Le jeu de ping-pong entre les membres de l’opposition et le gouvernement pour savoir à qui incombe la responsabilité des événements survenus le 20 décembre dernier au quartier Rio de Libreville et qui ont entrainé le décès de l’étudiant gabonais, Bruno Mboulou Beka, n’est pas près de s’arrêter. Après l'interpellation du ministère de l'Intérieur sur ce dossier, le Fuopa, par la voix d'un de ces leaders, Jean de Dieu Moukagni-Iwangou, nie à son tour toute responsabilité dans le triste bilan des évènements du 20 décembre, arguant le meeting qui devait se tenir ce jour, n’avait jamais été interdit. Ses camarades et lui n’étaient donc pas, selon lui, dans l’illégalité.
Samedi 3 janvier, Jean de Dieu Moukagni Iwangou, un des leaders du Front uni de l'opposition pour l'alternance (Fuopa) a tenu un point de presse à sa permanence politique située au quartier Glass. Lors de cette conférence, le membre de l’opposition accompagné de ses pairs, a démenti et refusé toute responsabilité dans les événements malheureux survenus le samedi 20 décembre lors du meeting de Rio, et qui ont causé le décès de l’étudiant Bruno Mboulou Beka.
A travers ce point de presse, il était question pour le Fuopa de faire la lumière sur la marche du 20 décembre et affirmer que celle-ci n'avait jamais fait l’objet d’une interdiction de la part des autorités compétentes, raison pour laquelle elle a eu lieu, selon Jean de Dieu Moukagni Iwangou. Cependant, si tel est le cas, pour quelle raison le ministre de l'Intérieur les avait-il mis en garde la veille de la marche pour signifier les raisons du refus de cette manifestation ? Et pourquoi juste après la manifestation, plusieurs membres du Fuopa avaient crié à l’injustice en évoquant l’interdiction qui leur avait été faite de tenir ce meeting ?
Selon Jean de Dieu Iwangou Moukagni, le ministre de l'Intérieur aurait fait preuve d'abus de pouvoir en entravant le travail du gouverneur et d'autres autorités locales, en violation des lois établies.
« Au nom de la loi, j’affirme avec force, et je persiste pour dire devant toutes les opinions, que le meeting du samedi 20 décembre 2014, convoqué régulièrement par les membres du Front de l’Opposition pour l’Alternance n’a jamais été interdit.
Sous la foi de cette affirmation, l’usage des armes de la République contre un Peuple aux mains nues place le régime gabonais au centre d’un scandale, qu’il lui appartient d’assumer seul, devant la communauté nationale et internationale.
Chers amis, en République gabonaise, les réunions publiques sont régies par la loi n°48/60 du 8 juin 1960. Puisque la loi est l’expression absolue de la volonté du Peuple, je vous invite à revisiter cette loi, (...) afin que nous puissions tous et chacun, découvrir l’abus du droit, qui se trouve au fondement d’une forfaiture, aussi insoupçonnée qu’inacceptable. (...), à l’article 2, dispose que les réunions publiques sont libres. C’est le principe. En son article 5, la loi précise que les organisateurs sont toutefois tenus à une Déclaration préalable, fournissant les indications utiles sur le jour, le lieu et l’heure de la réunion envisagée. L'article 6, la loi dispose que l’autorité compétente, et donc destinataire de la Déclaration préalable est l’autorité locale, notamment la Mairie là où elle existe. Au 9e article, la loi reconnait à l’autorité locale, le droit d’interdire la réunion publique, si sa tenue présente une menace pour l’ordre public », a-t-il déclaré.
De ce fait, pour ce dernier, la demande d’organisation de meeting présentée par sa coalition a été formulée légalement. Ce qui n'est pas le cas pour l'interdiction du ministère de l'Intérieur.
« Cette interdiction doit être écrite, motivée, notifiée aux organisateurs, et transmise à l’autorité hiérarchique déconcentrée, qui est le Préfet, donc le Gouverneur, à qui la loi reconnait le pouvoir, ou d’entériner l’interdiction, ou de la rapporter. En son article 11, et pour veiller au respect de l’ordre public, l’autorité compétente peut déléguer sur les lieux un préposé de l’administration, avec droit d’arrêter la réunion. En application des dispositions légales, qui lui sont parfaitement opposables, l’on doit constater que :
A la Déclaration préalable, Monsieur le Ministre de l’intérieur a institué une autorisation préalable, qu’aucune disposition légale ne prévoit.
En agissant ainsi, il a commis un abus du droit ;
A l’autorité locale, instituée par le législateur pour garantir l’efficacité de la loi sur toute l’étendue du territoire, Monsieur le Ministre de l’intérieur a ramené autour de sa seule personne un centralisme réducteur, qui neutralise les pouvoirs du Gouverneur, et d’installer à l’envie cette discrimination qui, pour le même objet et pour le même jour, l’a conduit à autoriser le Parti Démocratique Gabonais (PDG) à tenir une marche à Ntoum, après avoir écumé l’ensemble du territoire, et de refuser au FRONT, le droit de tenir son premier meeting à RIO.
En agissant ainsi, il a commis un abus du droit ;
A la décision motivée, instituée aux fins d’interdiction, et notifiée aux organisateurs, Monsieur le Ministre de l’intérieur n’a pris aucune décision, en l’occurrence un Arrêté, privant les organisateurs de toute possibilité de recours.
En agissant ainsi, il a commis un abus de droit », a t-il insisté.
Avant de rajouter : « A partir de ce moment, nous sommes en face d'un véritable scandale, que le régime va devoir, seul, assumer devant la communauté nationale et internationale ».
Toutefois, ce ne sont pas ces déclarations qui serviront la cause des personnes arrêtées lors de cette manifestation le 20 décembre dernier et qui doivent comparaitre devant le parquet de Libreville ce lundi 5 janvier.