Après les échauffourées du 20 décembre au carrefour Rio où le meeting interdit de l’opposition a été violemment réprimé par les forces de l’ordre et de sécurité, de nombreux leaders et militants de l’opposition disent être victimes de harcèlement de la part des forces de l’ordre.
Relayés par les réseaux sociaux, des nouvelles faisant état de tentatives d’enlèvement de leaders et militants de l’opposition circulent depuis quelques jours. Le dernier cas en date est celui de Paul-Marie Gondjout, secrétaire exécutif adjoint chargé des Elections et Libertés publiques à l’Union Nationale (UN). Selon des sources familiales, il aurait échappé, le 23 décembre dernier, à un enlèvement mené par des éléments de la Police judiciaire. Il se dit que l’homme serait dans le viseur des autorités du fait d’un activisme politique qui ne serait pas pour plaire.
On se rappelle, en effet, que Paul-Marie Gondjout a lancé, début décembre 2014, un mouvement censé faire respecter les dispositions de l’article 10, alinéa 4 de la Constitution. A cette occasion, il affirmait qu’«en 2009 le Gabon est entré dans une accélération de sa déchéance après le coup d’état d’Ali Bongo Ondimba. Cette déchéance prend forme sur tous les plans : politique, économique et sociale». Ce jour-là, il avait également brandi son acte de naissance et une attestation du Centre d’archives d’état-civil de Nantes, qui dit ne pas avoir Ali Bongo dans ses registres. Les proches de Paul-Marie Gondjout estiment que ce fait serait à l’origine de la menace qui pèse sur sa liberté et même sa vie.
D’une manière générale, la psychose gagne du terrain dans le pays, notamment au sein de l’opposition. Depuis quelques jours, Luc Bengone Nsi n’a cesse d’annoncer sur sa page Facebook qu’à plusieurs reprises, des forces de l’ordre ont essayé de l’interpeller. Pis, dans la journée du 23 décembre, de nombreux leaders et militants du Front de l’opposition pour l’alternance, notamment Jean Ping, Paulette Missambo, Luc Bengone Nsi, Zacharie Myboto, Moukagni-Iwangou et Paul-Marie Gondjout, ont reçu des convocations du service des affaires criminelles de la Police judiciaire.
A travers un communiqué en date du 23 décembre 2014, les personnalités politiques convoquées estiment que le pouvoir à l’intention de «procéder à l’arrestation pure et simple de tous les leaders du Front, pour tenter de décapiter l’opposition véritable». «Les dirigeants du Front prennent acte de cette option choisie par Ali Bongo Ondimba pour résoudre les problèmes du Gabon, et décident dans un esprit républicain de se rendre à la police judiciaire le mercredi 24 décembre à 10 heures devant les officiers commis, et naturellement, devant les juridictions déjà choisies», lancent-ils, non sans relever les menaces d’enlèvement qui pèsent sur eux ainsi que sur leurs familles. Prenant l’opinion nationale et internationale à témoin, ils affirment «que rien, ni personne n’arrêtera la détermination du peuple à réaliser l’alternance déjà engagée».
En attendant de voir ce qui sortira de ce rendez-vous avec la Police judiciaire, le porte-parole du Front de l’opposition pour l’alternance, François Ondo Edou, ne serait toujours pas revenu à son domicile après son interpellation. Comme lui, des dizaines d’autres manifestants ont été arrêtés et d’autres sont portés disparus.
Ayant abordé, les manifestations du 20 décembre dernier autour de Rio, le conseil des ministres du 23 décembre «s’est indigné du comportement de certains compatriotes qui ont délibérément choisi la haine et la violence tant verbale que physique comme moyen d’expression politique», note-t-on dans le communiqué final du conclave gouvernemental où il est souligné que «face à ces actes de barbarie inacceptable et inadmissible, toutes les dispositions seront prises pour que leurs auteurs soient retrouvés, jugés et condamnés avec la plus grande fermeté». L’annonce du programme, pourrait-on dire.