Dans un communiqué paru dans Echos lundi 10 novembre, le Front uni de l’opposition pour l’alternance invitait le peuple gabonais à descendre dans la rue ce jeudi 13 novembre, pour manifester et demander le départ du chef de l’Etat, Ali Bongo Ondimba. Une initiative inspirée par le livre du journaliste Pierre Péan « Nouvelles affaires africaines », et dont les instigateurs ne semblent pas mesurer la dangerosité…
En 1995, dans le but de prolonger son mandat, Henri Konan Bédié, alors président de Côte d’Ivoire, met sur pied le principe de « l’Ivoirité », une politique sectaire visant à établir une distinction entre les « Ivoiriens de souche » et les « étrangers ». Une manœuvre qui lui permettra d’écarter son principal rival de l’époque, Alassane Ouattara dont il évoquait les « origines burkinabés ». La suite, on la connaît…
Plus d’une décennie d’instabilité politique, guerre civile, de nombreuses familles endeuillées, économie à l’agonie.
Aujourd’hui, si la Côte d’Ivoire se remet tout doucement de cette période traumatisante de son histoire, cette dernière devrait enseigner d’autres pays et d’autres leaders politiques sur la dangerosité de tels courants de pensées.
Mais à en juger l’attitude inconsciente et égoïste de certains leaders politiques gabonais, plus guidés par une soif vampirique de pouvoir que par un réel patriotisme, ce qui est arrivé à la Côte d’Ivoire « n’arrive qu’aux autres »…
Très inspirés par le livre « Les nouvelles affaires africaines » de Pierre Péan, devenu plus sacré que la Sainte Bible des Chrétiens ou le Coran des musulmans, les membres du Front Uni de l’Opposition pour l’Alternance appellent, depuis quelques jours, le peuple gabonais à la haine.
Dans un communiqué publié dans le journal Echos du Nord, ces derniers, visiblement aveuglés par leur haine viscérale envers le chef de l’Etat et sa famille, saisissent le prétexte du livre de Péan pour sortir du bois et appeler à la « révolution ».
L’argument ? « Le Blanc a dit qu’Ali n’est pas Gabonais, alors il ne l’est pas » ! Rien que ça.
Alors, pour se faire entendre, ils demandent « au peuple » - entendez, aux Gabonais les plus vulnérables, ceux-là mêmes qui vivent dans des conditions difficiles et sont plus perméables à des discours extrémistes, les enfants désoeuvrés des quartiers sous-intégrés qui, pour quelques billets, seraient prêts à devenir des casseurs d’un jour – de descendre dans la rue, sans autorisation préalable du ministère de l’Intérieur, et participer à la division des Gabonais et à l’exacerbation de la haine contre les étrangers vivant dans notre pays.
Ce scénario, déjà vécu par les Gabonais le 15 Août 2012 lors d’un meeting non autorisé où de violents affrontements entre casseurs et forces de l’ordre avaient blessé de nombreuses personnes et causé la mort d’une jeune fille, avait-il réellement servi les Gabonais ?
Donner l’exemple…
Ces appels récurrents au soulèvement, à la xénophobie, au tribalisme et à la haine apparaissent clairement, pour bon nombre d’observateurs comme une réelle volonté de manipulation du peuple car, constat a été fait que pendant ces manifestations illégales, les descendants de ces leaders politiques, manquent toujours cruellement à l’appel !
A-t-on déjà croisé la fille d’Eyéghé Ndong, le petit-fils de Mayila ou de Myboto, pancarte à la main, chef de file d’une manifestation orchestrée par leurs patriarches ?
Ne font-ils pas partie de cette jeunesse « qui doit descendre dans la rue pour changer le pays » ?
Ou alors, doit-on comprendre que la « rue » n’est l’apanage que d’une certaine catégorie de Gabonais ?
Bien à l’abri à l’étranger ou dans les prestigieuses villas de leurs parents, anciens barons du système qu’ils ont eux-mêmes fabriqué et qu’ils combattent aujourd’hui, ils ne prennent, pour rien au monde, le risque de se faire bousculer sous le soleil, se faire écraser par une foule agitée, ou encore recevoir du gaz lacrymogène dans les yeux. Que nenni !
