Le tam tam africain, sur une corde raide, ne résonne plus aussi fort comme du temps de sa magnificence.
Le désastre est total, tout s'écroule à petit feu : équipements atteints d'obsolescence chronique, absence de moyens roulants, une grille des programmes datant du moyens âge et animée par des voix qui nous rappellent amèrement la Radio Télévision Gabonaise (RTG) des années 70, une comptabilité hasardeuse aux mains d'une clique parentèle, un redressement judiciaire interminable et aux contours flous, des agents blasés et abusés par le comportement irresponsable des dirigeants véreux... Voilà résumée l'ambiance dans laquelle patauge la station panafricaine Africa N°1 depuis ces dernières années.
Sous respiration assistée, la vie de la radio africaine est très précaire et donc préoccupante. La structure, très mal en point et qui tient en vie grâce à une perfusion financière de l'Etat gabonais, a vu sa santé se dégrader gravement.
Pourtant, lorsqu'est lancée l'opération de redressement judiciaire menée par le cabinet de maître Roger-Valère Moussadji, nombreux y avaient vu des signes annonciateurs d'un prompt rétablissement après une longue période d'hibernation.
Ce brave citoyen avait, malgré les traquenards et les coups bas visant à torpiller sa tâche, bouclé le dossier du redressement et rendu ses conclusions.
Victime d'une machination, voire d'un procès en sorcellerie de la part de ceux dont les prébendes étaient mises à mal par ce redressement, une pieuvre géante ayant des tentacules au ministère de la Communication, au Comité de privatisation et au sein même d'Africa N°1, ces derniers avaient organisé sa mise en isolement carcéral qui aura duré un an sans qu'aucun non-lieu n'ait été prononcé dans cette affaire aussi alambiquée que les charges retenues contre lui.
Les conclusions de maître Mousssadji prévoyaient la recapitalisation de la Boîte et l'entrée de nouveaux partenaires stratégiques ainsi que l'inventaire de niches de recettes. Depuis lors, l'on se demande ce que sont devenues les conclusions de l'Etude Moussadji. Ni maître Ngondet Bibang nommé syndic judiciaire en lieu et place de Maitre Moussadji, ni le tribunal de Libreville, encore moins le Comité de privatisation et le ministère de la Communication, ne semblent capables de nous éclairer davantage sur la situation actuelle de cette radio dont le capital est détenu à 52% par les Libyens.
Depuis ces dernières années, l'Etat gabonais, en effet, se saigne. Le paiement des salaires aux agents et autres charges de fonctionnement, sont assurés au lance-pierre par le Trésor public. Toutes ces dépenses supplémentaires assurées par l'actionnaire minoritaire qu'est l'Etat gabonais (35%) auraient pu être prises en compte dans la perspective d'une recapitalisation. Des traces de cette dépense existent-elles dans un compte courant d'associés, comme le suggérait maître Moussadji afin que le Gabon, dans le cas d'une possible recapitalisation, devienne actionnaire majoritaire?
Ne pouvant plus supporter une situation de plus en plus incertaine, les agents, depuis plusieurs semaines, observent une grève pour exiger un mieux-être et des conditions de travail les meilleures.
La situation désastreuse d'Africa N°1 était devenue si préoccupante que l'administration financière actuelle dont les priorités sont ailleurs, n'arrivait même plus à assurer le carburant ou remplacer un disque d'embrayage sur la seule voiture, un Pajero, mille et une fois rafistolé, qui assurait jusqu'ici et laborieusement le transport du personnel.
L'incurie et l'incompétence des dirigeants qui ignorent tout d'une radio et pour qui Africa N°1 se résume uniquement au périmètre de leurs bureaux qui passent pour la priorité des priorités, sont un autre handicap qui plombe les chances de cette radio de rebondir dans ce vaste univers médiatique très concurrentiel.
Qu'attendre de dirigeants pour qui changer les ampoules des studios, mettre à la disposition des journalistes et producteurs de l'encre dans des imprimantes, l'abonnement aux agences de presse malgré les moyens alloués par l'Etat gabonais pour cela ; passent pour des besoins accessoires dont ils ne se soucient que très peu et cela, malgré les réclamations et plaintes de la part des préposés à l'antenne.
De nombreuses sociétés-écrans qui sont des outils de captage de fonds et autrefois dénoncées, ont toujours la vie dure et érodent sérieusement les maigres ressources que l'Etat met à la disposition de l'entreprise.
A Africa N°1, le niveau de turpitude des dirigeants dépasse les limites de l'inacceptable, si bien qu'ils ont perdu tout crédit aux yeux des employés.
Voilà pourquoi au nombre des revendications dans leurs cahiers de charges, ils exigent la nomination de nouveaux managers à même de gérer proprement cette boite sinistrée par de vastes magouilles.
Qu'attend le Tribunal du Commerce de Libreville pour mettre fin à cette opération de redressement judiciaire et mettre l'actionnaire libyen face à ses responsabilités? A qui profite la prolongation de l'opération de redressement judiciaire dont les conclusions, pourtant, sont connues?