des populations par la construction des infrastructures de base : écoles, dispensaires, hydraulique villageoise, électricité.
Monsieur le Président de l’Assemblée Nationale, le tableau que vous venez de dresser montre bien que vous avez une parfaite connaissance du projet et des ambitions que je porte pour notre pays.
En parlementaire avisé, soucieux du contrôle de l’action gouvernementale, vous en avez vu la traduction sur le terrain, avec les absences ou retards observés par endroit. Vous ne manquerez donc pas, j’en suis certain, de voter les crédits nécessaires à la poursuite et à la finalisation de certains chantiers.
Je ne voudrais pas terminer mon propos sans vous témoigner toute ma gratitude pour les mots aimables et encourageants à l’endroit de la Première Dame, dont le moins que je puisse dire est que nous en attendons tous une plus grande ardeur à la prise en compte des problèmes que vivent nos concitoyens.
Madame le Président de la Cour Constitutionnelle,
Madame de la Présidente de la Cour Constitutionnelle nous a rappelé combien l’Etat de droit et la démocratie sont consubstantiels du respect de la loi et de la paix.
Tout le monde s’accorde à reconnaitre que notre pays, celui que nous ont légués les présidents Léon MBA et Omar BONGO ONDIMBA, est un havre de paix.
Mais tout le monde doit aussi savoir que la paix n’est pas un acquis définitif. C’est un lègue qu’il convient d’entretenir avec grand soin. Chacun doit y prendre toute sa part.
Pour ce qui me concerne, garant politique de cet héritage commun, je ne permettrai à personne de le menacer ou de le remettre en cause. Je ne laisserai personne fissurer ce pilier important de notre pacte républicain et de notre vivre ensemble.
La préservation de la paix commence par le respect de la loi et des institutions. Nul ne peut délibérément fonctionner en marge de la loi et prétendre être un artisan de paix.
La préservation de la paix, c’est également l’acceptation de l’autre dans sa différence politique, idéologique, religieuse ou culturelle.
Préserver la paix, c’est promouvoir la liberté, la démocratie, l’Etat de droit, le dialogue constructif, en offrant à toutes les sensibilités qui le veulent, la possibilité de contribuer à l’effort de construction nationale.
C’est dans ce sens que j’ai rappelé, le 31 décembre, que j’ai toujours été, je suis, et je resterai un homme de dialogue.
Mon engagement politique antérieur prouve que j’ai toujours œuvré à la promotion de la démocratie et des libertés, y compris sous le parti unique.
Je ne suis donc pas un nouveau converti à la démocratie et aux libertés.
C’est parce que j’ai toujours été un homme de dialogue que dès mon accession à la magistrature suprême, j’ai indiqué que je restai ouvert au dialogue et que j’étais prêt à travailler avec ceux qui le souhaitaient.
Ceux des partis politiques qui l’ont accepté, mènent librement leurs activités, dans un dialogue permanent et constructif.
De nombreux partis politiques de l’opposition, qui ont accepté de signer le Pacte Social, apportent leur contribution à l’amélioration des conditions de vie de nos concitoyens, tout en marquant leurs différences.
Le dialogue est donc bel et bien en œuvre.
Et, afin de permettre à un plus grand nombre d’y participer, j’ai récemment invité le gouvernement et le parlement à travailler à amender la loi sur les partis politiques, notamment dans ses dispositions relatives aux conséquences découlant de la dissolution des partis politiques.
Comme vous l’avez souligné, Madame le Président de la Cour constitutionnelle, rares sont les œuvres humaines qui traversent les époques sans devoir être revisitées, dans le respect des normes de construction.
Dans cette optique, nous devons convenir que le respect des lois en vigueur est la condition essentielle à toute avancée démocratique.
En observant le fonctionnement des institutions des pays amis au nôtre, et qui sont des modèles de démocratie, il est remarquable de constater le respect quasi religieux dont ils font montre s’agissant des dispositions de leurs constitutions respectives, et des échéances électorales.
C’est ainsi que le Président de l’une des plus grandes démocraties au monde, poursuit son mandat électif, en dépit d’une opposition devenue majoritaire au parlement.
Bon nombre de nos politiciens, qui s’érigent en donneurs de leçons de démocratie, et qui ne disposent parfois d’aucun mandat électif, feraient mieux de s’en inspirer.
On ne peut pas se prétendre démocrate et poser des actes répréhensibles contre son pays et ses institutions car, comme le disait Robespierre, « l’amour de la patrie et de ses lois est l’âme de la démocratie ».
La démocratie est par nature débat, confrontation d’idées et d’intérêts. Cependant, dans les situations de contradiction idéologique ou politique, l’esprit de tolérance et la volonté de dialogue doivent l’emporter sur le refus et le repli sur soi. De même, l’intérêt général doit toujours l’emporter sur l’individualisme, la solidarité sur les corporatismes, le sens de la nation sur l’esprit partisan, la justice sociale sur l’abus des profits.
Notre pays a besoin d’unité, de cohésion, de paix et de sécurité. Cela ne se négocie pas. Je ne le négocierai pas.
Nos concitoyens ont besoin de ressentir cette cohésion dans chacun des actes que nous posons.
L’appartenance à une même nation, à une même patrie ne doit pas être un moment d’exception lié à une émotion particulière, elle doit au contraire être le fondement même de notre citoyenneté.
C’est cela le patriotisme. Il est à la source de toute volonté nationale. Il doit se vivre tous les jours. Il doit être notre force. Il doit être notre âme. Il doit être une exigence : Gabon d’abord !
Etre Gabonais, c’est aimer son pays comme son bien le plus précieux. Etre Gabonais, c’est avoir la conscience et la volonté de bien faire. Etre Gabonais, C’est œuvrer quotidiennement à faire progresser son pays, à contribuer à son développement.
Permettez-moi, Madame le Président de la Cour Constitutionnelle, de saisir cette occasion des vœux de nouvel an pour vous féliciter et, à travers vous l’ensemble de l’institution que vous représentez, pour avoir doté la Cour Constitutionnelle de notre pays, d’un siège digne de son rang et de ses missions.
Monsieur le premier Président de la Cour des Comptes,
La justice est une quête permanente pour nos concitoyens. Elle est au fondement de l’Etat de droit. Elle représente, pour nos populations comme pour nos administrations et entreprise, le dernier rempart face aux risques de l’injustice et des désordres.
Je vous exhorte donc à poursuivre toutes les actions mises en œuvre par le Corps judiciaire, notamment celles liées à l’indépendance de la Justice, à son équilibre et à son équité, afin de consolider davantage cet Etat de droit dans lequel chaque Gabonais, protégé dans ses droits et ses libertés, assure également ses devoirs et ses responsabilités vis-à-vis de la collectivité.
C’est ce que nos concitoyens attendent de nous. Nous devons tout mettre en œuvre pour y parvenir. J’aurai l’occasion d’y revenir lors de la tenue du prochain Conseil Supérieur de la Magistrature.
D’ores et déjà, je demande au gouvernement de vous accompagner dans cette lourde mais exaltante mission pour une justice au service de la nation.
A chacun, je réitère mes meilleurs vœux de santé, de bonheur et d’abnégation au travail pour l’atteinte de nos objectifs communs.