« Le peuple » est là pour ça… On s’en sert pour, permettez la redondance, servir les desseins cachés de certains, comme au bon vieux temps des colonies, où les tirailleurs africains, les célèbres « tirailleurs sénégalais », étaient les premiers rangs dans une guerre qui n’était pas la leur, et au cours de laquelle ils ont perdu la vie, sans, par la suite, la moindre reconnaissance.
Péan, le « Grand Blanc Saint Sauveur de petits nègres »
Depuis la parution de ses « Nouvelles affaires africaines », le journaliste Pierre Péan a remplacé Jésus dans le cœur de certains. Messie, héros national venu délivrer le peuple gabonais, courageux serviteur du Gabon. Les allégeances de toutes sortes ne finissent plus d’envahir la toile, mettant en exergue une triste réalité que nous pensions révolue : le lancinant, persistant et entêté complexe d’infériorité vis-à-vis de l’Occident dont souffrent encore bon nombre d’Africains.
Comme il l’a lui-même reconnu à l’occasion d’une interview accordée à la Radio France Internationale (RFI), prétendre qu’Ali Bongo est d’origine biafraise, c’est comme annoncer Noël en Décembre.
Autrement dit, il s’agit-là de tout, sauf d’un scoop, cette légende urbaine circulant dans les rues de Libreville depuis des décennies.
On se souviendra par ailleurs que l’opposant Luc Bengone Nsi, avait officiellement énoncé cette théorie en intentant en 2009, une action en justice pour contester l’élection d’Ali Bongo Ondimba.
A cette époque, il n’avait reçu le soutien d’aucun de ses camarades opposants, pas plus que son action n’avait abouti à un quelconque soulèvement populaire.
Et il a fallu que Pierre Péan, Français et Blanc, vienne redire exactement la même chose pour qu’on ait droit à des réactions en masse.
Quoi de plus normal ! Un mot du Maître doit bien valoir mille de l’esclave.
De quoi donner raison à Nicolas Sarkozy qui estimait, avec la suffisance qu’on lui connaît, que « l’Afrique n’était pas suffisamment entrée dans l’Histoire ».
Car comment entrer dans l’Histoire si, à chaque étape importante de NOTRE histoire, l’Occident, en l’occurrence la France, doit nous dicter la conduite à tenir et décider pour nous que « c’est le moment d’agir ».
Qu’a dit Péan que les journalistes d’Echos du Nord, Ezombolo, le Mbandja et bien d’autres n’avaient déjà dit ?
Le jour où Pierre Péan ou un autre, décidera finalement qu’Ali Bongo est l’homme de la situation, changera-t-on de discours ?
Actions contre actions…
On le sait, dans la sombre histoire de la politique, tous les coups sont permis.
Les plus grandes nations du monde, à l’instar des Etats Unis d’Amérique, en ont souvent fait la démonstration : fouiller dans les poubelles de l’adversaire, porter contre lui des attaques en-dessous de la ceinture pour le déstabiliser ou même obtenir son éviction.
Les populations se délectent un temps, de ces anecdotes sur la vie privée des personnalités politiques. Mais une fois passés l’excitation et les commentaires liés à tel ou tel scoop, l’on revient à l’essentiel : les actions.
Et ce que les Gabonais attendent aujourd’hui c’est, non pas que l’on déplace le débat en discutant sur la place publique des affaires privées, mais que les différents adversaires politiques nationaux s’affrontent dans une guerre d’idées et d’actions en faveur du peuple gabonais.
Le débat contradictoire, la critique constructive, la proposition de solutions pour pallier les manquements de l’action gouvernementale, la comparaison d’actions sur le terrain.
La mise en place de la CNAMGS connaît des manquements ? Voilà comment faire pour y remédier ! La vie chère reste d’actualité et le pouvoir d’achat des ménages faiblit de jour en jour ? Voici les mesures à prendre pour résoudre ce problème ! Le système éducatif gabonais va de plus en plus mal ? Voilà notre vision de ce que devrait être l’éducation nationale !
Et nous de dire, voilà les vrais débats qu’attendent les Gabonais !