De toutes les assemblées générales tenues par l’Onep le 13 décembre 2014, celle de Port-Gentil, QG de ce syndicat, a été la plus houleuse, avec des accusations contre un conseiller du président de la République et de graves menaces sur le terminal pétrolier du Cap Lopez qui permet aux bateaux d’évacuer la production pétrolière du Gabon vers le marché international.
Après l’échec des discussions avec le gouvernement sur les préalables, l’Organisation nationale des employés du pétrole (Onep) a organisé des assemblées générales dans les villes de Libreville, Gamba et Port-Gentil, le 13 décembre dernier. Pour le bureau national, il était question de rendre compte à la base et demander la conduite à tenir suite au blocage noté à l’issue des discussions avec le Premier ministre, chef du gouvernement.
Le conclave de Port-Gentil, animé par le Secrétaire général adjoint, Sylvain Mayagui Binet, a donné lieu à des joutes orales d’une violence qui témoigne de l’exaspération de la base devant «le mépris affiché par le gouvernement qui au lieu de régler les problèmes posés par l’Onep préfère faire venir des bateaux remplis de carburant pour faire face à la pénurie observée après le lancement du mouvement de grève». Un «constat» fait par un délégué du personnel qui accuse directement le conseiller stratégique du chef de l’État, Arnaud Engandji, ancien membre du bureau national de l’Onep, d’être à l’origine de cette situation. «Aujourd’hui c’est un ancien de l’Onep qui supervise, de nuit le chargement des camions citernes à Libreville.
C’est le même Arnaud Engandji qui, sur sa page Facebook, annonce l’arrivée d’autres bateaux pour ravitailler la capitale. C’est à croire que le gouvernement veut nous avoir à l’usure. Il est temps que nous prouvions à monsieur Engandji qui croit connaître les points faibles de l’Onep que nous avons plus d’une corde à notre arc», a lancé le même délégué, visiblement très remonté. «Notre syndicat est aujourd’hui à la croisée des chemins. Son destin se joue maintenant. Il est clair que tout est mis en œuvre pour nous affaiblir. Un grand complot a été mis sur pied avec les anciens membres du bureau national afin de réduire à jamais l’Onep au silence. Alors, il est grand temps que tous les membres du bureau national qui se trouvent encore à Libreville rentrent à Port-Gentil pour mettre en application notre plan B», a soutenu un autre délégué du personnel.
Toutes les interventions durant cette assemblée générale, ont ainsi opté pour le durcissement du mouvement afin de «contraindre le gouvernement à plier». «Qu’attendons-nous pour fermer le Cap Lopez ? Pourquoi laissons-nous nos pères et grands frères déjà à la retraite reprendre les postes des grévistes pour relancer la production ? Pourquoi ne suivons-nous pas l’exemple de la Sogara qui est en arrêt total depuis le début de la grève ? Pourquoi certains adhérents de l’Onep travaillent-ils alors que d’autres sont en grève ?» s’est interrogé un autre encore dans une salle survoltée. Il a fallu au secrétaire général adjoint beaucoup de tact pour calmer les esprits échauffés et dissuader les adhérents de se rendre au Cap Lopez comme ils l’avaient décidé pour fermer le terminal et mettre ainsi un coup d’arrêt à la production.
Un comité de crise a donc été mis en place dont la mission est de mettre sur pied une série d’actions à mener à partir de ce lundi 14 décembre. Ces actions jugées stratégiques n’ont pas été dévoilées mais certaines indiscrétions évoquent la radiation du syndicat des adhérents non grévistes, des démarches empêchant les retraités de remplacer les grévistes, l’organisation des grands piquets de grève pour stimuler la mobilisation et éventuellement la fermeture du terminal du Cap Lopez.
«Nous poursuivrons notre mouvement de grève jusqu’à la satisfaction des quatre préalables contenus dans le préavis déposé sur la table du gouvernement. Tous les travailleurs du secteur pétrolier et activités connexes sont prêts à aller jusqu’au bout même si le prix à payer s’avère lourd», a déclaré, pour conclure, le secrétaire général adjoint, Sylvain Mayagui Binet.
Les quatre préalables énumérés dans le préavis adressé au gouvernement concernent la suspension des prélèvements pour le compte de la Caisse nationales d’assurance maladie et de garantie sociale (CNAMGS), la réintégration des deux délégués du personnel de Perenco licenciés au lendemain de la grève de 2013, l’expulsion de l’actuel directeur des opération de STSI Boccard, Richard Lechien, qui a licencié 53 employés et la présence des responsables du groupe Oil Libya à la table des négociations. De tous ces points, les deux derniers ont trouvé un écho favorable aux yeux du gouvernement.