Peu ou pas compris sur la notion de «trouble à l’ordre public» par les avocats des 101 manifestants présumés du 20 décembre 2014, le procureur de la République a tenu à faire de la pédagogie.
Pour Sidonie Flore Ouwé qui s’est quelque peu emportée à certains moments du procès ouvert le 5 janvier courant, et qui opposait le ministère public aux 101 manifestants présumés du 20 décembre 2014, «le devoir d’un magistrat, et davantage celui du procureur de la République est de faire de la pédagogie». Une pédagogie qui, selon elle, doit bénéficier, aussi bien aux populations, souvent mal ou peu informées, qu’aux hommes de loi eux-mêmes. L’exercice, périlleux et quelques fois raillée a eu le mérite d’être tenté, qui était axé pour l’essentiel sur la notion de «trouble à l’ordre public et à la sécurité». Si à l’ouverture du procès, le procureur de la République près le tribunal de Libreville a indiqué que le délit est réprimé par les articles 79 et 81 du Code pénal, elle n’en a pas moins suscité quelques inquiétudes de la part des parents des accusés et des curieux massés dans la salle d’audience, en assimilant la notion à «un vase dans lequel on peut tout mettre». Une comparaison qu’elle n’a pas reniée, avant de se justifier au terme du procès.
De fait, si la loi gabonaise, copiée sur le modèle français, s’est peu à peu tropicalisée au fil des interprétations, il n’en demeure pas moins, estime Sidonie Flore Ouwé, qu’elle reste «la loi», et ne devrait par conséquent souffrir d’aucune manipulation hasardeuse. «J’ai eu l’impression qu’il y avait des amalgames concernant cette notion», a-t-elle regretté, avant d’ajouter : «Il y a trouble à l’ordre public lorsqu’il y a violation de la loi, notamment lorsque des individus attentent à la paix, la quiétude et à la sécurité des autres.» Pour elle, si la notion paraît évidente lorsque le trouble provoque un danger ou une restriction des libertés des autres citoyens, l’on peut regretter qu’elle soit plus ou moins floue pour l’affaire jugée depuis le 5 janvier. «Pour le cas d’espèce, il s’est agi des attroupements non armés et de la soustraction frauduleuse d’un bien appartenant à autrui : le vol», a-t-elle justifié, ajoutant que les citoyens, ayant accepté d’aliéner une partie de leurs libertés à la force publique, ils doivent être défendus par celle-ci lorsque leur sécurité est menacé.
Pour Sidonie Flore Ouwé, les attroupements non autorisés aux abords de Rio, ceux enregistrés dans plusieurs quartiers alentour voire au-delà ont troublé la quiétude de paisibles citoyens, et partant l’ordre public. D’où l’intervention des agents des forces de l’ordre, de manière plus ou moins formelle. Pour l’heure, la centaine d’accusés dont 26 ont été entendus à l’ouverture du procès, après avoir passé les fêtes de fin d’année dans les geôles, doit encore attendre d’être libérée pour apprécier cette petite leçon de chose.